Ces modèles virtuels utilisent des données réelles pour créer des simulations capables de prédire les performances d'un produit ou d'un processus, servant de boucle de rétroaction constante d'informations en temps réel. Selon un rapport de Future Market Insights, le marché mondial des modèles virtuels devrait connaître une croissance annuelle de 22,6% au cours de la prochaine décennie, le secteur de la construction étant l'un de ceux qui devraient en bénéficier le plus.
Utilisés en tandem avec des capteurs intelligents installés dans les bâtiments, les jumeaux numériques révèlent beaucoup de choses sur les performances d'un bâtiment : par exemple, s'il est possible d'améliorer l'isolation pour réduire les émissions d'énergie, ou de prédire quand une pièce risque de tomber en panne afin de la réparer avant qu'elle n'entraîne d'autres problèmes.
Les informations collectées via ces capteurs aident les organisations à comprendre les véritables performances des produits, des services et des systèmes, en recueillant des données sur la température, l'éclairage, l'humidité et d'autres facteurs. Elles peuvent alors prendre des décisions plus éclairées pour les projets futurs et, dans le cas des fabricants par exemple, elles peuvent créer des produits plus réactifs et plus performants tout au long de la durée de vie d'un bâtiment.
Le manque de coopération freine l'industrie
Toutefois, le manque de coopération entre les secteurs entrave actuellement l'efficacité des jumeaux numériques pour atteindre les objectifs de durabilité. De nombreuses organisations développent des jumeaux numériques séparément et investissent dans leurs propres systèmes de gestion de l'information pour gérer les données, ce qui crée des redondances et des informations en silos.
Cela rend le jumelage numérique moins efficace, car les silos d'information créent des écarts entre les performances prévues et réelles des bâtiments. Les données étant conservées dans des systèmes distincts, les organisations ne sont pas en mesure d’établir et visualiser les liens entre le développement des produits et la fabrication, et la performance de l'environnement bâti en est négativement impactée.
Le secteur est pénalisé par un manque de norme et l’absence d’une nécessaire harmonisation au niveau européen. Les Espagnols ont voulu lancer une norme, mais cela s’est avéré prématuré et aucun consensus n’a abouti pour définir précisément le jumeau numérique. Nous avons besoin d’un groupe de travail qui permettrait de produire, à partir de cas d’usage, un rapport technique sur ce que doit être un jumeau numérique – et in fine aboutir à une norme.
La dernière pièce du puzzle - rendre les données suffisamment robustes pour qu'elles puissent être exploitées
Ce cadre commun encouragera les différents secteurs à collaborer en surface, mais chaque organisation impliquée dans la chaîne de valeur de la construction a besoin de visibilité sur les données du jumeau numérique pour pouvoir en tirer tous les avantages - des fabricants aux propriétaires de bâtiments.
C'est là que les modèles de données ont un rôle important à jouer. Ils aident l'industrie à normaliser les données collectées par ce type de technologie, ce qui les rend plus facilement compréhensibles et utilisables par tous.
Ces modèles s'appuient sur des dictionnaires de données numériques qui créent un langage technologique commun pour mesurer et évaluer les performances des produits de construction. Ils indiquent les caractéristiques des produits et des matériaux en fonction des normes internationales, européennes et nationales.
De cette manière, les organisations peuvent voir l'efficacité énergétique de l'éclairage ou de l'isolation d'un bâtiment, par exemple, et comprendre si cela les aide à atteindre leurs objectifs de développement durable - avant de procéder à des améliorations. Ces données étant normalisées, il est également plus facile de les partager à grande échelle.
Cette approche normalisée de la gestion des données jouera un rôle essentiel dans l'exploitation du véritable potentiel des jumeaux numériques et aidera les organisations à se faire une idée plus précise des changements qu'elles peuvent apporter aux performances des produits et des bâtiments afin de se rapprocher, et de rapprocher l'industrie, de l'objectif « zéro émission ».
Tribune de Enzo Blonk, Head of Market Europe chez Cobuilder (Linkedin).