Après celui de la fin mars, ce deuxième projet de loi de finances rectificative (PLFR) intègre les 110 milliards d'euros annoncés par le gouvernement face à "l'urgence économique". Il prévoit un recul de 8% du PIB en 2020, un déficit public d'environ 9% du PIB et une dette à 115%.
Face à une Assemblée réunie en format restreint pour raisons sanitaires, M. Le Maire a reconnu que le recul de 8% du PIB était "un chiffre sévère" mais "pas définitif".
"Nous avons pris 20 points de dette en trois mois", a relevé le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin.
Défendant sans succès une motion de rejet, le chef de file des députés insoumis Jean-Luc Mélenchon a demandé "l'annulation de la dette ou du moins la conversion en dette perpétuelle".
Examiné en première lecture, le texte est attendu au Sénat mardi.
Face à la crise, "aucun citoyen, aucune entreprise, aucun emploi, aucun territoire de la République ne sera laissé de côté", a insisté le rapporteur général Laurent Saint-Martin (LREM).
Cette révision budgétaire version 2 porte notamment à 24 milliards d'euros les crédits destinés à financer le chômage partiel, dont un tiers pris en charge par l'Unedic. "Près de 9 millions de salariés aujourd'hui sont au chômage partiel", ce qui doit éviter des "licenciements de masse", a estimé M. Le Maire.
"Sentiment d'injustice"
Le texte hisse aussi à 7 milliards d'euros le fonds de solidarité en faveur des très petites entreprises et des indépendants.
Le gouvernement met également à disposition 20 milliards d'euros pour recapitaliser des entreprises stratégiques en difficulté dans les secteurs de l'aéronautique, de l'automobile et de la santé, a listé M. Le Maire.
Les oppositions ont réclamé des éclaircissements et des ONG dénoncé "un chèque aux grands pollueurs sans conditions".
"Ce ne sera pas un chèque en blanc", leur a rétorqué le ministre en séance, conditionnant les montées au capital ou éventuelles nationalisations temporaires à "un effort de redressement et de compétitivité" ainsi qu'à "une politique environnementale ambitieuse".
Ce projet de loi comprend en outre une "avance remboursable" pour les PME qui n'obtiennent pas de prêt, ainsi qu'un fonds de soutien aux entreprises de taille intermédiaire d'un milliard d'euros.
La droite a réclamé d'aller plus loin, Eric Woerth (LR) réclamant des annulations de charges pour hôtels, restaurants ou commerces. M. Darmanin a indiqué étudier "une exonération de charges (patronales) à la reprise".
Enfin, le texte de loi tient compte de la prime exceptionnelle de 500 à 1.500 euros destinée aux soignants. Et intègre l'aide aux ménages les plus modestes de 150 euros, plus 100 euros par enfant, annoncée par l'exécutif mercredi.
Evaluée à 880 millions d'euros au total, cette aide est jugée insuffisante par plusieurs députés de gauche. "Elle touche les familles en grande précarité, mais il reste toute une catégorie de travailleurs pauvres" avec "un sentiment d'injustice, peut-être même de colère", selon Jean-Louis Bricout (PS).
Le vote global dans la soirée sur ce budget rectifié devrait cependant être large, socialistes comme Républicains y étant favorables, malgré des "trous dans la raquette". Et même le RN: dans l'hémicycle, Marine Le Pen a apporté son soutien à ce texte, "même lacunaire".
Qui va payer ?
Au-delà, la question du "qui va payer" commence à se poser. Insoumis, communistes et socialistes réclament le rétablissement de l'impôt sur la fortune (ISF). "Vous faites payer le travail, comme avant. Nous voulons faire participer le capital", a lancé le numéro un du PCF Fabien Roussel.
Le "marcheur" Laurent Saint-Martin leur a déclaré jeudi que "l'ISF pour vous est un symbole" mais "on ne répond pas à la tempête par des dispositifs fiscaux".
Quelques rares voix dissonantes se font entendre chez LREM, dont la députée Fiona Lazaar ou le sénateur Xavier Iacovelli favorable "à une contribution exceptionnelle des plus grandes fortunes pendant cette crise", dit-il à l'AFP.
A ce stade, l'exécutif refuse toute augmentation d'impôt.