Pour les plus de quatre millions d'épargnants français qui investissent dans l'immobilier via des placements collectifs, l'année 2023 a été sombre.
Le ralentissement du marché immobilier puis la baisse des prix constatée en 2023 ont provoqué une "onde de choc" qui s'est propagée à ces investissements, à commencer par les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI), résume le courtier Linxea dans son baromètre annuel.
Depuis un an, les SCPI sont contraintes de diminuer la valeur des biens qu'elles détiennent en raison des conditions de marché, qu'ils soient constitués de logements, d'entrepôts ou de bureaux.
En conséquence, des acteurs majeurs de l'écosystème ont revu en baisse la valeur des parts qu'ils détiennent dans les SCPI, avec des chutes jusqu'à 20% en une ou deux fois. En mars, ce fut notamment le cas pour trois SCPI proposées par le premier gestionnaire d'actifs européen Amundi, qui représentent près de 8% des encours du marché, ou encore un placement de la banque BNP Paribas.
Vingt-six SCPI sur les plus de 200 en France ont baissé le prix de leurs parts entre mars 2023 et 2024, mais "ces dépréciations représentent tout de même 35% de la capitalisation totale" du marché, estimé à 90 milliards d'euros fin 2023, selon George Nemes, le président de Patrimmofi.
Fuite contrariée
La réévaluation de la valeur des propriétés n'est toutefois que l'une des manières de gagner de l'argent avec les SCPI. L'autre est le "rendement reversé", fruit de la location des biens, qui a assuré une rémunération à 4,52% en 2023, selon l'Association française des sociétés de placement immobilier (Aspim), une proportion stable par rapport à 2022.
"Les dernières décennies ont montré que les patrimoines se valorisent dans la durée", souligne le président de l'Aspim Jean-Marc Coly, remarquant en outre que certaines SPCI spécialisées dans des secteurs "comme la santé, la vieillesse ou la logistique" ont "tiré leur épingle du jeu" durant cette période.
En 2023, les épargnants qui tentent de récupérer leur argent ont pu être déçus: l'investissement dans ces fonds immobiliers est moins liquide, ce qui signifie qu'il est plus difficile de réaliser des transactions que pour d'autres actifs financiers, comme des actions. De nombreuses ventes de parts de SCPI n'ont pas trouvé preneur en 2023, et 31 décembre 2023, cela concernait une SCPI sur deux, selon l'Aspim.
Une société de gestion "peut ne pas être en mesure de répondre aux demandes de rachat avant plusieurs mois", a rappelé en février la médiatrice de l'Autorité des marchés financiers, qui régule ce type de placement.
L'AMF a par ailleurs envoyé une lettre en septembre 2023 pour demander aux acteurs du secteur pour veiller à la transparence sur la valorisation des fonds.
Rénovation
Les gérants espèrent désormais que le point bas des valorisations est atteint, grâce à la reprise du marché de l'immobilier. Le redémarrage est entrevu avec les baisses de taux d'intérêt qui pourraient s'enclencher d'ici à l'été pour la Banque centrale européenne.
De nouveaux acteurs tentent de profiter de cette donne: en 2023, huit nouvelles SCPI ont vu le jour. Certaines se démarquent en proposant des frais d'entrée très bas.
Autre avantage de ces nouveaux-venus, "la plupart des SCPI anciennes, avec un patrimoine qui est vieux, ont une double problématique: l'efficacité énergétique et la mise aux normes des bureaux par rapport aux demandes de confort de vie des salariés", rappelle Cyrille Chariter-Kastler, du cabinet Facts & Figures. Elles doivent donc consentir à d'importants travaux de rénovation.
"L'immobilier est un secteur d'activité cyclique (...) et on pense que les premiers mois de 2024 marquent la fin du cycle baissier", justifie à l'AFP Foulques de Sainte-Marie, directeur de fonds chez Mata Capital, qui lance une SCPI en 2024.
"Un bureau premium à Paris s'échangeait 35.000 euros le mètre carré fin 2021, c'est maintenant autour de 20-22.000", rapporte-t-il. "C'est le bon moment" pour investir, assure-t-il.