Reims, Bourges, Amiens, Strasbourg, Rouen, Beauvais... 87 cathédrales (et 2 églises) sont propriété de l'Etat. Sans compter les anciennes cathédrales (91), certaines aussi très belles, qui dépendent des ressources, bien limitées, des communes.
"Quand on voit l'état de Notre-Dame avant l'incendie, on peut se préoccuper pour les autres cathédrales, joyaux de structures et de technicité" avec leurs pinacles et arc-boutants, s'alarme Bertrand de Feydeau, vice-président de la Fondation du patrimoine.
Devrait-on, comme cela a parfois été suggéré, reverser aux autres cathédrales françaises le surplus éventuel des 850 millions de promesses de dons recueillies après l'incendie de Notre-Dame ?
Un budget de 35 à 45 millions d'euros (sur 110 à 116 M EUR pour le patrimoine religieux), géré par les DRAC (Délégations régionales à l'action culturelle), a été alloué aux 87 cathédrales "d'Etat" ces six dernières années.
Pour Jean-Michel Loyer-Hascoët, adjoint au directeur général des patrimoines, une des difficultés est que "pas une cathédrale ne ressemble à une autre: il convient de leur adapter les règles de sécurité les plus pertinentes, en fonction de leur histoire": incendies, démolitions, restaurations dans le passé.
Ainsi, certaines charpentes rendent impossible de compartimenter les combles pour éviter la propagation du feu.
Les commissions de sécurité avaient rendu avant l'incendie 80 avis favorables sur 89. Mais, après le 15 avril, le ministre de la Culture Franck Riester a demandé un mise à jour des plans de sécurité anti-incendie. Une priorité est notamment d'intensifier le partage des informations avec les pompiers.
Pour les multiples oeuvres d'art à l'intérieur de chaque édifice, dans quel ordre précis les sortir en cas d'incendie? Comment rendre aussi plus effective et rapide la mise en oeuvre des prescriptions des commissions de sécurité ?
"Pas suffisamment de contraintes"
Ainsi il convient de faire mieux circuler auprès de tous les ouvriers et compagnons les guides existants énumérant chaque mesure à observer sur les chantiers. Car, parmi les 20 incendies recensés dans des églises en France depuis janvier 2018, 7 seraient liés à des travaux en cours.
"Une des causes du manque d'entretien des cathédrales provient du fait que l'Etat, qui est son propre assureur, ne donne pas ou n'exige pas suffisamment de contraintes sur place", analyse Edith d'Aubert-Henrion, directrice de l'Observatoire du patrimoine religieux.
"Un diagnostic général", plaide M. de Feydeau, devrait porter sur "l'efficience des systèmes de détection incendie, les procédures lors d'une alarme, une meilleure formation des personnels, la connaissance des lieux, et enfin les équipements pour attaquer le feu avec une efficacité immédiate."
L'expert du patrimoine Benoît de Sagazan, du Monde de la Bible "plaide pour un état des lieux solide qui ne trompe pas les donateurs". Ainsi, dit-il, "ce n'est pas parce qu'un édifice est en travaux qu'il y a un problème! Il y a une dramatisation de certaines officines pour avoir des dons".
Selon Edith d'Aubert-Henrion, "on ne constate pas de cathédrales en péril. Elles sont en général bien entretenues", les cathédrales attirant les touristes.
"Trois, énumère-t-elle, sont en souffrance, même s'il n'y a pas de danger imminent": Clermont-Ferrand où le réseau électrique était défectueux, Verdun qui souffrait d'infiltration d'eau, et Rodez, où il y a eu des chutes de pierre.
Après l'incendie de Notre-Dame et l'afflux de dons pour la restaurer, le maire de Rodez Christian Teyssèdre s'était insurgé de voir le conseil régional promettre des financements pour la cathédrale parisienne alors que celle de sa ville "est dans un état effroyable", rappelait en mai le président de l'association Sites et Monuments Alexandre Gady.
Des "travaux ordinaires" sont par ailleurs en cours à Rouen, Reims, Soissons, Strasbourg, Troyes, Bayeux, Bourges, Angers, selon la directrice de l'Observatoire du patrimoine religieux.
Quant aux anciennes cathédrales, elles peuvent aussi pour certaines "être en très mauvais état, comme Saint-Siffrein à Carpentras". La mission Bern a aussi retenu l'édifice en péril de Notre-Dame de Forcalquier.