Longue de 35 km, la nouvelle ligne de métro doit relier, au sud-ouest de Paris, l'aéroport d'Orly à Versailles et entrer en service par étapes d'octobre 2026 à 2030.
Elle traversera le plateau de Saclay sur environ 14 km: aérienne en viaduc de Massy à Saclay (Essonne) puis au ras du sol jusqu'à Magny-les-Hameaux (Yvelines).
Le viaduc est déjà entièrement construit et la mise au sol du métro "débutera au printemps", indiquait Vianney Elzière, directeur de projet de la ligne 18, lors d'une visite du chantier en novembre.
Cette portion aérienne de la ligne traversera cependant les zones agricoles parmi les plus fertiles de France, un important réservoir de biodiversité et propices au déplacement de nombreuses espèces.
Plus de 4.000 hectares de terres du plateau - dont environ 1.650 hectares de forêts, cours d'eau, rigoles - sont d'ailleurs sanctuarisées depuis 2010 dans la Zone de protection naturelle agricole et forestière (ZPNAF), un dispositif national unique.
La partie aérienne du métro, et en particulier la section au sol, risquent de "constituer une barrière physique" aux continuités écologiques du plateau, reconnaît dans son étude d'impact la Société du Grand Paris (SGP), chargée de construire l'ouvrage.
Crapauduc, buses, dalots
La circulation des animaux sera néanmoins garantie par la mise en place de mesures pour "éviter ou réduire au maximum" l'impact de la ligne 18, assure la SGP à l'AFP.
Elle prévoit par exemple l'installation d'écrans anti-collision pour protéger les chauves-souris abondantes le long de la ligne, créant "des zones de passage", expliquait Thomas Poly, directeur de projet adjoint du viaduc, durant la visite.
A Palaiseau (Essonne), un tunnel destiné à la traversée de crapauds sera aménagé en plus de la création de nouvelles mares pour protéger les amphibiens.
La SGP va également placer des "buses ou dalots couverts de terre végétale" le long de la section aérienne pour permettre à la "petite faune" de circuler de part et d'autre de la future ligne.
Malgré cela, la ligne 18 "constitue un obstacle évident au passage de n'importe quel organisme terrestre et même aérien", critique François Chiron, écologue et enseignant à l'université Paris-Saclay.
Il a réalisé une étude avec des chercheurs et des étudiants de plusieurs organismes de recherche et établissements de l'enseignement supérieur, montrant que l'étude d'impact de la SGP "sous-estime largement" les effets du passage de la ligne 18 au niveau du sol.
Pollution lumineuse et sonore
L'étude de la SGP "présente plusieurs faiblesses importantes", indiquent-ils, telles que le manque de prise en compte de l'interaction des territoires, l'ignorance de certaines espèces, des dispositifs peu attractifs voire inadaptés pour les animaux ou encore l'impact de la pollution lumineuse.
Un rapport sur les effets des nuisances sonores publié cette année par l'Inrae montre par ailleurs que la mise au sol de la ligne 18 risque de dégrader "la fonctionnalité des habitats potentiels et des déplacements de l'espèce".
"Faites votre métro mais faites-le d'une façon qui préserve la biodiversité", plaide Caroline Doucerain, maire des Loges-en-Josas (Yvelines) et présidente de Terre et Cité, une association rassemblant les collectivités et les agriculteurs du plateau.
Si elle considère la ligne 18 "nécessaire" pour desservir le pôle scientifique et technologique en plein développement sur le plateau, Mme Doucerain constate que l'urbanisation du territoire perturbe déjà la biodiversité pourtant "essentielle au bon fonctionnement de l'agriculture".
Son association, M. Chiron et ses confrères scientifiques recommandent une mise en tranchée partielle du tronçon prévu au sol, une proposition pour l'heure rejetée par la SGP.
Celle-ci affirme qu'une telle opération impliquerait un recours important au béton, l'installation de pompes garantissant l'écoulement hydraulique au niveau des voies, et exigerait un investissement financier supplémentaire.
Le projet de la ligne 18 "est tellement avancé et la SGP se cache derrière le calendrier pour ne pas prendre en compte ce qui a été proposé", regrette M. Chiron, résigné.