Fléchissement de la consommation des ménages, maintien de leur épargne à des niveaux élevés, essoufflement de l'investissement des entreprises, tarissement de l'accès au crédit avec la forte remontée des taux: le printemps risque d'avoir été brumeux pour l'activité économique.
Après un premier trimestre marqué par une modeste croissance de 0,2%, l'Insee indiquera si sa prévision d'une progression de 0,1% du produit intérieur brut (PIB) se confirme ou non pour la période d'avril à juin.
"A peu près tous les indicateurs pointent vers un affaiblissement très marqué de la croissance", constate Maxime Darmet, économiste d'Allianz Trade, interrogé par l'AFP.
Moteur traditionnel de l'économie, les dépenses des ménages ont continué à pâtir d'une inflation élevée.
Celle-ci a commencé à refluer au cours du trimestre, passant son pic et revenant 4,5% sur un an en juin contre 5,1% en mai et 5,9% en avril, grâce au repli de l'énergie, mais les prix alimentaires ont continué de flamber, avec près de 14% de hausse.
Pour tenter de juguler ces hausses de prix et revenir à l'horizon 2025 à une inflation de 2%, la Banque centrale européenne (BCE) opère depuis un an un resserrement monétaire d'une ampleur inédite, qui se traduit par une hausse marquée des taux directeurs.
Alors que le crédit avait jusqu'ici permis de soutenir la consommation des ménages, leurs investissements et ceux des entreprises, ce durcissement des conditions financières commence aussi à peser sur la demande.
Pas de récession
Parmi les éléments de résilience cette fois, Stéphane Colliac, économiste de BNP Paribas, énumère la bonne tenue des secteurs automobile et aéronautique, le tourisme et les transports qui ont connu au deuxième trimestre un regain d'activité après les grèves liées à la réforme des retraites.
"Mais la moindre demande a un impact sur la croissance puisqu'elle contraint la production" avec des carnets de commandes désormais "plus faibles", souligne l'économiste auprès de l'AFP.
Son confrère Maxime Darmet constate une hausse des stocks, qu'il juge "de mauvais augure". Elle traduit un surplus d'offre et "c'est en général le signe d'un retournement du cycle à la baisse".
L'Insee publie vendredi deux autres indicateurs qui permettent également de prendre le pouls de la situation conjoncturelle du pays: une estimation provisoire de l'inflation en juillet et la consommation des ménages au mois de juin.
Ce tableau en demi-teinte pour le deuxième trimestre annonce un net coup de frein pour l'ensemble de l'année 2023, avec une hausse prévue de 0,6% du PIB, selon l'Insee, loin des 2,5% de 2022.
Le gouvernement est jusqu'à présent plus optimiste, misant sur une croissance de 1%, mais il pourrait revoir ses prévisions à l'occasion de la présentation du budget 2024 en septembre.
Selon le Fonds monétaire international (FMI), la France échapperait toutefois à la récession cette année, contrairement à l'Allemagne, et résisterait même mieux qu'il ne l'anticipait jusqu'ici. Sa prévision a été relevée à 0,8% (+0,1 point par rapport à avril).
La volonté de l'exécutif de rétablir des finances publiques minées par les crises en déployant une politique budgétaire plus restrictive - avec notamment la réduction du bouclier tarifaire - devrait peser. Ainsi, les tarifs réglementés de l'électricité augmenteront de 10% au 1er août.
Ces effets négatifs seraient toutefois compensés par le maintien peu ou prou de l'emploi et l'accélération de la progression des salaires, qui rattrapent l'inflation avec un décalage. Avec à la clef, un petit rebond de la consommation des ménages.