Mais dans ce département situé au nord de la capitale, le plus pauvre de France et dépourvu de culture de la natation, il faudra ensuite pouvoir faire vivre ces nouveaux bassins hérités des Jeux olympiques de Paris qui se dérouleront du 26 juillet au 11 août.
Aux 1,6 million d'habitants de Seine-Saint-Denis, qui manque d'équipements sportifs, les élus ont assuré la main sur le cœur que ruissellera un peu de l'argent de ces Jeux.
Signe très concret de l'"héritage matériel" promis: une poignée de nouvelles piscines et des bassins rénovés pour le territoire - qui compte actuellement 60 m2 de bassin pour 10.000 habitants contre 260 m2 au niveau national.
La plus emblématique est le Centre aquatique olympique situé à Saint-Denis, à laquelle s'ajoutent le complexe de Marville à La Courneuve et les nouvelles piscines d'Aubervilliers et d'Aulnay-sous-Bois.
Au total, la Solideo, Société de livraison des ouvrages olympiques, a fourni 15 millions d'euros sur les 35 du plan piscine du département.
Deux autres bassins temporaires, utilisés pour les épreuves olympiques seront légués par le Comité d'organisation des JO (Cojo) et installés à Bagnolet et Sevran.
Dans cette commune, le bassin "remplacera la piscine obsolète modèle Caneton", construite dans le cadre du programme national des 1.000 piscines lancé dans les années 1970 après les résultats catastrophiques de la France aux JO de Mexico, explique Clémentine Lerévérend, directrice de cabinet du maire de Sevran.
"Une culture à écrire"
En Seine-Saint-Denis, département le plus jeune de France, un enfant sur deux ne sait pas nager à l'entrée au collège, affirment les pouvoirs publics sans citer d'étude précise. En 2023 sur le taux de réussite au "savoir nager", l'académie de Créteil arrivait ainsi en queue du peloton national.
Dans ses cours, Sandie Nahoum, présidente du comité départemental de la Fédération française des maîtres nageurs sauveteurs (FNMNS), a observé que les enfants avaient "parfois peur de l'eau".
Une enquête de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire de 2019 portant sur quelque 12.000 collégiens a fait ressortir que la maîtrise de la natation était liée à la durée des vacances d'été, étroitement dépendante de l'origine sociale, et "plus faible chez les descendants d'immigrés".
Dans ce département, terre d'accueil de vagues successives d'immigration et où un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté, "il faut axer sur l'apprentissage de la natation et le secourisme", insiste Sandie Nahoum.
"Pour les enfants notamment, ne pas savoir nager est et reste une cause réelle d'accident", relèvent les pouvoirs publics, qui ont lancé des plans successifs de prévention contre les noyades.
"Eléphant blanc"
Encadrée par les tours d'habitation, des nouveaux terrains de Padel et de foot à cinq, la nouvelle piscine de Marville à la Courneuve va faire passer les entrées de "60.000 dans l'ancienne piscine à 300.000", vante le président socialiste du département Stéphane Troussel.
Elle ouvrira aux scolaires dès avril. Et comme souvent pour rentabiliser un tel équipement, elle est dotée d'un espace bien-être.
"On passe d'un des départements les moins dotés à un département qui va avoir le plus de bassins de 50 mètres après les JO", observe Basile Gazeaud, responsable équipements à la Fédération française de natation (FFN).
Mais en Seine-Saint-Denis, relève-t-il, "le réseau de clubs est très confidentiel et il reste une culture populaire de la natation à écrire".
Une fois implantés, il faudra aussi faire durer ces piscines.
"Comment faire 'rayonner' ces six bassins pour qu'aucun ne devienne un éléphant blanc" - ces constructions pharaoniques qui se délitent faute d'utilité une fois la compétition achevée, interroge M. Gazeaud.
Beaucoup de communes du département sont désargentées et ce type d'équipement doit souvent faire face à des déficits de fonctionnement.
"On a une Solideo (chargée de construire les ouvrages pérennes) et un Cojo qui communiquent à grand cris sur l'héritage mais qui vont fermer la boutique fin 2024", poursuit-t-il.
En attendant, la fermeture pour rénovation de certains bassins en vue des JO a entravé l'apprentissage.
Comme à Montreuil, où la piscine est fermée depuis un an. "On est passé de cinq classes de 25 à un groupe de dix nageurs", dit Jonathan Alves enseignant en collège dans cette ville.