Objectif : l'électrification massive des usages pour sortir des énergies fossiles et se conformer au programme européen "Fit for 55" qui renforce les objectifs de réduction des émissions de CO2 des pays européens: -55% en 2030 par rapport à 1990, au lieu de -40% précédemment.
A horizon 2035, RTE table dans cette optique sur une consommation annuelle d'électricité comprise entre 580 et 640 TWh, avec une production comprise entre 640 et 700 TWh, dans le scénario le plus favorable, dit "A". En 2022, les Français ont consommé 460 TWh d'électricité.
Dans un premier temps, en attendant l'arrivée des nouveaux réacteurs après 2035, RTE table sur la sobriété et une accélération du déploiement des énergies renouvelables: d'ici 2035 il faut "viser au minimum une production d'électricité renouvelable annuelle de 270 TWh (contre environ 120 TWh aujourd'hui) et si possible de 320 TWh", estime RTE.
Concernant le nucléaire, RTE table, dans une hypothèse prudente, sur une production moyenne annuelle de 360 TWh d'ici 2035, en maximisant le parc actuel de réacteurs. Après un hiver 2022/2023 à haut risque et une année noire marquée par une production électrique historiquement basse, notamment en raison d'un parc nucléaire fortement indisponible, RTE table dès cet hiver sur une amélioration de la sécurité d'approvisionnement.
Mais, avertit RTE, "il semble désormais probable que la transition va se déployer dans un climat macroéconomique et géopolitique plus complexe que celui des années 2000 et 2010: taux d'intérêt élevés, croissance faible, capacités de financement public sous tension, relations internationales dégradées", énumère-t-il comme autant d'obstacles.
Alors que le gouvernement planche sur la stratégie française pour l'énergie et le climat (SFEC), cette nouvelle donne a poussé RTE à plancher sur des scénarios moins favorables que le "A", qui permet lui d'être au rendez-vous de 2030 et de remplir les objectifs d'électrification et de réindustrialisation de la France, a expliqué à l'AFP Xavier Piechaczyk, président du directoire de RTE.
Ainsi, un scénario "B", dans lequel la France est en retard "pour des raisons qui lui sont propres" et enfin, un scénario "C", dit de "mondialisation contrariée", où il y a "d'autres retards, qui sont liés au monde extérieur", a-t-il détaillé.
Flexibilité de la demande
Ce scénario C se traduirait à court terme par "une consommation d'électricité plus faible", "un renchérissement du coût des équipements de la transition énergétique (+15 à 20% pour les investissements photovoltaïques au sol par exemple)", et une "augmentation des coûts de financements avec des conséquences majeures sur l'économie de la transition énergétique", selon le rapport.
Dans ce scénario difficile, "en combinant hausse des coûts d'investissement et du coût du capital, le coût complet des énergies renouvelables est supérieur de 30 à 60%, voire jusqu'à 100% pour des filières en tension comme l'éolien en mer".
"En revanche, sur le long terme, il y a plusieurs façons de sortir" de ce scénario, a rassuré Thomas Veyrenc, directeur exécutif du pôle stratégie, prospective et évaluation de RTE.
Plusieurs leviers sont mis en avant par RTE, au premier rang desquels "relocaliser une partie de la chaîne de valeur des équipements de la transition énergétique pour sécuriser les approvisionnements", quitte à assumer des coûts d'investissement plus importants.
Dans tous les scénarios, l'augmentation rapide de la consommation d'électricité représente un défi pour la souveraineté énergétique de la France, notamment à la saison froide, quand plus de Français se chaufferont à l'électrique: "le niveau des pointes de consommation hivernales va augmenter".
D'où la nécessité de mettre en place un véritable "plan" en trois volets pour développer la flexibilité de la demande", selon M. Veyrenc, qui le résume ainsi : "déployer des équipements" (boîtiers, domotique, bornes connectées, installations connectées dans les bâtiments), des "incitations tarifaires" et "pouvoir contrôler son effet sur le système".