La municipalité de New York, à l'instar de Paris, où se loger est un parcours du combattant, a mis en place cette semaine une loi qui interdit aux propriétaires de louer des dizaines de milliers de meublés touristiques pour une période inférieure à 30 jours.
La nouvelle législation -- plus stricte que celle de la mairie de Paris où, depuis 2021, seules les résidences principales peuvent être louées librement 120 jours par an maximum -- autorise un propriétaire à louer une pièce de son appartement à condition qu'il soit chez lui durant tout le séjour.
En outre, les locataires touristiques ne peuvent pas être plus de deux et leur chambre doit rester accessible.
Chaque propriétaire-bailleur de courte durée doit s'enregistrer auprès de la mairie et lui verser une taxe de 145 dollars tous les deux ans.
7.500 dollars d'amende
Mais ces permis de louer n'ont été accordés pour l'instant qu'à à peine 10% des candidats.
Les amendes pour location illégale sont déjà prévues entre 1.000 et 7.500 dollars mais elle ne frapperont que les propriétaires.
La "Grosse pomme" compte 8,5 millions d'habitants -- sans compter les grandes banlieues résidentielles -- et la crise du logement y est légendaire.
A Manhattan, un appartement -- du studio au quatre-pièces -- se louait en juillet au prix mensuel moyen de 5.588 dollars (+9,3% sur un an) et dans l'arrondissement de Brooklyn, plus à la mode, le loyer moyen a atteint 4.347 dollars (+11,9% sur un an), selon le cabinet immobilier Douglas Elliman.
Même si, officiellement, la municipalité de gauche entend lutter contre toutes les nuisances engendrées dans les quartiers par des locations de courte durée, l'objectif est d'encourager un retour de logements sur le marché des baux d'un an et plus et de faire, peut-être, baisser un peu les prix.
Ce qui fait dire à Marianne LeNabat, une New-Yorkaise de 44 ans, que la décision de la mairie "est probablement nécessaire".
New York est "inabordable"
"Se loger est complètement inabordable à New York et (...) retirer du marché des milliers et des milliers de logements (pour des locations de très courte durée) est évidemment un problème", souligne-t-elle auprès de l'AFP.
Des bailleurs new-yorkais et Airbnb avaient exprimé depuis longtemps leur mécontentement.
Pour la plateforme basée à San Francisco et son directeur de la stratégie mondiale, Theo Yedinski, "la ville de New York envoie un message très clair aux millions de visiteurs potentiels qui vont avoir moins de choix: +Vous n'êtes pas les bienvenus+".
Quant aux petits propriétaires, qui possèdent un ou deux logements, l'interdiction des locations de courte durée "va mettre en péril la capacité de rembourser leurs prêts immobiliers, provoquant une crise supplémentaire sur le marché du logement, et les mettant financièrement et personnellement en danger", selon leur association Rhoar.
C'est le cas de Tricia, qui ne veut pas donner son patronyme, et qui, à 63 ans, loue le rez-de-chaussée de sa petite maison typique de Brooklyn pour gagner quelque 3.000 dollars par mois en moyenne.
"Presque tout le monde (dans le quartier) possède sa maison et on l'a achetée en pensant qu'on aurait le droit d'en faire ce qu'on veut", proteste cette retraitée auprès de l'AFP tout en assurant qu'elle respectera la règle des 30 jours minimum.
"Balle dans le pied"
New York, réputée être "la ville qui ne dort jamais", s'est relevée de la pandémie de Covid-19 après avoir accueilli en 2019 plus de 66 millions de touristes qui avaient généré plus de 47 milliards de dollars de chiffre d'affaires et fait travailler 283.000 personnes.
Mais le secteur de l'hôtellerie-restauration manque maintenant de main d'oeuvre, nombre de grands établissements n'ont pas rouvert à Manhattan et les prix des chambres s'envolent jusqu'à des centaines de dollars la nuitée."Il y a tant de jeunes qui visitent New York et qui ne peuvent s'offrir l'hôtel", constate Joe McCambley, 66 ans, client régulier de Airbnb, qui "pense que New York est en train de se tirer une balle dans le pied".
Dans un rapport qu'Airbnb lui a commandé, un professeur de l'université de Boston, Michael Salinger, écrit que la nouvelle législation municipale n'est pas "justifiée au plan économique" et qu'elle va au contraire porter "un gros coup" à l'économie locale sans régler la pénurie de logements à New York.