"Si on veut qu'ils soient réussis, il faut que toute cette organisation, ces financements, cette mobilisation, ne disparaissent pas au moment où la flamme olympique va s'éteindre. Il faut que tout ça dure", a scandé le Premier ministre à Saint-Ouen où il a symboliquement lancé les travaux pharaoniques du village des athlètes.
A l'issue d'un chantier de trois ans, le site de 51 hectares à cheval entre Saint-Denis, Saint-Ouen et L'Ile-Saint-Denis accueillera près de 15.000 athlètes et officiels en 2024 avant d'être reconfiguré en un nouveau quartier, comptant plus de 3.000 logements en 2025.
"Il faut qu'il reste quelque chose, a matraqué Edouard Philippe. Ce quelque chose sera matériel: ce sont les équipements publics, ce village de 51 hectares. Mais c'est aussi des pratiques, des politiques publiques (...) et notamment le fait de redévelopper la pratique sportive chez nos concitoyens."
Pack de 170 mesures
Plus tôt dans la matinée, à Saint-Denis, un paquet de 170 mesures en lien avec les JO, déjà prises ou attendues, a été annoncé à l'issue d'un comité interministériel.
Certaines sont déjà connues, comme la création d'une cellule à Pôle Emploi dédiée aux postes liés aux JO, le plan "aisance aquatique" destiné à lutter contre les noyades, le plan vélo ou encore un système de défiscalisation pour faciliter le sport en entreprises et les inciter à se doter d'équipements sportifs, douches et vestiaires.
Parmi les mesures nouvelles, sont prévus la création d'un label égalité hommes-femmes, qui aura vocation à s'étendre à d'autres événements sportifs, et un plan de formation de jeunes en service civique sur des missions d'accompagnement aux JO (10.000 par an à partir de 2020).
Autre objectif: la formation de 3.000 personnes en situation de handicap pour devenir bénévoles des Jeux.
Par ailleurs, une enveloppe de 20 millions d'euros sera allouée à un vaste programme de recherche sur la haute performance sportive destiné très concrètement à accroître les chances de médailles en 2024.
Localement, des protestations s'élèvent déjà contre le projet de village olympique qui promet de raser une zone accueillant plus d'une vingtaine d'entreprises, trois écoles, un hôtel, une résidence étudiante et un foyer de travailleurs étrangers.
"Cela fait 40 ans que nous sommes là et il n'y a plus de place pour nous, c'est insultant", déplore Boubacar Diallo, représentant des résidents du foyer de travailleurs étrangers de Saint-Ouen sur lequel a été accrochée une large banderole "En lutte pour un relogement digne".
En remplacement, deux nouvelles résidences doivent voir le jour en 2022. Mais les résidents refusent le relogement provisoire proposé par la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo), l'établissement public chargé des chantiers des JO.
Le foyer demeure l'un des derniers dossiers épineux pour la Solideo qui a acquis "près de 90% du foncier à l'amiable" pour un montant de 110 millions d'euros, selon l'Établissement public foncier d'Ile-de-France.
Nuisances
Egalement mécontente, l'école publique d'ingénieurs Supméca, dont le campus sera coupé en deux. "On nous supprime notre réserve foncière. C'est l'argent public qui va permettre de régler le problème des promoteurs privés", tempête son directeur Alain Rivière.
A Saint-Denis, certains habitants craignent aussi des nuisances en raison de la concentration, dans une zone restreinte, de la future piscine olympique, la plus grande gare du Grand Paris, l'enfouissement des lignes à haute tension, le mur anti-bruit de l'A86 et l'aménagement des berges de Seine.
La Solideo promet "qu'il n'y aura pas de chantier de nuit" et assure que "ce qui va se passer en 3-4 ans est la compensation de ce qui ne s'est pas passé depuis 30 ans". Un message qui fait écho à celui du gouvernement qui a dévoilé jeudi une batterie de mesures spécifiques pour la Seine-Saint-Denis.
Les attentes sont également fortes dans le sport, où les craintes de suppression, puis de changement de statut des 1.600 conseillers techniques sportifs ont soulevé de vives critiques.
Le Comité national olympique et sportif français a profité de l'occasion pour interpeller l'exécutif et le Parlement lundi: dans une pleine page de l'Equipe, le CNOSF les exhorte à doter le "budget du sport français à la hauteur des ambitions de notre pays".
"Les clubs sportifs français sont aujourd'hui en plein désarroi", alerte le mouvement olympique français, pointant la "diminution de plus de 20% du budget qui leur était consacré par l'Etat" et la "diminution sévère des emplois aidés".
Entre les coûts d'organisation et les chantiers, le budget total des Jeux s'élève à ce stade à 6,8 milliards d'euros, dont 1,5 milliard de dépense publique.