A l'appel de plusieurs associations et collectifs citoyens, une centaine de personnes se sont rassemblées il y a quelques jours sur l'Aire des Vents à Dugny pour "sauver" cette parcelle du parc départemental de Georges-Valbon, qui doit accueillir le village des médias puis sera transformé en écoquartier de 1.300 logements et commerces.
Dans cette grande pelouse de 20 hectares qui accueille traditionnellement la Fête de l'Huma, des barrières ont déjà été installées pour marquer la zone de construction. "Regardez autour de vous, des trottinettes, des couples qui se promènent, des joggeurs et des enfants", décrit Youcef Tatem, du collectif "Notre parc n'est pas à vendre".
"C'est un parc populaire, de cohésion sociale, pourquoi nous l'enlever ?", s'interroge ce retraité de 74 ans qui s'est battu en 2015 contre le projet de Central Park à la française de 2.000 immeubles en lisière du parc labellisé Natura 2000.
"Pourquoi bétonniser cet endroit ? On manque d'espaces verts dans le département, c'est une aberration écologique", estime Christian Bernard, originaire de Bondy qui vient tout juste d'achever sa marche nordique dominicale.
Pour Anne Guyonnet, il ne s'agit pas d'"être contre les JO qui vont permettre d'obtenir des infrastructures en Seine-Saint-Denis" mais de s'interroger sur l'impact environnemental qui est "la grosse cata", estime cette cheffe de projet artistique de 50 ans.
"Les JO n'est plus la fête populaire où on regardait les exploits de Carl Lewis à la TV", considère cette habitante du Blanc-Mesnil.
Entre distribution de soupe chaude et tracts, France Boulay confie qu'il avait l'habitude de promener ses enfants sur l'Aire des Vents. "Je trouve dommage de vendre un bien public à des promoteurs immobiliers", regrette-t-il.
Pour cet ancien agent de maintenance, "il suffit d'héberger les journalistes dans les hôtels du Bourget comme c'est le cas lors du salon international de l'aéronautique".
"Mépris"
Le rassemblement à Dugny s'inscrit dans le "Toxic tour" organisé par le comité citoyen de vigilance des JO-2024.
Il s'agit d'une série de visites guidées sur les sites olympiques de Seine-Saint-Denis, afin de montrer "les impacts concrets en termes de pollution, de nuisances et d'endettement public qu'auront les décisions politiques des JO-2024", explique Marianna Kontos.
Sous la banderole: "JO-Paris 2024, intox et pillage de la Seine-Saint-Denis", le comité de vigilance a organisé une première étape mi-novembre dans les rues de Saint-Ouen et Saint-Denis.
Le front anti-JO a fait une halte devant le chantier du village olympique
et le quartier Pleyel.
Depuis plus d'un an, des habitants et des parents d'élèves de ce quartier mènent un combat judiciaire contre un projet d'aménagement d'échangeurs autoroutiers qui doit desservir le village des athlètes.
Une bretelle d'entrée et de sortie d'autoroute reliant l'A1 et l'A86 va être créée à proximité d'un groupe scolaire fréquenté par 700 enfants.
"On asphyxie des enfants au nom des JO et au détriment du département. On se fiche de nous parce qu'on est pauvres", a lancé Hamid Ouidir, parent d'élève à la FCPE 93, lors d'une prise de parole.
"On nous méprise, la Solideo (société de livraison des ouvrages olympiques) et le département ne nous parlent pas", se désole Benjamin Darras, de l'association "Vivre à Pleyel" qui avec 14 autres requérants ont déposé un recours devant le Conseil d'Etat, plus haute juridiction administrative en France.
Ils avaient remporté une première bataille avec la suspension des travaux mais la Cour administrative d'appel de Paris a donné en octobre le feu vert au démarrage des travaux.
A Dugny, parmi les indignés des JO de Paris 2024, figure aussi le collectif de la défense des jardins ouvriers d'Aubervilliers, réuni autour de la bannière: "On veut des potirons, pas du béton !"
Un hectare de leur potager, situé dans une zone très urbanisée, va disparaître au profit d'un centre aquatique d'entraînement et d'une gare du Grand Paris.
L'établissement public Grand Paris Aménagement, propriétaire des jardins, a promis "une compensation".
"Tous ces projets d'aménagement se font au détriment du 93, on se demande ce que l'on va gagner avec les JO", déclare amer Hugo Coldeboeuf, du collectif de la défense des jardins ouvriers.