Certivéa, qui accompagne depuis 15 ans les professionnels du bâtiment, de l’aménagement et les décideurs territoriaux sur les enjeux du développement durable, a interrogé 14 personnalités pour dresser avec eux un état des lieux et proposer des préconisations pour engager le bâtiment et les territoires dans la lutte contre l’urgence climatique.
Députés, dirigeants et responsables RSE du secteur du bâtiment et de l’aménagement livrent leur vision et leurs solutions
En ce début d’année 2021, plusieurs acteurs reconnus pour leur expertise et leur engagement au nom de la ville durable ont répondu à l’appel de Certivéa. Parmi eux, des responsables politiques comme la députée et présidente de l’Alliance HQE-GBC Marjolaine Meynier-Millefert, des présidents d’institutions comme Corinne Le Quéré, Présidente du Haut Conseil pour le Climat et climatologue ou Arnaud Leroy, président de l’ADEME ; des dirigeants et responsables RSE d’entreprises du bâtiment et de l'aménagement comme Fabrice Bonnifet, Directeur Développement Durable de Bouygues et Président de C3D ; ou encore des architectes comme Denis Valode. (la liste exhaustive des 14 personnalités est précisée dans la synthèse complète).
Un état des lieux à 360° à l’échelle du bâtiment neuf, du parc existant et des territoires
Bâtiment neuf : les pratiques vertueuses doivent se démocratiser et la gestion des déchets reste problématique
La mesure des émissions de gaz à effet de serre, le pilotage des consommations énergétiques se développent et l’implication des entreprises est bien réelle. Pour Pierre Ducret, Président de l’Institut de l’Économie pour le Climat : « les grandes entreprises multiplient les engagements [liés à l’urgence climatique] et innovent pour saisir les opportunités de marché et limiter leurs risques ». Les grandes sociétés de gestion immobilières, qui utilisent désormais des critères de performance ESG (Environnement Sociétal Gouvernance) pour valoriser leurs actifs immobiliers font aussi bouger les marges.
Pour autant, les cahiers des charges des donneurs d’ordre manquent encore d’ambition. Pour Fabrice Bonnifet, « il est inadmissible que le secteur de la construction continue encore des années à produire plus de 220 millions de tonnes par an de déchets ».
Parc existant : la priorité face à l’urgence climatique, pourtant des freins systémiques empêchent encore la massification de la rénovation
Le parc existant constitue l’essentiel de l’empreinte carbone et énergétique du secteur. On estime qu’en 2050, 70% des bâtiments existants dateront d’avant la règlementation RT 2012. La massification de la rénovation bénéficie d’un soutien politique inédit avec le plan France Relance et d’un appui règlementaire ambitieux avec le décret tertiaire. Pourtant, la révolution n’a pas encore lieu. Si l’on tarde trop, en plus de l’enjeu climatique, les investissements nécessaires pour rénover un parc de plus en plus dégradé pourraient devenir vertigineux.
Afin de massifier la rénovation, il faut lever des freins systémiques évoqués par Julien Hans, Directeur Energie-Environnement au CSTB Grenoble : « Nous constatons aujourd’hui : une forte non-qualité des travaux, qui s’ajoute à de longs retours sur investissement, peu de recherche et développement dans le secteur (< à 1 % du chiffre d'affaires de la construction), et enfin une offre de service faible et une main d’œuvre encore mal formée au regard des besoins de massification. »
Les territoires : acteurs essentiels pour déployer des stratégies durables mais une gouvernance pas assez transversale
Selon Marjolaine Meynier-Millefert, « les collectivités locales sont naturellement les mieux placées pour ajuster aux réalités du terrain les ambitions en matière de lutte contre le changement climatique, qui, sans elles, restent souvent théoriques ». Cependant, la transformation des territoires se heurte aujourd’hui à des schémas en silo : chaque action dépasse difficilement les limites d’une collectivité ou d’un domaine d’intervention. La gouvernance devrait plus impliquer les différents acteurs des territoires, des secteurs public et privé, sans oublier les habitants, les scientifiques et les acteurs économiques.
Des préconisations à toutes les étapes de vie du bâtiment et au niveau des territoires
Neuf : dépasser l’approche énergétique pour appréhender l’impact carbone et le confort des occupants
La nouvelle règlementation RE2020 est, selon les personnalités interrogées, l’occasion d’impulser un changement de paradigme dans la construction : dépasser l’enjeu de performance énergétique pour appréhender l’impact carbone et le confort d’été des occupants.
Cela implique notamment une réflexion sur les matériaux, comme le rappelle Denis Valode, architecte : « le sujet principal est désormais l’énergie grise[1] qui concerne le choix des matériaux et des conditions d’élaboration du bâti. (…). Une seule règle : le bon matériau au bon endroit. »
Parc existant : outre la massification de la rénovation, il faut une révolution des usages
Les acteurs interrogés appuient unanimement l’idée d’adosser de manière plus systématique les éco conditionnalités à l’allocation de subventions publiques avec comme condition primordiale le recours à des énergies bas carbone.
De nombreux acteurs rappellent la nécessité d’innover en matière d’usage, de réversibilité, de recyclage, de densification, de végétalisation, etc.
Christian Brodhag, Président de Construction 21, estime enfin que : « La crise de la Covid et les pratiques de travail à distance vont conduire les entreprises tertiaires à reconsidérer leur organisation, leur patrimoine et leur usage du numérique. Une écoconception de ces solutions est nécessaire, avec notamment la rénovation profonde. »
Territoires : le développement durable doit infuser les stratégies territoriales
Le développement durable et l’urgence climatique doivent devenir des composantes essentielles de tous projets d’aménagement des territoires. On pense à l’évaluation de l’impact carbone des budgets publics ou à la formalisation d’objectifs de rénovation énergétique. Outre les aides et des dispositifs d’accompagnement des outils pertinents existent comme les boussoles stratégiques, les méthodes de planification, etc. La sobriété des politiques publiques, la préservation de la biodiversité, la lutte contre l’artificialisation des sols sont également évoqués.
Pour Dominique Riquier-Sauvage, architecte et membre du Conseil Économique, Social et Environnemental : « Nous devons, en matière d’aménagement, prendre des mesures visant notamment à limiter l’artificialisation des sols pour préserver notre biodiversité, qui joue un rôle de régulateur au niveau du climat et du stockage du carbone. »
Un accompagnement indispensable des acteurs pour l’atteinte des objectifs
Toutes les personnes interviewées ont par ailleurs souligné l’importance de l’innovation collective mais aussi d’un accompagnement, aussi bien financier que méthodologique, pour la montée en compétence des acteurs. Sont attendus notamment : outils, guides, conseils, bonnes pratiques et avis d’experts permettant de définir une bonne stratégie.
La certification au service des acteurs pour accélérer la transition environnementale
Face à l’urgence climatique, les certifications et labels en développement durable de Certivéa font partie des outils permettant de faire progresser les acteurs publics et privés. Ils permettent de structurer leur feuille de route, de valoriser leurs engagements et de se différencier en anticipant au mieux les évolutions réglementaires. Les certifications qui prennent spécifiquement en compte les enjeux du changement climatique sont NF HQE bâtiments tertiaires, HQE Bâtiment Durable (thème adaptation au changement climatique, Calcul E+C- préfigurant la RE 2020, LEVELS), le Label E+C- préfigurant la RE 2020, les Labels Effinergie et enfin le Label BBCA, sans parler du Label R2S-4GRIDS et le Label Biodiversity.