Retraites : la réforme amendée ?
Le dossier de la réforme des retraites, toujours très contestée, sera-t-il rouvert par le gouvernement Barnier ?
Dans son programme en tant que candidat à l'investiture chez Les Républicains pour la présidentielle de 2022, Michel Barnier, partisan d'un relèvement de l'âge de départ à 65 ans, promettait qu'avec lui, il n'y aurait "pas de pension inférieure au Smic pour une carrière complète".
Tandis que la réforme de 2023 prévoit un relèvement progressif de l'âge à 64 ans, le Nouveau Front populaire (NFP), comme le RN, veulent revenir à 62 ans. Des voix socialistes ou centristes plaident plutôt pour rediscuter des paramètres.
Les macronistes et la droite appellent, eux, au "sérieux" budgétaire : même avec la réforme, le Conseil d'orientation des retraites (COR) prévoit un déficit à 0,4 point de PIB en 2030.
Plusieurs syndicats, comme FO et son représentant Michel Beaugas, plaident pour "abroger" la mesure phare, mais pas forcément ses contreparties sociales, et trouver de "nouvelles recettes" pour financer le régime.
D'ici fin 2024, "840.000 personnes" seront déjà parties à la retraite avec les nouvelles règles, selon le directeur de la Caisse nationale d'Assurance vieillesse (Cnav) Renaud Villard. Quelque 685.000 ont déjà bénéficié en 2023 d'une majoration de leur "petite pension" - principale "mesure sociale" de la réforme - et 1,1 million d'autres, au dossier plus complexe à recalculer, seront à leur tour revalorisées cet automne.
Assurance chômage : "en suspens"
Que va-t-il se passer pour les chômeurs allocataires après le 31 octobre ? La réforme durcissant les conditions d'accès et les règles d'indemnisation a été suspendue au soir du premier tour des législatives et les règles actuelles prolongées à deux reprises.
Les syndicats avaient dénoncé "la réforme la plus inutile, la plus injuste et la plus violente jamais vue".
Un accord avait été négocié par plusieurs syndicats avec le patronat à l'automne 2023, mais sa validation dépendait d'autres discussions entre partenaires sociaux sur l'emploi des seniors, qui ont capoté au printemps.
"Si, aujourd'hui, on a toujours en suspens une réforme de l'assurance chômage, c'est bien qu'on veut aller faire les poches des chômeurs pour payer d'autres choses", a estimé mercredi sur Franceinfo la secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon, qui plaide pour l'application de l'accord signé par les partenaires sociaux l'année dernière.
Au Medef, on prône un retour à l'accord de 2023, et ne "pas renégocier quelque chose sur lequel tout le monde était d'accord".
"On demande à ce qu'on nous redonne la main", et que s'ouvre une nouvelle négociation, affirme de son côté à l'AFP Michel Beaugas (FO).
Quelle option choisira Michel Barnier ? En 2021, il plaidait pour une suppression systématique des allocations chômage "après deux refus d'offres d'emploi raisonnables", une mesure entrée en vigueur cette année pour certains refus de CDI.
Plus généralement, le nouveau locataire de Matignon affirmait qu'il ne voulait "plus de passagers clandestins dans notre système social".
Emploi des seniors : "inaboutie"
Le président du Medef Patrick Martin a proposé fin août de reprendre la négociation "inaboutie" sur l'emploi des seniors.
Cette négociation pour un "pacte de la vie au travail", destinée à aider au maintien des seniors dans l'emploi, avait échoué en avril, après plus de trois mois de discussions laborieuses.
"Il y a beaucoup de grain à moudre", veut-on croire au Medef sans préciser à ce stade quelles pourraient être les nouvelles propositions de l'organisation patronale, qui veut renégocier dans le cadre d'un "agenda autonome", sans cadrage gouvernemental.
Côté syndical, l'idée de rouvrir ce débat n'est pas accueillie négativement, notamment par la CFDT.
Mais, affirme Sandrine Mourey, négociatrice CGT, le patronat a "quand même un peu torpillé la négociation". "Que proposent-ils de nouveau ?", demande la syndicaliste, notant qu'ils ne veulent pas de "contraintes pour les entreprises".
Jean-François Foucard (CFE-CGC) ne voit pas "ce qui aurait fondamentalement fait changer" d'avis le Medef: "ils ne veulent que des baisses de droits et récupérer de l'argent", dit-il.
"Il faut recommencer sur de nouvelles bases avec bien évidemment un nouvel âge de départ à la retraite qui ne serait pas 64 ans mais 62", plaide Michel Beaugas (FO). Il veut croire qu'en l'absence de majorité à l'Assemblée nationale, "le contexte a changé", dans un sens moins favorable au patronat qui "depuis sept ans n'avait pas besoin de négocier car avant même de demander on leur donnait".