"C'est un chiffre qui est au-delà nos espérances", a déclaré à l'AFP le ministre de l'Économie Bruno Le Maire quelques minutes après la publication du chiffre par l'Insee vendredi, le qualifiant de "résultat exceptionnel".
Alors que produit intérieur brut (PIB) n'est plus inférieur que de 0,1% à celui du quatrième trimestre 2019, l'économie française "revient à son niveau d'avant-crise", selon l'Institut national des statistiques.
"L'objectif que nous nous étions fixé était de retrouver ce niveau au mieux fin 2021 ou peut-être début 2022", a rappelé Bruno Le Maire. Par comparaison, l'Allemagne ou l'Italie n'ont pas encore tout-à-fait retrouvé leurs niveaux d'avant-pandémie.
Le ministre a remercié "tous les Français qui ont participé à cette croissance avec leur consommation, tous les entrepreneurs qui ont investi, qui se sont remis à exporter, tous les salariés qui se sont remis au travail après cette crise".
Il s'agit de la croissance la plus élevée depuis le troisième trimestre 1968, hormis le rebond de l'été 2020 (+18%) suite au premier confinement, une bonne nouvelle pour Emmanuel Macron à six mois de l'élection présidentielle, lui qui joue la carte de la compétence économique depuis le début de la crise. A fortiori avec le reflux du chômage.
L'estimation de croissance pour le deuxième trimestre est par ailleurs révisée en hausse de 1,1% à 1,3%, a encore rapporté l'Insee. Au premier trimestre, elle était de 0,1%.
Même si l'économie stagnait au dernier trimestre de l'année, la croissance sur l'année serait donc au minimum de 6,6%, a expliqué à l'AFP Charlotte de Montpellier, économiste de la banque ING... donc largement au-dessus des prévisions du gouvernement et de l'Insee, qui étaient de 6,25%.
Avec la réouverture des secteurs liés aux loisirs et au tourisme, les dépenses de consommation des ménages ont notamment fortement accéléré, gagnant 5% sur un trimestre, a précisé l'Institut.
"Nous avons une politique économique qui a protégé la rémunération des salariés pendant la crise, ça a favorisé la consommation", a souligné Bruno Le Maire qui a expliqué que les Français avaient commencé à dépenser une partie des 160 milliards d'euros accumulés pendant la crise sanitaire.
"Le pass sanitaire a probablement joué favorablement, les gens se sont sentis sécurisés en sortant", a estimé Philippe Waechter, économiste du gestionnaire d'actifs Ostrum.
Environnement inflationniste
L'économie a été tirée par la réouverture des services, l'activité de l'hôtellerie-restauration bondissant de 58,9% sur le trimestre.
En revanche, la production de biens manufacturiers reste à 6% en dessous de son niveau d'avant-crise.
"Si la production manufacturière marque le pas c'est par pénurie de matériaux et également par pénurie de main d'oeuvre", explique Bruno Le Maire.
"Quand vous regardez dans la construction, il n'y a pas de bois, pas d'acier, pas d'aluminium", a-t-il ajouté.
Au troisième trimestre, la contribution du commerce extérieur à la croissance a par ailleurs été positive de 0,6 point de PIB, les exportations accélérant de 2,3% tandis que les importations sont restées quasi-stables.
Mais cette tendance pourrait s'inverser lorsque l'industrie française, grosse importatrice d'équipements, se remettra à importer davantage, a expliqué à l'AFP Selin Ozyurt, économiste de l'assureur-crédit Euler Hermes.
Le rebond de l'activité a aussi fait baisser le nombre de chômeurs de 5,5% sur le trimestre, tandis que de nombreux secteurs connaissent des difficultés de recrutement.
L'embellie de l'emploi pourrait atténuer les craintes qui pèsent sur le pouvoir d'achat, même si ce dernier n'a pas baissé avec la crise et a progressé de 8% depuis le début du quinquennat, selon le gouvernement.
La pénurie de main d'oeuvre accroît en effet le pouvoir de négociation des salariés et devrait déboucher sur des augmentations de salaire de 1,8% à 2% cette année et de 2,5% en 2022, selon Selin Ozyurt, qui voit s'installer durablement un "environnement plus inflationniste" à 2% environ de hausse des prix.
En octobre, l'indice des prix à la consommation a progressé de 2,6% sur un an, après 2,2% en septembre.