"Les gens n'en peuvent plus de la paperasse! C'est épuisant, exaspérant, nerveusement éprouvant..." : dans le théâtre de Viry-Châtillon (Essonne), à l'orchestre bondé, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire explique mardi à une grosse centaine de chefs d'entreprises qu'il les a compris, au cours d'une des "Rencontres de la Simplification" organisées depuis novembre, au plus près du public concerné.
Mardi dernier, le président de la République Emmanuel Macron avait lui aussi demandé au gouvernement de mettre fin aux "normes inutiles" : "c'est la France du bon sens, plutôt que la France des tracas (...). En la matière, nous avons eu trop de tabous", avait-il lancé.
D'autant que les difficultés administratives coûtent environ 3% de PIB chaque année aux entreprises.
Outre ces Rencontres de la Simplification, animées à trois reprises par Bruno Le Maire en personne, mais aussi 43 autres fois par cinq parlementaires "pilotes" de ce projet, Bercy a consulté 75 organisations professionnelles sur leurs voeux de simplification.
Comme pour d'autres réformes, la première loi de Simplification Pacte de 2019, ou la loi Industrie verte l'an dernier, le gouvernement veut "écouter les citoyens sans arriver avec des préjugés", observe Bercy.
Une consultation citoyenne a ainsi été menée sur six semaines fin 2023 par le site make.org, spécialisé dans "les solutions digitales pour améliorer la démocratie", et intitulée "Entrepreneuses, entrepreneurs: quelles mesures concrètes pour vous simplifier la vie ?".
Les résultats ont été présentés mercredi: la consultation a enregistré 29.047 participants, a généré 5.447 propositions - "un livre de 300 pages" selon make.org -, et plus de 734.000 votes sur ces propositions. La simplification des procédures y est unanimement réclamée, ainsi que l'adaptation de l'administration aux usagers.
"Ses pommes, ses tomates"
Bruno Le Maire, qui souhaite, selon Bercy, "tirer très vite des conclusions" de ces consultations "par des mesures concrètes et ambitieuses", a annoncé qu'il voulait mettre désormais "l'administration au service des citoyens, sur la base de la confiance".
Jeudi, il reviendra sur ce thème lors de la prise de fonction de Michel Picon, nouveau président de l'U2P, une des trois organisations patronales représentatives. La CPME et le Medef ont déjà fait connaître leurs suggestions. Vendredi dernier, Patrick Martin, le président du Medef, s'est montré confiant que cette tentative-là de simplification des normes "serait la bonne".
Alors que se propage la colère des agriculteurs, le gouvernement semble miser sur la future loi comme un des éléments de réponse.
Les sujets agricoles ont été "a minima bien pris en compte dans la réflexion", selon Bercy, soulignant que la FNSEA et la Coopérative agricole ont fait partie des fédérations consultées sur la future loi et y ont répondu dès décembre. Le ministère de l'Agriculture est "embarqué depuis le début" dans la réflexion, assure aussi Bercy.
Mardi à Viry-Châtillon, Bruno Le Maire a envoyé plusieurs messages aux agriculteurs, pourtant peu représentés dans une assistance de petits patrons de l'Essonne. Ministre de l'Agriculture lui-même de 2009 à 2012, il s'est dit "résolument de leur côté" face à la multiplication des normes.
Il a aussi considéré que la France devait "redevenir une nation de production", pas seulement de "ses voitures, ses avions et ses satellites", mais aussi de "ses pommes, ses tomates, sa viande, son lait et ses produits agricoles". Il a également indiqué être prêt à "aller plus loin" pour faciliter la transmission des terres.
Après la restitution de leur propre rapport par les cinq parlementaires début février, et les arbitrages de ce qui sera mis dans la loi à même échéance, Bercy devrait avoir bâti fin mars le texte de Simplification qui sera présenté en conseil des ministres "avant l'été", selon le ministère.