"C'est la toute première fois qu'elle est déménagée ailleurs", excepté ses escapades estivales habituelles, explique cet Américain originaire de Boston, propriétaire de la péniche depuis 45 ans.
L'Adriana est la dernière des 24 péniches amarrées entre le Trocadéro et le pont de Bir-Hakeim à être déplacée temporairement à Boulogne-Billancourt et Saint-Cloud, à l'ouest de la capitale.
Toutes seront réinstallées à leur emplacement initial au lendemain de la cérémonie d'ouverture du 26 juillet.
"Vivre la Seine à fond"
"Ce n'est que 10 jours, ce n'est pas grave", tempère le pénichard, téléphone en main pour capturer ce moment inédit.
La Seine accueillera le 26 juillet les délégations sportives et les caméras du monde entier lors d'une cérémonie sur l'eau qui débutera au pont d'Austerlitz à 19H30, dans l'est de Paris, et s'achèvera devant le Trocadéro et sa tribune officielle.
C'est la première fois dans l'histoire des Jeux Olympiques d'été que la cérémonie d'ouverture est organisée hors d'un stade.
"Ca va être un évènement incroyable, ça fait vraiment vivre la Seine à fond", se réjouit Christophe Tetard qui vit sur le fleuve depuis 2019.
Sa péniche, Saint-Antoine, a largué les amarres quelques minutes avant l'Adriana, déplacée elle aussi par un bateau pousseur.
"La vie sur l'eau c'est une vie d'aventures, donc c'est une aventure de plus", sourit ce maçon de 35 ans qui a rénové la péniche pendant deux ans avant de s'y installer en avril.
Il connaît déjà sa future adresse provisoire, à Boulogne-Billancourt, et même ses futurs voisins qu'il a pu rencontrer à l'occasion d'une fête organisée par le Comité d'Organisation des Jeux Olympiques et Haropa Port. "Une belle initiative", salue-t-il.
"C'est important de savoir si les bateaux vont bien se marier les uns avec les autres, déjà d'un point de vue technique, mais aussi d'un point de vue humain", explique ce passionné d'architecture et de vieux bateaux.
Mis au courant "depuis presque deux ans" de son déménagement, il loue l'accompagnement "bienveillant" des organisateurs.
"On est très content de mettre notre petite pièce dans la machine pour que les JO se passent bien", explique Christophe Tetard.
Au total, 10.500 athlètes déambuleront le 26 juillet devant plus de 300.000 spectateurs, le tout placé sous un dispositif de sécurité exceptionnel.
"Beaucoup de confusion"
Toutes les péniches ne sont pas contraintes de lever l'ancre: si les bateaux-restaurants seront fermés le jour de la cérémonie, ils pourront recevoir pendant toute la période des clients munis d'un "Pass Jeux", délivré avec leur réservation.
"Il y a quand même un manque d'informations", déplore cependant Clément Leclair, directeur adjoint de la péniche-restaurant Francette, en contrebas de la tour Eiffel.
Charles Webster Downer, lui, sera relogé - le choix a été laissé à chacun - dans un hôtel de Beaugrenelle.
"Je reste dans le même quartier, je peux continuer à aller faire mes courses aux mêmes endroits", se réjouit-il.
Mais une heure plus tard, à Saint-Cloud, les mines sont moins réjouies. Le propriétaire d'Adriana, venu en voiture, ne voit pas sa péniche, masquée par un bateau déjà amarré à l'adresse qui lui a été donnée. Charles voudrait encore récupérer des affaires à bord, mais pour ça, obligé de passer sur la péniche des propriétaires du lieu... qui ne sont pas là.
Avec lui, son voisin de quai Bob Powell, propriétaire depuis 47 ans du Simpatico, n'a toujours pas retrouvé son bateau, déménagé la veille.
"Je vois beaucoup de confusion", soupire-t-il après avoir appris que son bateau pourrait peut-être retourner au quai de Grenelle, près de son emplacement d'origine.
"Ca s'appelle l'aventure !", plaisante son voisin.