L'agrivoltaïsme consiste à produire de l'électricité à partir de panneaux photovoltaïques implantés sur des pâtures, des vergers, des terres de maraîchage ou d'autres cultures.
Ces installations, répandues au Japon ou en Corée du Sud, suscitent un engouement croissant dans le monde mais des réticences du monde agricole qui redoute ses conséquences sur les prix du foncier et pour la productivité des exploitations.
Ses partisans assurent au contraire que c'est une activité à la fois commerciale (portée par des industriels comme EDF Renouvelables, Engie Green, TSE, Valeco, Valorem, Solar Cloth, Urbasolar, Technique Solaire, etc.) et en faveur des cultures. Les panneaux protègent notamment du gel la nuit et de la chaleur l'été, selon eux.
"Le décret va être la pierre angulaire de la filière", souligne l'association professionnelle France Agrivoltaïsme qui veut limiter à "40% maximum" l'emprise au sol des futures installations mais dit se heurter aux tenants d'une densité moins importante en panneaux ainsi qu'aux partisans d'une emprise plus importante pour favoriser la vente d'électricité.
L'association s'inquiète des mois qui passent sans que le gouvernement ait tranché. "On comprend que le ministère de la Transition énergétique ait besoin de réfléchir, et en même temps, on ne peut pas laisser prospérer un vide juridique", indique à l'AFP l'association.
En octobre déjà, elle s'alarmait que cette période de transition ne soit utilisée pour des projets ne répondant pas à l'esprit de la loi et qui nuiraient à l'image de la filière.
"Le décret va structurer le marché", estime-t-on également chez EDF Renouvelables, qui comte environ 70 projets dans ses cartons, notamment en Haute-Vienne avec des éleveurs ovins pour 82 mégawatts de puissance.
"Garder une marge de manœuvre
Assez technique, le décret doit aussi fixer une limite, encore en discussions, à la perte de rendement provoquée par l'installation de panneaux photovoltaïques sur une exploitation.
Pour l'instant, EDF a seulement développé trois démonstrateurs en Gironde dans les vignes, près de Fontainebleau (Seine-et-Marne) au milieu de luzerne et à Beaucaire (Gard) où la tolérance du riz et de la luzerne à l'ombrage est analysée, tout comme la circulation des moissonneuses-batteuses.
Sur le décret, "on pense qu'il faut garder une marge de manœuvre pour avoir des projets de toutes tailles et ne pas trop contraindre le développement de cette filière", indique à l'AFP EDF Renouvelables, pour qui "40% ça paraît bien".
Dans le monde agricole, la question divise. La FNSEA s'oppose "fermement" à un plafonnement à 25% du taux de couverture des panneaux, selon un communiqué tandis que le syndicat des Jeunes Agriculteurs estime avoir été entendu après qu'une version du décret incluant cette limite de 25%, assortie de possibles dérogations, a été dévoilée par le site d'information Contexte.
Le président des Chambres d'agriculture, Sébastien Windsor, a lui plaidé jeudi pour un développement "raisonné et encadré", et une montée en puissance progressive des installations agrivoltaïques afin d'éviter qu'une poignée de projets de grande ampleur ne suscite une levée de boucliers.
Les Chambres d'agriculture insistent aussi sur le partage équilibré de la valeur créée entre l'énergéticien, le propriétaire de la surface agricole et son locataire.
"Le texte mis en ligne par Contexte n'est pas la version finale (...) Les discussions se poursuivent", a indiqué pour sa part le syndicat des énergies renouvelables (SER) à l'AFP.
Le décret va faire l'objet de consultations "dans les prochains jours", a précisé à l'AFP le ministère de la Transition énergétique qui vise une parution en janvier.