Quelles sont les mesures de prévention ?
Si l'intégralité de la France est concernée par un risque d'inondations, même mineur, quinze départements du sud sont particulièrement exposés aux crues brutales à cause des épisodes méditerranéens, ces systèmes orageux capables de déverser des mois de pluies en quelques heures.
Comme pour tout risque naturel, divers plans de prévention et de gestion existent, sans cesse révisés avec la récurrence des catastrophes. En 2020, la tempête Alex faisait dix morts, huit disparus, 13.000 sinistrés et environ un milliard d'euros de dégâts dans les Alpes-Maritimes.
Depuis les années 1990, des "plans de prévention du risque inondation" (PPRi) établissent la cartographie des dangers et réglementent l'occupation des sols. Annexés aux Plans locaux d'urbanisme (PLU), ils peuvent mener à des interdictions de construire ou à des restrictions, comme l'impossibilité de doter sa maison d'un sous-sol.
Ces contraintes se doublent d'initiatives des collectivités, les Programmes d'actions de prévention des inondations (PAPI), ouvrant droit à des subventions de l'État : études du risque local, entretien des cours d'eaux, construction d'ouvrages de protection...
Depuis 2011, 69 PAPI ont été labellisés dans les quinze départements concernés, soit un milliard d'euros d'actions (sur 2,6 milliards au national), dénombre la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) au ministère de la Transition écologique.
Environ un quart a servi aux délocalisations de "plus de 800 foyers (183 dans l'Aude, 383 dans le Gard et environ 250 dans les Alpes-Maritimes)", selon les chiffres du ministère.
Les outils d'alerte se sont aussi multipliés: outre les vigilances de Météo-France et des systèmes d'alertes par SMS, le service Vigicrues s'est enrichi au printemps d'une application mobile avec des notifications personnalisées.
Axe majeur de prévention, le gouvernement a relancé en août ses campagnes d'information sur les bons réflexes: "ne pas aller chercher ses enfants" ; "reporter ses déplacements", "rester dans un bâtiment" en hauteur ; "ne pas prendre sa voiture, car quelques centimètres d'eau suffisent à l'emporter", etc.
Quelles sont les pistes d'amélioration ?
"La plupart des crues sont prévisibles par Vigicrues", rappelle Sybille Muller, cheffe du bureau des risques d'inondation à la DGPR. Ce qui permet d'activer au plus tôt les Plans communaux de sauvegarde (PCS), c'est-à-dire les mesures en cas de crise, en premier lieu les plans d'évacuations.
"Mais ça ne sert à rien d'avoir un bon plan si on ne s'entraîne pas", ajoute Véronique Lehideux, cheffe du service des risques naturels et hydrauliques au ministère de la Transition écologique.
"Jusqu'ici on a beaucoup travaillé sur l'acquisition des bons réflexes, mais il faut désormais développer une culture de l'exercice", comme ceux contre les incendies organisés tous les ans et entrés dans les moeurs, souligne la haute fonctionnaire.
Adoptée fin 2021, "la loi Matras" sur la sécurité civile "a renforcé les exigences d'exercices" et les autorités comptent étendre cette "logique de crise", "déjà très développée dans les territoires ultra-marins", précise Mme Lehideux.
Les grandes lignes de ce qu'il reste à faire sont recensées dans les Plans de gestion des risques d'inondation (PGRI), déclinés sur cinq ans au niveau local.
Celui du bassin hydrologique Rhône-Méditerranée prévoit notamment pour la période 2022-2027 d'"améliorer les capacités d'écoulement", alors que l'urbanisation et l'imperméabilisation des sols n'ont cessé d'accentuer le ruissellement.
Cela va de la coupe d'arbres fragiles, susceptibles d'être emportés et de former des barrages en s'accumulant sous les ponts, à la destruction d'ouvrages ayant étroitisé les cours d'eau, en passant par les "solutions d'adaptation fondées sur la nature" (SaFN). Il s'agit par exemple de restaurer des zones humides pour étaler les crues, décompacter les sols grâce aux systèmes racinaires des arbres ou multiplier les "noues paysagères" (larges fossés en pente douce pour accueillir les eaux pluviales).
"Ces solutions sont à la mode et ont un rôle contributif pour atténuer les catastrophes naturelles", note Sybille Muller, "mais il faut être réaliste : il y a des risques climatiques qui nécessitent des constructions en durs", comme les digues et barrages redimensionnés à la hauteur du danger.