"Le mois de juillet est calamiteux: cette fois le logement plonge", a estimé auprès de l'AFP Jacques Chanut, président de la Fédération française du bâtiment (FFB), principale fédération du secteur.
Les permis de construire creusent fortement la baisse des chiffres
Les permis de construire, indicateur avancé de l'immobilier neuf, ont fortement creusé leur recul en France de mai à juillet, tandis que les mises en chantier restaient orientées à la baisse, selon des chiffres publiés mercredi par l'exécutif, confirmant l'essoufflement du marché.
Au cours de ces trois mois, les permis de construire se sont élevés à 119.900, soit un recul de 12,1% par rapport à la même période de 2017, selon les chiffres du ministère de la Cohésion des Territoires. Le nombre de mises en chantier a, lui, baissé de 4,9% à 102.700.
En ce qui concerne les mises en chantier, qui témoignent du niveau effectif de la construction de logement, leur baisse conserve le rythme observé depuis plusieurs mois. Un mois plus tôt, le ministère avait annoncé un recul de 4% entre avril et juin.
En revanche, le recul des permis de construire, indicateur plus avancé du niveau futur du marché, marque une forte accélération: d'avril à juin, ils n'avaient baissé que de 4,3% par rapport à la même époque de 2017.
En conséquence, les permis de construire s'inscrivent désormais en nette baisse (-4,5%) sur l'ensemble de l'année écoulée à fin juillet, par rapport à la même époque un an plus tôt. Les mises en chantier restent en hausse (+3,4%).
Après deux années de progression régulière, le marché français du logement neuf donne des signes d'essoufflement depuis le début 2018, alors que le gouvernement a promis de relancer l'offre grâce à son projet de loi sur le logement.
Dans le détail, entre mai et juillet, les permis de construire ont accentué leur recul dans le logement individuel non groupé (-14,9%) comme dans le collectif (-14,4%).
Dans les mises en chantier, la baisse se creuse aussi nettement dans l'individuel non groupé (-7,1%). Dans le logement collectif, elle s'accélère légèrement mais de manière moins marquée (-3,2%).
Sur le seul mois de juillet, le taux d'annulation de permis de conduire de logements individuels (10,8%) baisse par rapport à juin et s'inscrit à un niveau inférieur à sa moyenne des dix dernières années.
Dans le collectif, il baisse aussi (24,4%) par rapport au mois précédent mais reste nettement supérieur à la moyenne sur dix ans.
Enfin, toujours pour juillet, le délai moyen d'ouverture de chantier s'est un peu allongé dans les logements individuels comme comme collectifs, à respectivement 5,3 et 11,2 mois.
Le marché revient d'un pic
"La situation devient préoccupante", insiste M. Chanut, estimant que le nombre de mises en chantier était en route pour repasser sous la barre des 400.000 cette année, après l'avoir nettement franchi en 2017.
Ce recul doit néanmoins être mis au regard d'une progression régulière du marché, celui-ci ayant atteint un pic au tournant de la fin d'année dernière.
Que ce soit en matière de permis de construire ou de mises en chantier, le logement neuf a régulièrement avancé en 2016 et 2017 dans un contexte marqué par des taux d'intérêt très bas et les conséquences du renforcement des aides publiques à la propriété sous le quinquennat de François Hollande, dont notamment le prêt à taux zéro (PTZ).
C'est sur ce dernier plan que le secteur du bâtiment concentre son interprétation de la faiblesse du marché: le nouvel exécutif, né de l'élection l'an dernier du président Emmanuel Macron, a reconduit le PTZ pour plusieurs années, mais en a réduit le périmètre géographique.
"La machine du logement est fragile", souligne M. Chanut, se refusant pour autant à parler d'"effet d'aubaine" en ce qui concerne les aides publiques.
Les professionnels du bâtiment ont fait de ce sujet l'un de leur chevaux de bataille, mais certains économistes remarquent aussi que les taux d'intérêt ont maintenant tendance à se stabiliser, certes à de très bas niveaux, et ne suffisent plus à accélérer la demande au moment où les prix montent.
Dans ce contexte, le gouvernement mise surtout sur la relance de l'offre dans le cadre de son projet de loi sur le logement, dit Elan, qui doit être définitivement adopté par les parlementaires en septembre.
L'exécutif, qui estime par ailleurs avoir donné une meilleure visibilité au marché en ce qui concerne les aides à la propriété, promet de "construire plus, mieux et moins cher" à l'aide notamment d'un allégement de certaines normes et de mesures destinées à limiter les recours contre les permis de construire.