"Prenant acte de certaines difficultés opérationnelles rencontrées par les banques", le Haut conseil de stabilité financière (HCSF), qui rassemble les deux instances, "a décidé d'introduire deux ajustements techniques", indique un communiqué publié au sortir de sa réunion trimestrielle.
Ces conclusions étaient très attendues par les professionnels de la banque et de l'immobilier, au moment où le marché du crédit souffre d'une remontée des taux.
Les grands principes en vigueur depuis le 1er janvier 2022 - un plafond du taux d'effort, c'est-à-dire le montant total des dépenses liées à l'habitation rapporté aux revenus, fixé à 35%, et une durée maximale limitée à 25 ans - n'ont pas été touchés.
C'est en revanche la marge de dérogation à ces principes, accordée aux banques pour 20% des crédits, qui connaît une évolution. A l'intérieur de cette enveloppe, la part des crédits libres d'affection à tout type de crédits immobiliers, dont les investissements locatifs, va augmenter de 20% à 30%.
"L'objectif est de pouvoir maintenir la distribution en volume notamment des crédits qui ne sont pas affectés à la résidence principale", précise Bercy, en faveur "par exemple de l'investissement locatif".
Mensualisation du taux d'usure
Cette marge de manoeuvre supplémentaire vis-à-vis des investisseurs locatifs était souhaitée par les banquiers, qui n'ont pas manqué de le faire savoir ces derniers jours.
"Ceci va dans le sens d'un assouplissement", a réagi mardi la Fédération bancaire française (FBF) auprès de l'AFP. La profession souhaitait que le HCSF aille plus loin, en permettant l'utilisation libre de l'ensemble de la fameuse poche de dérogation.
Selon les estimations du Trésor, cette mesure ainsi qu'une autre plus technique encore, permettant de mieux tenir compte de la saisonnalité des prêts immobiliers, pourraient se traduire par une augmentation de la capacité d'accès au crédit de 250 millions d'euros par mois, à mettre en regard des quelque 15 milliards d'euros de production mensuelle actuellement.
"Dans le crédit immobilier, c'est toujours facile au début de faire des crédits très risqués, mais ça se termine toujours mal, non seulement pour les emprunteurs mais en général pour le secteur et l'ensemble de l'économie", mettait en garde vendredi dernier le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau au micro de Radio Classique.
Bercy est par ailleurs revenu sur le taux d'usure, un taux de crédit plafond destiné à protéger l'emprunteur. Comme annoncé par le gouvernement en début de mois, la mensualisation de la révision de ce taux, auparavant actualisé chaque trimestre, est bien actée jusqu'à la fin de l'année.
Bataille de chiffres
Avoir une idée fidèle de l'état de santé du marché immobilier est une tâche ardue, tant le vocabulaire et les chiffres mis en avant par courtiers, banquiers ou régulateur varient.
Premier élément factuel, les taux de crédit ont fortement augmenté ces derniers mois, passant de 1,12% en janvier 2022 à 2,87% attendus en mai 2023, selon la dernière estimation de la Banque de France, ce qui a une incidence considérable sur le coût du crédit.
Deuxième élément sujet à controverse: le volume de crédits accordés. En chute libre pour les banquiers, mais en phase de normalisation après des années exceptionnelles, répète la Banque de France.
Troisième paramètre et non des moindres: le prix des biens immobiliers, qui commence à descendre dans l'ancien pour la première fois depuis 2015, selon l'indice Notaires-Insee qui fait référence.
"Les courtiers en crédit immobilier sont en train de dire +il faut desserrer les exigences sur le niveau d'endettement des français+. N'importe quoi. Il faut que les prix s'ajustent à la baisse et le marché repartira", rétorquait fin avril le président du courtier April Eric Maumy, en marge de la présentation des résultats 2022 de son entreprise.