Aujourd'hui, les budgets des grands aéroports fonctionnent sur deux modèles distincts: la "caisse unique" ou la "double caisse", ce dernier dispositif étant en vigueur à Paris-Charles-de-Gaulle et Orly (Groupe ADP) et Nice (Groupe Aéroports de la Côte d'Azur).
Dans ce cas de double caisse, l'une est abondée par les redevances des compagnies aériennes, finance l'exploitation des activités aéronautiques et fait l'objet d'une régulation par une autorité indépendante, l'ART; les bénéfices de l'autre, issus des recettes des magasins, restaurants ou parkings des aéroports, reviennent aux gestionnaires.
En revanche, les aéroports en simple caisse peuvent financer une partie de leurs activités d'exploitation par leurs recettes commerciales, ce qui réduit l'effort demandé aux compagnies.
La réforme évoquée vendredi par le ministre délégué aux Transports Clément Beaune, lors du congrès annuel de l'Union des aéroports français (UAF), consisterait en un modèle "aménagé" entre caisse unique et double caisse où les gestionnaires pourraient sanctuariser une partie des bénéfices commerciaux.
Elle serait en revanche conditionnée à la conclusion de "contrats de régulation économique" (CRE), fixant sur plusieurs années la trajectoire budgétaire des aéroports pour le fonctionnement des activités aéronautiques, et donc celle des redevances.
"Je suis convaincu que le caractère pluriannuel de ces contrats est particulièrement adapté aux défis du secteur, surtout dans une période d'investissement massif (...) pour la transition écologique", a affirmé M. Beaune.
Il a promis de "simplifier et rendre beaucoup plus robuste le processus d'élaboration de ces CRE" et mentionné l'échéance du premier semestre 2024 pour ce nouveau cadre réglementaire, qui a fait l'objet d'un accord de principe, encore à affiner, entre gestionnaires d'aéroports et compagnies aériennes.
Dans un rapport le 31 janvier dernier, l'ART (Autorité de régulation des transports), qui régule les redevances des aéroports ou groupes aéroportuaires ayant dépassé cinq millions de passagers lors d'une des cinq années civiles précédentes, avait qualifié de potentiel "compromis intéressant" le développement de ces caisses aménagées.
"Correctement paramétré", un tel système "favorise la création de valeur en soutenant les investissements dans les activités aéronautiques et commerciales. Il permet également de limiter les surprofits des aéroports qui seraient apparentés à des rentes", selon l'autorité indépendante.
Le président de l'UAF, Thomas Juin, s'est félicité de cette annonce "décisive", au moment où les aéroports, engagés comme l'ensemble du secteur aérien dans une décarbonation de leurs activités, doivent trouver des financements à long terme et sont en quête de "visibilité".
Leurs actionnaires doivent bénéficier d'une "juste rémunération des investissements qu'ils réalisent", a-t-il plaidé, en promettant que ce nouveau dispositif ne se traduirait pas par des hausses brutales de redevances.
Sur l'autre grande revendication de l'UAF, la conversion en subvention des avances consenties aux aéroports pendant la crise sanitaire au titre de la sécurité, M. Beaune s'est dit "prêt à retravailler à ce sujet" en 2024, sans donner plus de détail.
Selon M. Juin, la somme totale engagée par les aéroports depuis 2020 pour ces "missions régaliennes" est d'un milliard d'euros et va s'alourdir malgré la reprise du trafic: "on peut dire que le système est en faillite", a-t-il prévenu.