"C'est un plan très technique, en profondeur, pour faire changer les choses, avec un seul objectif: montrer qu'on a changé pour donner confiance dans le fait qu'on peut nous donner, si le politique le veut, une nouvelle commande de nouvelles centrales et qu'on les délivrera dans le respect de la qualité, des coûts et des délais", a-t-il dit dans un entretien à l'AFP.
Cet ancien du secteur automobile avait été nommé en février comme "délégué général à la qualité industrielle et aux compétences" - un poste nouvellement créé - afin de mettre en oeuvre le plan "excell" d'EDF, qui doit s'appliquer à toute la filière française.
Ce plan est censé tirer les leçons des déboires de l'EPR de Flamanville, dont les coûts auront été multipliés par 3,3 (à 12,4 milliards d'euros selon EDF) et les délais par au moins 3,5. L'ex-patron de PSA Jean-Martin Folz avait qualifié le chantier d'"échec pour EDF" dans un rapport d'audit remis au gouvernement.
M. Tranzer présente jeudi 25 engagements sur 5 thématiques: amélioration de la gouvernance des grands projets, montée en compétence de la filière, fabrication et construction garanties conformes du premier coup, meilleures relations avec les fournisseurs et enfin standardisation pour renforcer la qualité et la sûreté.
Quelques mesures sont aussi dédiées spécifiquement à un "plan soudage" - alors que les derniers retards de l'EPR de Flamanville sont justement dus à des soudures défectueuses qui doivent être reprises.
"On insiste beaucoup sur les écoles de soudures: une a déjà été lancée par Framatome à Châlons-sur-Saône, une seconde est inaugurée en ce moment à Bridgewater à côté d'Hinkley Point pour la centrale qui est en construction en Grande-Bretagne, et à Cherbourg, dans notre centre d'excellence soudage, on veut qu'il y ait une première promotion qui soit lancée à partir du mois de septembre", souligne M. Tranzer.
Nouvelles commandes
Le PDG d'EDF, Jean-Bernard Lévy, avait voulu recruter ce M. "excellence nucléaire" en dehors du secteur afin de s'inspirer de ce qui fonctionne ailleurs.
"On s'est appuyés sur le benchmark des meilleures pratiques des autres industries: Naval Group, Airbus - qui a tiré tout le retour d'expérience de l'A380 pour faire l'A350, et bien sûr PSA", indique M. Tranzer, ainsi qu'Alstom.
Il s'est inspiré de ces entreprises pour améliorer la gestion des grands projets mais aussi la standardisation - un concept clef dans l'industrie automobile.
Par exemple, EDF peut recourir aujourd'hui à plus de 13.000 types de robinets différents pour ses centrales. "Notre ambition c'est de retenir au sein du catalogue de l'ordre de 300 robinets seulement", explique Alain Tranzer.
"Excell" va aussi bénéficier du plan de relance, qui prévoit une enveloppe de 470 millions d'euros pour le nucléaire. Cet argent va notamment permettre de "soutenir le tissu industriel", avec un fonds d'investissement dédié aux PME, et "les compétences".
Cette phase de mise en oeuvre du plan d'excellence industrielle doit aller jusqu'à la mi-2021. Une échéance qui ne doit rien au hasard, puisque c'est le moment où le gouvernement attend d'EDF la remise de son offre pour l'éventuelle construction de nouveaux EPR améliorés, plus simples et moins chers (EPR2). La décision de lancer ou non de nouveaux chantiers nucléaires attendra toutefois le prochain quinquennat.
"On veut donner confiance mi-2021 parce que c'est à cette date qu'on a prévu de remettre l'offre des EPR2 à l'Etat français", affirme M. Tranzer.
Le but est plus largement "d'obtenir des nouvelles commandes pour des nouvelles centrales en France, en Grande-Bretagne, à l'export....", selon lui.
EDF espère notamment de nouvelles commandes en Angleterre pour le site de Sizewell mais aussi en Inde notamment.
Mais le plan doit aussi servir au chantier de construction des EPR anglais déjà engagé à Hinkley Point C ou au "grand carénage", le programme de grands travaux pour poursuivre la vie du parc existant.