Cet ingénieur en mécanique fait partie d'un groupe local, géré par son fournisseur d'électricité, qui exploite une éolienne terrestre près de sa maison dans l'East Yorkshire, dans le nord de l'Angleterre.
Les ménages membres de ce groupe bénéficient d'une remise de 20% sur leur facture d'électricité lorsque la turbine fonctionne, qui peut grimper à 50% en cas de vents forts.
"Quand tout le monde dit +tous aux abris!+, moi je pense +faites que le vent continue!+", s'amuse Ellis Jacklin auprès de l'AFP.
Il affirme avoir économisé près de 400 livres (près de 460 euros) depuis qu'il a rejoint l'an dernier ce dispositif lancé par Octopus Energy Generation, qui a créé deux autres de ces "Fan Clubs" en Angleterre et au Pays de Galles.
Au moment où le Royaume-Uni affronte sa pire crise du coût de la vie depuis des décennies, marquée notamment par une flambée des prix de l'énergie, ces économies sont inespérées.
"C'est vraiment important", souligne Ellis Jacklin. "Je ne m'attendais pas à économiser autant d'argent grâce à ça. Tous ceux à qui j'en parle sont jaloux", ajoute le trentenaire.
Et pour cause, le développement de l'éolien terrestre est au point mort au Royaume-Uni, réduisant considérablement l'opportunité de bénéficier d'une telle offre.
Moins qu'en Ukraine
L'éolien en mer a pourtant les faveurs de Londres, qui a annoncé jeudi des incitations financières pour doper l'attractivité du secteur - après l'échec retentissant en septembre d'un appel d'offre qui avait terni son image de leader en la matière.
Mais le gouvernement britannique a imposé de fortes contraintes règlementaires sur l'éolien terrestre depuis 2015, face à l'opposition parfois vive exprimée dans certains territoires ruraux, électorat clé pour les conservateurs au pouvoir.
L'opposition d'un seul riverain peut bloquer un projet d'installation de nouvelles turbines. Une mesure critiquée comme une interdiction de fait par les défenseurs de l'éolien, qui estiment que le Royaume-Uni n'atteindra pas ses objectifs de neutralité carbone en 2050 sans cette énergie.
Le gouvernement a bien assoupli récemment la réglementation, mais insuffisamment jugent les écologistes et les industriels du secteur.
L'an dernier, deux nouvelles éoliennes terrestres seulement ont été installées en Angleterre, moins qu'en Ukraine, pourtant en guerre, a souligné l'association professionnelle RenewableUK.
Les récentes modifications créent un "cadre plus positif", nuance toutefois Zoisa North-Bond, la patronne d'Octopus Energy Generation, qui a lancé ses "Fan Clubs" aux Etats-Unis et en Allemagne, avec le souhait d'en créer 2.000 dans le monde d'ici à 2030.
Elle affirme avoir reçu plus de 20.000 demandes au Royaume-Uni.
Tinder de l'éolien
L'entreprise a lancé une plateforme, "Winder", dont le nom s'inspire du site de rencontres Tinder. Elle met en relation ces groupes avec des propriétaires potentiellement intéressés pour accueillir des éoliennes sur leurs terres.
"Winder a déjà identifié de nombreux endroits où il est possible d'installer des éoliennes rapidement", affirme Zoisa North-Bond.
"Il est vital que nous accélérions le développement de l'une des énergies les moins chères et les plus rapides à déployer que nous pouvons développer ici, sur notre territoire", insiste-t-elle.
Mais ce développement dépend encore beaucoup du niveau d'opposition locale et Octopus met en avant des sondages montrant que 9 Britanniques sur 10 sont prêts à soutenir l'installation d'éoliennes près de chez eux, si cela leur permet d'avoir une énergie moins chère.
Dans sa région venteuse de l'East Yorkshire - l'une des plus dotées en éoliennes, quasiment toutes construites avant 2015 -, Ellis Jacklin, qui se définit plus comme un pragmatique que comme un militant écologiste zélé, utilise l'application de son téléphone pour savoir quand la turbine fonctionne le plus et donc quand le prix de l'électricité est le plus bas.
Il peut alors mettre en route ses appareils électriques les plus énergivores, comme sa machine à laver.
"La majorité des gens feront pareil s'ils peuvent voir les avantages financiers", estime-t-il.