Long ruban de 35 km enserrant la capitale, le périphérique avait été inauguré en grande pompe le 25 avril 1973 par le Premier ministre Pierre Messmer après 15 ans de travaux sur l'emplacement des anciennes fortifications de Paris.
"Sa construction aussi proche de Paris est révélateur de l'héritage de la civilisation automobile des trente glorieuses", souligne le politologue Romain Pasquier.
Aujourd'hui, la grande boucle, ses 38 portes et 6 échangeurs autoroutiers, drainent 1,1 million de véhicules par jour, ce qui en fait l'autoroute la plus chargée d'Europe.
Conséquence, une pollution de l'air au dioxyde d'azote très élevée qui atteint à son pourtour près de deux fois la valeur limite annuelle et un niveau de bruit de plus de 65 décibel (sonnerie de téléphone, aspirateur) considéré comme le seuil d'irritation de l'oreille interne.
Si pour limiter ces nuisances, des tronçons ont été couverts, 14 km de murs antibruits dressés, un enrobé phonique déroulé sur la moitié de la boucle et la vitesse limitée à 70 km/h, l'idée d'aller plus loin pour mieux intégrer le ruban de béton dans la ville s'est imposée comme un enjeu des municipales.
D'autant que le périph' est aussi perçu comme une barrière alors que la capitale se cherche un nouveau souffle au delà de ses frontières dans la construction de la métropole du Grand Paris.
Vitesse abaissée à 50 km/h
En juin dernier, les quarante préconisations d'une mission d'information et d'évaluation (MIE) sur le périph ont fait l'unanimité au Conseil de Paris.
Elles proposent de répondre à l'urgence sanitaire, avec notamment l'abaissement de la vitesse à 50 km/h, d'apaiser la circulation automobile par le développement des transports alternatifs d'ici 2040 avant de s'attaquer au réaménagement de l'espace occupé par le périphérique lui-même.
"A part Gaspard Gantzer (rallié à Agnès Buzyn) qui voulait détruire le périph, tout le monde s'accorde à ne pas vouloir se priver d'un ouvrage unique dans les grandes capitales pour distribuer la circulation", souligne le rapporteur de la MIE Eric Azière (MoDem).
"Je ne souhaite pas le détruire parce qu'on a besoin de ce lieu de circulation pour désengorger Paris", a confirmé à l'AFP la candidate LREM Agnès Buzyn
"Je pense que des passerelles ou des lieux de passage sont en revanche tout à fait envisageables avec les communes limitrophes (...) mais pas de grands travaux. Je pense que les Parisiens et les Parisiennes aujourd'hui sont épuisés des grands travaux", dit-elle.
Pour la maire sortante Anne Hidalgo, le périphérique devra à terme être transformé en un boulevard urbain. "Cela veut dire, diminution de la vitesse, végétalisation sur une bonne vingtaine d'hectares -on peut planter entre 70.000 et 80.000 arbres", a expliqué à l'AFP le maire adjoint Jean-Louis Missika.
"Cela veut dire aussi à certains endroits des feux de signalisation, des passages piétons et, là où il y a quatre voies, une voie réservée aux véhicules propres, co-voiturage et transports en commun d'ici 2023 et une autre pour les piétons et les vélos", dit-il.
Mais avant de commencer à toucher à l'ouvrage, il faudra restreindre le flux automobile avec la mise en route du super métro autour de Paris, le "Grand Paris express", à partir de 2024 et apaiser la circulation des autoroutes et voies rapides à l'intérieur de l'A86, le "superpériphérique" parisien situé entre 2 et 7 km de la capitale.
"Nous sommes aussi pour transformer le périphérique en un boulevard urbain végétalisé", explique l'écologiste Fatoumata Koné qui souhaite cependant que les habitants soient consultés à ce sujet. Pour EELV la place gagnée sur le périph devra surtout répondre aux besoins locaux en matière de logements, d'infrastructures sportives ou culturelles.
Quant à Cédric Villani, défenseur d'un Paris agrandi, il appelle à "effacer le périphérique en tant que barrière physique, administrative et psychologique". Il faut, dit-il, "suturer, recouvrir là où c'est possible, dresser des passerelles et favoriser les déplacements doux".