Avec 60.000 annonces actives dans la capitale française sur le site du géant californien --soit un tiers de plus qu'il y a un an, selon l'Observatoire des meublés de tourisme de la ville-- et une hausse moyenne de 85% des prix en Ile-de-France, d'après Airbnb, l'effet JO est minutieusement scruté par les élus parisiens.
Selon le site d'analyse de données AirDNA, le tarif moyen des annonces pendant les JO s'élève à 632 euros, pour un tarif moyen réservé de 301 euros.
Sur le terrain, l'effet d'aubaine pour les propriétaires ne fait guère de doute, dans une ville où il est déjà difficile de décrocher un logement en location.
"On a beaucoup plus de signalements de congés pour vente ou reprise frauduleux que d'habitude. Certains bailleurs disent même à leur locataire +c'est les JO, tu t'en vas et je te reprends après+", assure Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du DAL (Droit au Logement).
"Depuis septembre, on a 28% de congés donnés au locataire qui ne sont pas réglementaires, contre 23% l'an dernier", confirme Pierre-Louis Monteiro, chargé de mission à l'Agence départementale d'information sur le logement (Adil) de Paris.
A l'approche de la fin de la trêve hivernale, le sénateur de Paris Ian Brossat (PCF) a appelé à "une trêve olympique sur les expulsions locatives", estimant que "la période des JO peut susciter de mauvaises vocations chez les propriétaires qui veulent faire du profit".
Pour prévenir les dérives, la Ville a ouvert mi-janvier une ligne téléphonique (01.42.79.50.40) permettant aux agents de l'Adil de délivrer gratuitement des conseils juridiques.
25.000 annonces illégales
La Ville a également embauché cinq personnes pour renforcer le bataillon des 30 agents du Bureau de la protection des locaux d'habitation (BPLH), davantage sur le terrain et qui peuvent transmettre les dossiers à la justice.
Ce sont eux qui contrôlent la légalité des annonces en ligne en vérifiant si les photos correspondent à des appartements loués occasionnellement ou à des chambres d'hôtel, s'ils sont bien enregistrés et si les loueurs respectent la limite des 120 jours annuels de location pour une résidence principale.
"On fait du porte-à-porte et on se renseigne auprès des voisins sur la présence de meublés", explique à l'AFP Barbara Gomes, conseillère de Paris chargée des plateformes locatives (PCF), en rappelant que la mairie "n'a rien contre les Airbnb légaux".
"Vous partez en vacances et vous voulez mettre du beurre dans les épinards, on n'a absolument rien contre. Ce ne sont pas des logements qui vont disparaître du marché, contrairement aux meublés à l'année", ajoute-t-elle.
L'an dernier, une amende de 50.000 euros avec astreinte de 1.000 euros par jour a été prononcée contre deux loueurs qui n'avaient pas demandé l'autorisation pour passer leur logement en meublé touristique, considéré comme une activité commerciale.
Ailleurs en France, les villes hôtes des JO affichent leur sérénité, y compris à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), centre névralgique des Jeux, dont le maire Mathieu Hanotin (PS) voit dans Airbnb "un très bon produit complémentaire en raison du manque d'offre hôtelière" et un complément de revenus "intéressant" pour les habitants.
Lille a toutefois redonné un tour de vis en obligeant, à partir du 1er avril, à compenser chaque mètre carré transformé en meublé touristique en mètre carré de logement.
Les collectivités attendent aussi beaucoup d'une proposition de loi des députés Annaïg Le Meur (Renaissance) et Iñaki Echaniz (PS) pour réguler les meublés de tourisme. "Cette loi transpartisane va nous permettre de sanctionner davantage les 25.000 Airbnb illégaux estimés à Paris", reconnaît Jacques Baudrier, adjoint au Logement à Paris (PCF).
"Tout un tas de verrous vont sauter. On va pouvoir intenter beaucoup plus de procès et tous les gagner", prévient-il, même s'il rappelle qu'à Paris, le principal problème reste les "270.000 logements vacants et résidences secondaires".
"Il y a 8.000 résidences principales qui deviennent chaque année des résidences secondaires ou des logements vacants, et cela n'a rien à voir avec les JO ni Airbnb", résume-t-il.