Dans ce contexte difficile, trois observations font tout de même ressortir du positif pour l'avenir du secteur :
- alors que la crise des matériaux et de l'énergie sévit encore, le BTP résiste toujours,
- les carnets de commande restent fournis et l'année 2022 semble globalement faite,
- les besoins à moyen et long terme s'avèrent globalement porteurs pour le bâtiment.
L'activité : un bilan contrasté
Concernant le logement neuf, les tendances se confirment et le rebond dû à l'entrée en vigueur de la RE2020 et de la réglementation du HCSF laisse progressivement place à une chute à l'amont de la filière.
Bien qu'une remontée des mises en chantier soit encore possible d'ici la fin de l'année avec une hausse des permis d'environ 14%, en glissement annuel sur sept mois à fin juillet 2022, ces permis chuteront inévitablement avec l'effondrement des ventes de plus de 26% dans l'individuel diffus et de près de 15% dans la promotion immobilière, sur le premier semestre 2022 rapporté au même semestre de 2021. Les deux prochaines années s'annoncent « périlleuses » pour le logement neuf selon la FFB.
À quelques jours du dévoilement du PLF, la FFB tient à rappeler l´importance de préserver la capacité d'investissement des acteurs-clés du logement. Notamment aux bailleurs sociaux, et en particulier à Action Logement. Le groupe paritaire joue un rôle majeur au service des salariés, des entreprises et des territoires. Déséquilibrer son modèle financier par des ponctions financières constituerait un risque supplémentaire dans cette crise du logement en devenir.
La situation semble inverse pour le non résidentiel où, après deux années de marasme, 2022 ressort mieux orientée. De fait, les surfaces commencées et autorisées s’affichent en progressions respectives de près de 18% et 7% en glissement annuel sur sept mois à fin juillet 2022.
Enfin, l’activité en amélioration-entretien continue de croître, bien que sa dynamique déçoive un peu, sans doute pénalisée par un marché des CEE encalminé depuis le début de l’année. La tendance ressort proche de +2% pour l’ensemble, comme pour la rénovation énergétique. Mais il faut aussi souligner que ce segment progresse régulièrement depuis la sortie de la crise sanitaire. En cumul depuis la fin du premier trimestre 2020, hors effet prix, l’amélioration-entretien s’affiche en hausse de 6,5% et la rénovation énergétique du logement de 12,4%.
L’ensemble de ces éléments, y compris les révisions à la baisse des scénarios macro-économiques, conduisent à réévaluer un peu les prévisions de la FFB pour 2022. La croissance de l’activité s’établirait à +3,8% en volume, contre +4,3% prévu début décembre 2021, principalement du fait de la moindre progression de l’amélioration-entretien.
Cela signifie aussi qu’à ce jour, l’élan pris avant d’entrer dans 2023 se révélera moindre qu’espéré, alors même que les attentes relatives au secteur se renforcent, compte tenu de la guerre énergétique toujours d’actualité.
Emploi : un ralentissement inquiétant
Au-delà du blocage des permis de construire, l’un des principaux facteurs expliquant ce tassement réside dans l’emploi, qui peine à suivre. Certes, par rapport à la fin du premier trimestre 2020, le secteur a créé près de 80.000 postes salariés et intérimaires, auxquels il faut ajouter 17.000 artisans non salariés, soit 97.000 personnes de plus. Toutefois, ce chiffre plafonne depuis la fin 2021.
Sans doute la dégradation des perspectives globales joue-t-elle un rôle dans cette stabilisation à haut niveau. Mais surtout, les difficultés de recrutement perdurent ; elles se renforcent même chez les plus de dix salariés, pour atteindre des proportions historiques : plus de quatre entreprises sur cinq déclarent en souffrir.
L’emploi constitue donc un goulet d’étranglement du secteur, alors que le vivier de compétences disponibles se trouve aujourd’hui à l’étiage.
La guerre de l'énergie relance la crise des matériaux
Le troisième facteur de blocage, aussi important que les précédents, réside toujours dans la crise des matériaux, relancée par la guerre de l’énergie. L’hystérie sur les marchés du gaz et de l’électricité a douché tous les espoirs d’accalmie et les perspectives s’assombrissent. De fait, les fermetures de chaines de productions semblent se multiplier depuis août : produits aluminium, zinc, acier, tuiles et produits verriers, … les difficultés d’approvisionnement et les craintes de pénuries réapparaissent, sans même évoquer l’impact sur les prix de ces matériaux.
Globalement, sous l’effet de ces hausses, les coûts des entreprises de bâtiment ont déjà progressé de 12% entre la fin 2020 et juin 2022, selon l’index BT01 de l’Insee. Ce n’est pourtant pas fini, d’autant que l’inflation générale pèse sur les coûts de main d’œuvre. Et cela explique que les trésoreries se tendent, alors qu’il faut ajouter à ces chocs le début du remboursement des PGE.
Les assises du BTP très attendues
Les Assises du BTP doivent permettre de répondre à cette situation, en faisant notamment appel à la solidarité de filière et à la solidarité nationale.
La FFB a formulé nombre de propositions lors des réunions préparatoires. Par exemple, pour les marchés publics, la simplification des conditions d’obtention d’avenants visant à compenser la hausse des matériaux sans remise en cause du marché, la pérennisation du plafond à 100.000 € pour traiter de gré à gré, le relèvement du taux d’avance minimal. D’autres suggestions relatives à la transition écologique ont également été formulées, notamment l’indexation des aides, le relèvement des obligations d'économie d'énergie pour la cinquième période des CEE ou la mise en œuvre effective de l’éco-contribution REP neuf mois après publication des tarifs, toujours inconnus à ce jour.
La FFB demande donc avec force que la plénière des Assises du 22 septembre prochain soit considérée comme une nouvelle étape vers la constitution d’un véritable Conseil national de la construction et non comme une fin. De fait, les crises qui se succèdent depuis 2020 illustrent clairement le besoin d’une meilleure coordination au sein de la filière et d’une meilleure concertation avec le gouvernement.