Entre accélération de la consommation des ménages grâce au ralentissement de l'inflation et investissements des entreprises encore en berne en raison de taux d'intérêt élevés, les prévisions de croissance varient pour la période allant d'avril à juin.
Dans sa note de conjoncture publiée début juillet mais fondée sur la situation pré-électorale, l'Insee disait anticiper une hausse du produit intérieur brut (PIB) de 0,3% au deuxième trimestre par rapport aux trois mois précédents, où la croissance avait atteint 0,2%. La Banque de France est moins optimiste, avec une progression projetée à 0,1%.
Verdict mardi, quand l'Insee publiera à 07H30 (05H30 GMT) sa première estimation du niveau de croissance réellement atteint sur la période.
"Beaucoup d'incertitudes"
"Il y a beaucoup d'incertitudes", relève Maxime Darmet, économiste pour l'assureur-crédit Allianz Trade. "Toutes les composantes de l'investissement sont dans le rouge, mais en même temps, la consommation des ménages - 55% du PIB - a l'air de se porter un peu mieux", dit-il à l'AFP.
En dépit de la baisse des taux amorcée par la Banque centrale européenne (BCE) en juin, les investissements des entreprises devraient rester à la peine au deuxième trimestre, tout comme ceux des ménages dans le secteur résidentiel.
"L'offre de crédit reste restrictive" et elle "est verrouillée pour beaucoup de PME", constate Maxime Darmet, sur fond de hausse des défaillances d'entreprises.
Il estime par ailleurs que la contribution de la dépense publique à la croissance pourrait se tarir, alors que les finances publiques se portent mal et que le gouvernement sortant a engagé des milliards d'euros d'économies pour les redresser - avec un objectif de 25 milliards rien que pour 2024, selon Bercy.
A l'inverse, la consommation des ménages, moteur traditionnel de la croissance française, devrait se démarquer positivement, le ralentissement de l'inflation redonnant du pouvoir d'achat aux Français.
En juin, la hausse des prix en France a atteint 2,2% sur un an, au plus bas depuis près de trois ans. Selon une prévision de l'Insee, elle devrait encore ralentir à 1,9% sur un an en décembre.
En moyenne annuelle, elle s'établirait à 2,2% en 2024, un net repli par rapport à 2023 (4,9%). Elle est désormais surtout tirée par les services plutôt que par l'alimentation.
"Il y a peut-être de premiers signes que le consommateur accélère ses achats grâce à la baisse de l'inflation", une tendance qui devrait s'accentuer au troisième trimestre, souligne l'économiste d'Allianz Trade. Et ce, même si le niveau d'épargne des ménages demeure élevé (17,1% des revenus en moyenne sur 2024, prévoit l'Insee).
L'Insee publiera également mardi matin les chiffres de la consommation des ménages en biens en juin, tandis que la première estimation de l'inflation au mois de juillet sera connue mercredi.
Entre juillet et septembre, l'activité bénéficierait aussi de l'effet positif des Jeux olympiques et paralympiques, estimé par l'Insee à 0,3 point sur la croissance, laquelle attendrait 0,5%.
"Décrochage violent"
Ce stimulus pourrait toutefois être partiellement contrebalancé par l'incertitude politique créée par les législatives, qui n'ont débouché sur aucune majorité claire.
Signe défavorable pour l'économie française, le climat des affaires, qui mesure le moral des chefs d'entreprise, s'est contracté de cinq points à 94 en juillet, au plus bas depuis février 2021. La baisse de confiance touche tous les secteurs d'activité.
"La situation de blocage politique provoquée par la dissolution de l'Assemblée peut-elle expliquer à elle seule cette situation extrême ? Difficile à dire mais il s'agit, sans contexte, d'un warning (avertissement, NDLR) très sérieux pour la France", avertit le cabinet RichesFlores dans une note.
Le "décrochage" de l'indicateur a été "violent (...) au point de faire ressurgir l'hypothèse d'une récession", ajoute-t-il.
L'Insee anticipe une contraction de 0,1% du PIB au quatrième trimestre. Pour l'ensemble de 2024, l'institut statistique table sur une croissance de 1,1%, similaire à celle de l'année précédente et supérieure à la prévision du gouvernement macroniste sortant (1%).