Après l'échec des négociations fin février, l'Etat a repris la main sur le dossier de l'assurance chômage. L'exécutif a prévu des annonces "au printemps", en vue d'un décret pour "l'été 2019".
Depuis la semaine dernière, Muriel Pénicaud consulte donc les responsables des organisations patronales et syndicales. Dernier à passer rue de Grenelle: Philippe Martinez, numéro un de la CGT, qui sera reçu lundi en fin d'après-midi.
L'heure est donc pour l'instant à la consultation et à l'écoute, les pistes viendront plus tard. Au gouvernement, "ils ne sont pas si sereins à cause du contexte social mais ils sont déterminés", affirme un dirigeant syndical.
"Tout ce qui était sur la table est toujours sur la table", explique de son côté à l'AFP Alain Griset, président de l'U2P (Union des entreprises de proximité).
En septembre dernier, le gouvernement avait demandé aux partenaires sociaux de trouver entre 3 et 3,9 milliards d'euros d'économies sur trois ans et de réfléchir à un dispositif pour lutter contre les contrats courts.
C'est sur ce sujet du bonus-malus que les négociations ont achoppé, un sujet récurrent sur lequel s'écharpent patronat et syndicats depuis maintenant des années, et ce alors que les CDD de moins d'un mois ont été multipliés par 2,5 depuis 20 ans.
L'U2P a à nouveau proposé à la ministre la dernière proposition portée aussi par le Medef et la CPME, rejetée unanimement par les syndicats.
"Nous avons préféré faire des propositions pour accompagner les salariés plutôt que de punir les entreprises", avait expliqué Geoffroy Roux de Bézieux, patron du Medef.
"Polémique" et "caricatural"
Le bonus-malus, mesure de modulation des cotisations chômage des entreprises en fonction de leur recours aux CDD, est une promesse de campagne d'Emmanuel Macron, qu'il a réaffirmée au cours du grand débat.
"Personne ne nous a proposé à ce stade une meilleure solution", a déclaré le Premier ministre, Edouard Philippe. La question n'est pas tranchée.
Du côté des économies, il y a aussi des arbitrages à faire.
L'exécutif n'a pas caché qu'il s'intéressait de près à l'indemnisation des cadres, qu'il juge généreuse par rapport "à ce qui se passe chez nos voisins". Plus que la dégressivité, c'est le plafond de l'allocation, actuellement un maximum de 7.700 euros, qui pourrait être revu.
L'idée fait toujours bondir François Hommeril (CFE-CGC), qui juge une telle mesure "populiste" depuis qu'elle est revenue dans le débat public en septembre dernier.
Les cadres apportent "15 milliards d'euros au régime et 5 milliards d'euros vont en allocation pour les mêmes publics", explique-t-il encore lundi.
Autre sujet à trancher: la base de calcul de l'allocation, un sujet complexe et technique en apparence mais qui pourrait avoir des répercussions sonnantes et trébuchantes si le gouvernement décidait de toucher au "salaire journalier de référence" (SJR) utilisé dans la formule de calcul.
La ministre du Travail a en effet expliqué qu'il existait des cas où l'allocation mensuelle est supérieure au salaire mensuel perçu, avançant le chiffre d'"un demandeur d'emploi sur cinq".
Ce chiffre, calculé sur la base des fichiers des allocataires de Pôle emploi, a déjà suscité des protestations. Ainsi, Laurent Berger, numéro un de la CFDT, ne s'est pas privé de dire à la ministre qu'il était "polémique" et "caricatural".
"Alors que la plupart des chômeurs ne choisissent pas quand ils travaillent, vous généralisez certaines situations et cela vous permet de dire que les chômeurs profitent du système", s'est insurgé Laurent Berger.
Pour la CGT, c'est simple, "le gouvernement s'apprête à mettre en oeuvre toutes les mauvaises idées du patronat desquelles les syndicats ont refusé de discuter pendant les négociations".