Les célèbres "basements" de Manhattan, Brooklyn ou Queens sont parfois très rudimentaires, partagés en co-location - illégale ou non - entre des travailleurs ou étudiants à faibles revenus.
Au contraire, ce que des agents immobiliers français appellent "souplex" peut être typique du charme de New York, prisé par des résidents aisés qui veulent toutefois réduire le coût exorbitant des loyers.
Riches ou pauvres, onze personnes, dont un enfant de deux ans, sont mortes noyées chez elles dans le déluge qui s'est abattu mercredi soir. En pleine ville, elles ont été englouties dans leur logement, parfois sans fenêtre, avec une seule porte de sortie sur la rue. Coincées par la très soudaine et rapide montée des eaux qui ne leur a laissé aucune chance.
La star de l'aile gauche du parti démocrate, Alexandria Ocasio-Cortez, élue de New York à la Chambre des représentants a dénoncé dès mercredi soir le risque d'habiter dans un sous-sol, en cas d'intempéries.
Loués au noir
"Ceux qui vivent dans des +basements+ d'habitation loués au noir et dans de mauvaises conditions de sécurité, sont parmi LES PLUS exposés aux inondations soudaines", a tweeté cette figure politique. Elle a enfoncé le clou en soulignant que les plus à risque étaient "les travailleurs, les immigrés et les familles à faible revenu".
D'ailleurs, l'agence américaine de protection de l'environnement a dénoncé dans un rapport, révélé jeudi par le Washington Post, le fait que les minorités ethniques aux Etats-Unis seraient les plus affectées par le changement climatique, notamment en cas d'inondations soudaines.
D'après le New York Times, qui a travaillé sur le parcours des victimes, une femme de 86 ans, morte chez elle mercredi soir, vivait dans un immeuble de Queens visé par des plaintes pour exploitation illégale de son sous-sol.
Ce quartier du nord-est de New York abrite une forte population immigrée, souvent des travailleurs sans-papiers d'Amérique latine. L'un d'eux y est décédé mercredi soir dans les mêmes circonstances.
A Brooklyn, un Equatorien de 66 ans s'est noyé dans une pièce sans fenêtre, a raconté le journal.
Omerta
Ils seraient 114.000 à New York à vivre dans des "basements" illégaux selon une étude de 2008 du centre Pratt pour le développement des quartiers, dans une ville de 8,8 millions d'habitants qui a gagné 629.000 résidents en dix ans, d'après le dernier recensement américain en août.
Les sous-sols loués au noir seraient aujourd'hui bien plus nombreux, pensent des chercheurs qui dénoncent une forme d'omerta.
"Le problème, c'est que ces logements sont illégaux, qu'il y a potentiellement de grosses amendes, que les locataires ont besoin de se loger et que les propriétaires ont besoin de revenus. Résultat, personne ne veut en parler", explique à l'AFP Rebekah Morris du centre Pratt.
Pour sa collègue Nicole Gelinas, économiste au centre de recherche du Manhattan Institute, "il faudrait que les propriétaires qui louent illégalement des appartements à la découpe rendent des comptes".
Mais "il y a une telle crise ici, il n'y a pas assez de logements", déplore Mme Morris qui ne croit pas à une répression contre les propriétaires peu scrupuleux et autres marchands de sommeil.
Pour les défenseurs des mal-logés, c'est l'absence de conditions de sécurité minimale, notamment d'issues de secours, qui pose vraiment problème.
Une campagne a été lancée - "Appartements en sous-sol sécurisés pour tout le monde" (Base en anglais) est en cours pour la création de quelque 200.000 souplex abordables et sûrs.
Le maire de New York, Bill de Blasio, un démocrate en fin de mandat, a plaidé vendredi sur la chaîne MSNBC pour un "programme de relogement des gens qui vivent en sous-sol, en cas de forte pluie et d'inondation".