"On est très heureux comme ça: aujourd'hui, l'équilibre de notre patrimoine nous paraît solide", a déclaré lors d'un entretien avec l'AFP Christophe Kullmann, directeur général de Covivio, huit mois après le changement de nom de l'ancienne Foncière des Régions et quelques semaines avant ses résultats 2018.
Avec une grosse vingtaine de milliards d'euros de patrimoine immobilier, Covivio est l'une des principales foncières basées en France. Elle est loin des quelque 60 milliards du géant Unibail-Rodamco-Westfield (URW), seule foncière du CAC 40, mais à un niveau semblable à Gecina et Klépierre.
Alors qu'URW et Klépierre sont spécialisées dans les centres commerciaux et Gecina dans les bureaux, Covivio est plus diversifiée: les bureaux comptent pour moitié, mais le reste est partagé équitablement entre hôtels et logements.
Sa plus proche équivalente en France sur ce plan, Icade, au capital dominé par le public via la Caisse des dépôts, se divise entre bureaux et établissements de santé, tout en étant active comme promoteur de logements.
"Quand j'ai pris la direction générale de l'entreprise en 2001, le patrimoine était de 100 millions d'euros: la stratégie s'est affirmée progressivement, mais la diversification fait partie de l'ADN de l'entreprise", a expliqué M. Kullmann.
Le groupe, qui a commencé son expansion en profitant de la tendance de grandes entreprises comme EDF et Orange à vendre leurs murs mais en garder l'occupation, s'est ensuite développé au-delà des bureaux, explorant de multiples terrains comme les hôtels, le logement social et les maisons de retraite.
Depuis une dizaine d'années, ayant laissé de côté certaines activités notamment dans la santé, son patrimoine a globalement gardé sa structure actuelle et cet état de fait devrait durer.
"Le bureau restera la première classe d'actifs: ça fait dix ans qu'on attend d'y voir progresser les loyers et aujourd'hui la croissance est là", a promis M. Kullmann. "Ce qui paraît durable et pérenne, c'est le besoin d'espaces pour travailler ensemble."
Stratégie milanaise
Pour le reste, des nuances sont possibles: "l'hôtellerie nous paraît toujours un segment extrêmement profitable: on va vraisemblablement s'y développer de façon plus forte que dans les autres secteurs", a détaillé M. Kullmann. "C'est plus compliqué de continuer à se développer dans le logement en Allemagne."
Car les activités de logement du groupe se concentrent outre-Rhin: parallèlement à sa diversification thématique, c'est la conséquence d'une expansion géographique lors des années 2000 à la suite de laquelle il compte moins de la moitié de ses actifs en France.
Dans ce cadre, Covivio, qui a au passage largement abandonné le logement français, a aussi mis un grand pied dans les bureaux italiens via l'acquisition du groupe Beni Stabili.
A ce titre, alors que l'Italie représente aujourd'hui un cinquième du patrimoine du groupe, il ne s'inquiète pas des conséquences économiques de l'entrée en fonction l'an dernier d'un gouvernement populiste.
Celui-ci, qui multiplie par ailleurs ces derniers jours les attaques verbales contre le président français Emmanuel Macron, table sur un déficit public de plus de 2% en 2019, même s'il a déjà amendé sa cible après un bras de fer avec la Commission européenne.
"Il y a en effet des turbulences, mais il y a un écart entre les discours des politiques et la mise en oeuvre", a relativisé M. Kullmann, exprimant sa confiance dans le marché milanais où Covivio compte se concentrer ces prochaines années.
De même, il dit ne pas craindre l'éventualité d'un Brexit sans accord, les députés britanniques venant de rejeter un projet de texte, alors que le groupe a racheté l'an dernier pour près d'un milliard d'euros d'hôtels au Royaume-Uni.
"On a sécurisé complétement cette opération avec des baux fermes à 25 ans", a assuré M. Kullmann, même si "à court terme, ça peut être difficile: on va peut-être être au minimum garanti en terme de loyers".
"Par contre, à long terme, je reste persuadé que le Royaume-Uni restera une grande puissance: c'est important d'avoir un pied là-bas", a-t-il conclu, soulignant néanmoins que le pays ne représente que 3% du patrimoine de Covivio.