Sauvés de l'artificialisation par Emmanuel Macron qui a abandonné le méga-complexe commercial et de loisirs Europacity en novembre 2019, le sort des 280 hectares de terres agricoles situées à une quinzaine de kilomètres de Paris reste encore incertain.
"Le président de la République a eu le courage politique d'abandonner Europacity, maintenant il faut aller au bout et faire un projet du XXIe siècle", s'impatiente Bernard Loup, président du Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG), au milieu d'un lopin boueux tout près de l'autoroute A1 survolé par quelques avions.
Pour l'heure, il est prévu que cette zone soit interdite à l'habitat car coincée entre les aéroports Paris-Charles de Gaulle et du Bourget, accueille une gare de la ligne 17 du métro du Grand Paris Express d'ici 2027, et une ZAC avec bureaux.
"La région parisienne ce sont des terres de maraîchage parmi les plus riches du monde, c'est dommage de faire une énième construction... Peut-être qu'on peut la faire un peu plus loin ?", s'interroge Guillaume Moucheroud, venu en "simple citoyen" et en famille depuis Vanves (Hauts-de-Seine) pour participer dimanche à une action de mobilisation .
De son côté le CPTG soutient le projet agricole de l'association Carma qui comprendrait notamment l'installation d'activités maraîchères et horticoles, dans une dynamique de circuits courts.
"Il faut protéger ces terres qui peuvent devenir une vitrine aux portes de Paris et le monde de la transition écologique est prêt à s'y investir", martèle Alice Leroy, secrétaire générale de CARMA.
Parmi les quelque 500 manifestants dimanche, plusieurs élus écologistes et de gauche ont pris la parole, à l'image d'Eric Piolle le maire (EELV) de Grenoble ou la députée insoumise de la Seine-Saint-Denis - candidate aux régionales - Clémentine Autain.
"On a gagné sur Europacity, il faut absolument que la mobilisation reste" pour "laisser les terres à l'agriculture", estime l'eurodéputé et probable candidat à la primaire EELV de septembre Yannick Jadot, selon lequel "le projet d'Emmanuel Macron sur l'artificialisation des terres, c'est de la "guignolade."
Unique gare de métro
Sur le volet judiciaire pourtant, les défenseurs du projet Carma viennent d'essuyer plusieurs revers.
La justice administrative a définitivement validé en juillet la création d'une ZAC et a retoqué en appel, en décembre, un recours déposé contre le plan local d'urbanisme de Gonesse ouvrant la voie à l'aménagement du site. Une troisième procédure est également en cours devant la Cour administrative d'appel de Paris.
Attachés à la création d'une gare du métro, qui serait la seule du Val-d'Oise, des élus du département et de la Seine-Saint-Denis - soutenus par la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse - insistent sur la nécessaire amélioration de l'offre de transports en commun dans l'est du Val-d'Oise, touché par la pauvreté.
"Une centaine de militants politisés représentant une minorité ne peuvent pas continuer de prendre en otage l'avenir et les nombreuses opportunités d'emplois de centaines de milliers de Valdoisiens à l'est du département", a réagi dimanche Marie-Christine Cavecchi, présidente (LR) du conseil départemental.
"Si vous construisez la gare, dans quelques années il n'y a plus de terres agricoles", craint pourtant le député du Val-d'Oise (Les nouveaux démocrates) Aurélien Taché.
Dans un rapport daté de décembre et adressé au Premier ministre, dont l'AFP a eu connaissance dimanche, le préfet du Val-d'Oise estime que le chantier de la gare doit être "conforté" et se montre favorable à l'aménagement d'une ZAC de 110 hectares pour accueillir des équipements publics et des projets allant de l'industrie à "l'agriculture urbaine".
"La localisation du Triangle de Gonesse fait de cette ZAC le lieu adéquat pour conduire une opération d'aménagement ambitieuse", écrit le préfet Amaury de Saint-Quentin.
Ses propositions s'inscrivent dans le futur "plan pour le Val-d'Oise" annoncé par Jean Castex en novembre, notamment avec l'objectif de renforcer les services publics et qui doit être dévoilé prochainement.