Chiffres clés : le tableau noir des défaillances d’entreprises en 2023 en France
- 55.492 entreprises sont concernées par l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire*. Pour mémoire et par comparaison en 2010- 2015 : la crise des Subprimes et le contrecoup de la crise des dettes publiques en Europe avaient porté les défaillances à plus de 62.000 en moyenne sur plusieurs années.
- 37,2% de hausse pour le seul 4ème trimestre 2023, soit 16.820 entreprises défaillantes
- 37.000 emplois sont menacés, le niveau le plus haut enregistré depuis 2016.
- 243.000 emplois directs qui sont ou ont été menacés en 2023
- Les PME de plus de 100 salariés connaissent la plus forte hausse
- 1 défaillance sur 3 se situe en Ile-de-France et en Auvergne Rhône-Alpes avec une hausse des procédures de 38%.
* Source : Banque de France
Etat des lieux des secteurs d’activité touchés
Ces chiffres dressent un tableau sombre sur l’état de fragilité de nos entreprises. Il s’agit même de l'un des pires quatrièmes trimestres en 30 ans. Seule la période de récession de 1992-1993 avait amené la France à des seuils comparables pour un dernier trimestre. La proportion de PME-ETI (8,2%) est aussi au plus haut depuis le 3etrimestre 2010 soit le taux le plus élevé depuis la crise financière, précise une récente étude*.
Parmi les secteurs les plus touchés en France :
- L’immobilier accuse une hausse de l’ordre de + 40% sachant que les agences immobilières enregistrent la pire tendance (116,7%).
- La construction est aussi très à la traine avec 38,7% : plus de 14.000 entreprises font défaut dont près de 11.000 dans les seules activités du bâtiment.14.112 entrepreneurs ont obtenu l’ouverture d’une procédure. 10.990 se situaient dans le gros œuvre (4.140 ; + 44,1%) et le 2nd œuvre (6.850 ; + 38,9%). La maçonnerie générale (+2.779 ; +50,5%) et les travaux d’installation électrique (1.161 ; +48,3%).
- L’hébergement-restauration, largement soutenue pendant la crise sanitaire connaît une sorte de contrecoup, avec 44,6% de défaillances. Le poids des baux commerciaux pesant trop lourd dans les charges des établissements.
* Étude Altarès janvier 2024
La région Île-de-France très fortement impactée
Territoire d’accueil de nombreux sièges sociaux, l’Île-de-France, (notamment les Hauts-de-Seine) est particulièrement touché : 12.653 procédures ont été ouvertes en 2023, concentrant ainsi 22% des défaillances d’entreprises. Au total, le nombre de défaillances d’entreprises de plus de 50 salariés en Ile-de-France a connu une hausse de + 53,3% entre 2022 et 2023. Parmi les secteurs franciliens les plus touchés :
- L’hébergement restauration enregistre une augmentation de + 53,8% d’ouvertures de redressement judiciaire ; des défaillances bien plus importantes dans le secteur de la restauration (+57,5%).
- L’immobilier francilien constitue le secteur le plus touché avec + 59,9% de redressement judiciaire.
- La construction connaît une hausse plus élevée (+44,8%) que l’augmentation nationale (+ 38,7%).
Cette situation résulte de plusieurs facteurs souvent cumulatifs :
- Les entreprises sont confrontées à des problèmes structurels car avant la période COVID, nombre d’entre elles étaient déjà fragilisées.
- Des difficultés conjoncturelles (guerre en Ukraine et conflit israélo-palestinien) ont eu un impact sur l’augmentation des prix de l’énergie et affectent notamment les entreprises exportatrices.
- Toutes les entreprises subissent de plein fouet une hausse des charges réduisant leur trésorerie.
- La combinaison d’un niveau faible de trésorerie et de dettes persistantes augmente d'autant le risque de défaillance.
La pression bancaire est telle que les entreprises se trouvent incapables de renégocier leur emprunt malgré l’accord de janvier 2022 sur le rééchelonnement des PGE jusqu’au 31.12 2023. Elles voient leur emprunt gelé ou décalé et leur capacité de financement disparaître. Si les TPE sont les plus nombreuses à défaillir, 2023 a confirmé que les partenaires commerciaux PME et ETI sont, et devraient rester, également très exposés au risque. C’est tout un écosystème qui est grippé. La fragilisation des trésoreries de pans entiers de filières et l’allongement des délais de paiement provoquent des défaillances en chaîne. Il faut savoir agir au plus vite pour endiguer la situation rapidement.
La procédure de conciliation devient alors le seul moyen pour les entreprises de négocier un emprunt bancaire mais les démarches sont si complexes tant psychologiquement qu’administrativement que bien souvent la décision est reculée.
Au secours des entreprises : les experts comptables franciliens
Il existe des moyens pour se prémunir de ces situations catastrophiques. Les experts-comptables d’Île-de-France jouent un rôle de prévention déterminant. Leur connaissance des rouages des entreprises leur permet de détecter les signaux avant-coureurs (dénonciation des découverts, problèmes d’organisation, perte de clientèle…) et de mettre en place les bons réflexes pour accompagner l’entreprise dans la mise en œuvre des procédures préventives (mandat ad hoc et conciliation) et de sauvegarde.
Lors des phases sensibles (création d’entreprise de moins de 2 ans, période de transmission, phase de développement) les experts-comptables redoublent d’attention. Leur expertise avisée est essentielle pour déceler d’éventuelles erreurs de gestion comme:
- choix stratégique inadéquat,
- méconnaissance des prix de revient,
- tableau de bord non maitrisé,
- mésentente entre les dirigeants,
- compétences insuffisantes,
- faiblesse du système d’information,
- inadaptation du trio hommes-produits-marchés.
Leur spectre d’analyse et leurs compétences sont larges. Les difficultés financières seront passées au crible : crédit inter-entreprises, sous-capitalisation chronique, rupture du cycle de trésorerie, investissement mal financé, pertes structurelles….. Plus le diagnostic sera posé tôt, plus les solutions seront efficaces et plus rapide sera le redressement.
C'est dans ce sens que l'Ordre des experts-comptables d'Île-de-France organise le 29 février prochain, une table ronde sur le sujet avec ses partenaires, Compagnie régionale des commissaires aux comptes de Paris et Tribunal de commerce de Paris.
Pour Virginie Roitman, présidente de l'Ordre : « Il s'agit pour chacune de nos institutions de poursuivre l'évangélisation de nos professionnels, experts-comptables, CAC, avocats, qui ont un rôle de vigie, de conseil et d'accompagnement absolument indispensable pour prévenir les défaillances quand il en est encore temps. »
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