"On ne peut pas m'accuser d'être le partisan du tout bagnole", se défend l'actuel maire de Lyon, investi par LREM pour les métropolitaines. Mais alors que la campagne est déjà bien engagée, il demeure le seul à vouloir ressusciter ce projet datant du début des années 1990, et qui vise à construire les 15 kilomètres manquants au sud-ouest du périphérique lyonnais.
Plombé par les démêlés judiciaires de l'ancien maire Michel Noir, les problèmes de financement et un manque de volonté politique, le projet est resté dans les cartons jusqu'à ce que Gérard Collomb le déterre en le faisant voter en 2013 par le Grand Lyon.
Souterrain à 80%, le Tronçon ouest périphérique (Top), désormais rebaptisé "Anneau des Sciences" car reliant sites universitaires, hospitaliers et de recherche, est censé soulager le trafic intra-muros et le tunnel de Fourvière, réputé pour ses encombrements.
Gérard Collomb espère ainsi juguler les embouteillages de l'ouest lyonnais et d'absorber une partie du trafic empruntant aujourd'hui l'autoroute A6/A7 à l'intérieur de Lyon, dont la capacité doit diminuer de moitié suite à son reclassement en boulevard urbain.
Avec en parallèle l'élargissement à l'Est de l'A432, censé capter les trafics de transit, Gérard Collomb affirme qu'il fera passer la circulation de 115.000 à 40.000 véhicules/jour sur l'axe A6/A7, rendu pour partie aux modes de transports "doux".
Mais selon ses adversaires - écologistes, LFI et Gauche unie en tête - le projet présente deux écueils: son impact environnemental et un coût faramineux estimé à 3 milliards d'euros au minimum.
Après y avoir longtemps été favorable, David Kimelfeld, président sortant de la métropole et ancien dauphin de Collomb devenu adversaire, estime aujourd'hui que le projet appartient au passé, lui préférant un plan d'extension du métro à 10 milliards d'euros.
"En 1989 notre rapport à la voiture et aux transports en commun était radicalement différent", avance-t-il, jugeant le financement du projet "compliqué".
M. Collomb propose de confier à un concessionnaire la construction, le financement et l'exploitation du tronçon, ce qui limiterait selon lui la charge pour la collectivité à 75-100 millions d'euros annuels sur 30 ans.
"Non sens"
Soucieux de "ne pas opposer l'économie à l'écologie", Collomb précise que son projet relooké sera pourvu de sept "portes" ouvrant sur des parkings-relais reliés aux transports en commun. Et avance comme argument écologique qu'à l'achèvement des travaux, on sera passé au tout électrique - fini donc la pollution et les nuisances sonores.
"Même si les voitures seront 100% électriques, cela ne résoudra pas la question des embouteillages", rétorque M. Kimelfeld, ajoutant qu'une grande partie des particules fines rejetées proviennent des pneus et de l'usure des routes.
L'association Déplacements citoyens voit dans le projet "non sens au niveau environnemental, climatique, économique et énergétique".
"Pour le même budget, on pourrait construire 25 kilomètres de métro, pour un débit de 20.000 passagers par heure contre 8.000 véhicules/heure qui circulent par exemple à Fourvière", détaille à l'AFP son président Jean Murard.
Plusieurs collectifs se sont créés en opposition au projet, car certains des sept échangeurs menaceraient des zones boisées et des habitations, et certains évoquant déjà le risque d'un Notre-Dame-des-Landes à la lyonnaise.
Mais s'il oppose, l'Anneau des sciences compte aussi des soutiens. Le Rassemblement national y est favorable, à la seule condition "de ne pas établir de noeud de raccordement sous les hôpitaux sud", précise à l'AFP le patron de la fédération du Rhône Antoine Mellies.
Le candidat des Républicains aux métropolitaines, le sénateur François-Noël Buffet, considérait en décembre le projet comme une "nécessité absolue", même s'il pose la condition d'un tracé plus long, passant plus au sud de l'agglomération.
Le débat tend à vampiriser la campagne en vue du double scrutin lyonnais (municipales et métropolitaines). Inspiré, un jeune élu métropolitain Génération, Damien Berthilier, s'est même fendu d'une fable inspirée de Tolkien sur un "anneau magique qu'un lion retiré dans sa belle province voulait boucler".
Reste à voir si cette question sera déterminante dans l'isoloir les 15 et 22 mars. La semaine dernière, un sondage du mensuel Nouveau Lyon révélait que parmi 700 personnes interrogées, 45% ignoraient totalement l'existence du projet.