La détérioration des comportements de paiement se traduit par une nette hausse des défaillances d’entreprises, avec une accélération observée depuis le début de l’année, dépassant désormais les niveaux moyens connus avant la crise du Covid-19.
Délais de paiement, une pratique bien ancrée
Accorder des délais de paiement est une pratique bien ancrée en France : au total, 97% des entreprises en accordent à leurs clients, et ce quel que soit le secteur et la taille de l’entreprise. Le délai de paiement moyen s’élève à 48 jours, niveau nettement supérieur à ceux accordés en Allemagne (32 jours) ou en Pologne (46 jours), tout en restant nettement en-dessous de ceux enregistrés en Chine (81 jours) et dans le reste de l’Asie (66 jours).
Si la majorité des entreprises accordent des délais de paiement compris entre 31 et 60 jours dans tous les secteurs sauf le tourisme et les loisirs, où la moitié d’entre elles demandent à être payées sous 30 jours, les délais tendent à être plus courts dans les services. Les quatre secteurs accordant le plus de délais inférieurs à 30 jours appartiennent tous à la catégorie des services. A l’inverse, le secteur de la construction et les différentes branches de l’industrie accordent des délais de paiement nettement plus longs. Près de 20% des entreprises du secteur automobile offrent des délais de paiement supérieurs à 3 mois. Ainsi, si les délais de paiement moyens sont relativement homogènes selon les secteurs, ils sont nettement plus longs dans la construction, le textile/habillement et, donc, l’automobile. Ces pratiques semblent propres à ces deux derniers secteurs, qui sont également ceux affichant les délais de paiement moyens les plus longs en Allemagne.
Preuve de la généralisation de cette pratique en France, les TPE – pourtant relativement moins enclines à accorder des délais de paiement - sont tout de même 95% à le faire mais sur des délais plus courts (35% d’entre elles offrant des délais inférieurs à un mois, contre environ 10% pour les autres tailles d’entreprises.
Retards de paiement : la situation se tend, les TPE et PME fortement impactées
82% des entreprises ont subi des retards de paiement de leurs clients au cours des 12 derniers mois. Cela est plus fréquent qu’en Pologne (61% des entreprises), qu’en Allemagne (76%) et qu’en Asie (57%) où les délais accordés sont plus longs mais les retards moins courants.
La taille des entreprises est un facteur discriminant important. 70% des TPE et des PME ont constaté un allongement de ces retards, contre « seulement » 53% des ETI et des grandes entreprises. De plus, la grande majorité des TPE et des PME déclarent que les retards de paiement ont été plus fréquents qu’en 2022. En outre, 54% des TPE ont subi des retards de paiement supérieurs à un mois, 20% déclarant des retards supérieurs à deux mois. Le retard de paiement moyen atteint 42 jours pour les TPE, 38 jours pour les PME et « seulement » 26 pour les entreprises de plus grande taille. Ces résultats sont d’autant plus préoccupants que la moitié des TPE estiment que les retards de paiement ont un impact « très important » ou « critique » sur leur trésorerie.
Parmi les raisons évoquées, 27% des entreprises attribuent les retards de paiement aux difficultés financières de leurs clients, et 41% estiment que ces retards sont délibérés dans un objectif de gestion des flux de trésorerie.
Accélération des défaillances d’entreprises en France
Après s’être maintenu à des niveaux particulièrement faibles jusqu’à la mi-2022, le nombre de défaillances d’entreprises a retrouvé son niveau d’avant-COVID en fin d’année dernière. 39.098 défaillances ont été enregistrées sur les 9 premiers mois de l’année (en hausse de 34% par rapport à 2022 et de 4,5% par rapport à 2019).
Cette dynamique concerne tous les secteurs. Les défaillances sont tirées par les entités réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 250.000 euros (+8% par rapport à la période janvier-septembre 2019) mais celles dont le chiffre d’affaires est supérieur à 10 millions d’euros sont désormais davantage touchées (+8% par rapport à 2019).
La tendance devrait se poursuivre dans les trimestres à venir, avec des marges et des flux de trésorerie sous pression en raison des conditions de financement restrictives, d’une demande plus limitée et de coûts en augmentation.
Nombre mensuel de défaillances d’entreprises
Perspectives économiques dégradées et risques multiples
90% entreprises interrogées s’attendent à une dégradation ou, au mieux, à un maintien de l’activité en France et dans le monde, attentes partagées par les entreprises de toutes tailles.
Malgré des perspectives de croissance toujours limitées – voire en baisse - en France et dans l’Union Européenne en 2024, ces deux marchés restent largement plébiscités par les entreprises exportatrices (72% pour la France et 60% pour l’UE), qui y voient les meilleures opportunités pour développer leur activité l’an prochain.
Dans un contexte géopolitique mondial incertain propice au nearshoring[2] et au friendshoring[3], 12% des entreprises interrogées déclarent avoir déjà relocalisé au moins une partie de leur activité. 84% des entreprises ayant ou souhaitant relocaliser une partie de leur activité envisagent par ailleurs de le faire en France.
[1] Délai de paiement - délai entre le moment où un client achète un produit ou un service et le moment où le paiement est dû.
[2] Relocalisation d’une activité économique dans un pays plus proche géographiquement
[3] Relocalisation d’une activité économique dans un pays allié en termes géopolitiques
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