
Ce n’est donc pas un hasard si les campagnes de sensibilisation se multiplient pour combler cet important retard, aussi bien dans les bonnes pratiques à adopter que dans les équipements à déployer.
Car des solutions sanitaires - mobiles et autonomes - existent pour répondre à cet important défi. Assouplir la législation française qui impose le raccordement des toilettes pour tout chantier dont la durée excède trois mois pourrait en favoriser le déploiement, en apportant plus de flexibilité aux entreprises du bâtiment.
Un aspect trop souvent négligé
Tout employeur a l’obligation d’équiper les chantiers temporaires et mobiles de structures sanitaires adéquates, propres et en quantité proportionnelle au nombre de travailleurs. C’est du moins ce qui est prévu dans l’article R4228-1 du Code du travail français.
Toutefois, la réalité sur le terrain est quelque peu différente. Et pour cause, selon un rapport publié en 2023 par Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), 40% des chantiers qui n’intègreraient pas d’installations hygiéniques dignes de ce nom, 25% seraient dépourvus de base-vie mutualisée, raccordée ou entretenue quotidiennement, ou encore 70% des chantiers de maisons individuelles n’auraient pas la moindre cabine WC. Des chiffres qui placent la France en queue de peloton par rapport à ses voisins européens. Parmi les bons élèves, on retrouve l’Allemagne ou l’Italie, dont le cadre règlementaire est beaucoup plus strict qu’en France.
La nécessité de mettre en place des solutions sanitaires sur le territoire est réelle. Les grands acteurs sont exemplaires en la matière, mais quelle est la place des artisans ou des ETI sur ce sujet ? La répression n’est pas le seul moyen, mais la prise en compte de l’hygiène et du bien-être des collaborateurs doit être au centre des préoccupations.
Pour combler ce retard, les campagnes de sensibilisation se sont récemment multipliées. Ainsi, l'Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) avait uni ses forces en automne 2023 avec la Fédération nationale des Distributeurs, Loueurs et Réparateurs (DLR) de matériels de construction et de manutention. L’objectif ? Faire bouger les lignes sur le sujet de l’hygiène, qui devrait être davantage prise au sérieux, en particulier dans le secteur du bâtiment.
L’hygiène, véritable vecteur de performance
Plus que jamais avec les événements qui ont marqué le début de la décennie, nous avons bien vu que la bonne santé de la population passe par une hygiène méticuleuse. Pour garantir le bien-être et le confort nécessaires au respect de la dignité des salariés, la salubrité des lieux de travail va de pair avec des pratiques et des installations sanitaires conformes. Bien évidemment, le BTP ne fait pas exception.
Ce dernier peut assurément tirer son épingle du jeu en favorisant de meilleures conditions sanitaires à ses employés. D’une part, parce qu’en proposant à son personnel des dispositifs hygiéniques dignes de ce nom, les entreprises limitent la propagation de maladies, et donc les arrêts de travail, favorisant ainsi le respect des délais de chantier, au-delà d’optimiser les conditions dans lesquelles évoluent les salariés.
D’autre part, la mise en place suffisante de dispositifs sanitaires de qualité contribue - dans le cadre d’une stratégie RSE plus globale - à renforcer la performance économique des entreprises mais aussi leur marque employeur, et ainsi attirer et fidéliser du personnel. Lorsque l’on sait que le secteur est confronté à une pénurie de main-d’œuvre croissante et pâtit d’une relative mauvaise image, cet aspect n’est pas à négliger.
Pour leur propre réputation, mais aussi pour celle du BTP tout entier, les entreprises ont donc tout intérêt à assurer une hygiène irréprochable. Et bonne nouvelle, ce n’est pas aussi difficile qu’il n’y paraît.
Des dispositifs et services adaptés existent
Au-delà des gestes et pratiques à adopter - diminuer les contacts entre individus et nettoyer régulièrement ses mains suffit à réduire la propagation des virus, microbes et bactéries à l’origine de nombreuses pathologies infectieuses - sur le chantier, veiller à ce que les équipements sanitaires garantissent une hygiène irréprochable apparaît également comme une nécessité absolue. Ainsi, des équipements sanitaires intégrant un distributeur de produit nettoyant, virucide et bactéricide, efficace et respectueux de l’environnement sont vivement recommandés. Il convient en outre de veiller à leur entretien quotidien (vidange, désinfection de la cuve, réassort en consommables...) : des services généralement proposés par les fournisseurs de ces solutions.
Mais cela ne s’arrête pas là. Des innovations matérielles, comme les chasses d’eau actionnables par pédale, sont conçues pour réduire au maximum les contacts manuels. Le recours à des solutions « autonomes », sans raccordement électrique et au réseau d'eaux usées, en facilitent le déploiement et le déplacement, quelle que soit l’accessibilité du site. Ce type de sanitaires dits « chimiques » dernière génération, incorporant un réservoir à eau propre en plus du réservoir à effluents, optimise la gestion de l’eau et contribue à diminuer l’impact environnemental.
Aux premiers abords, leur appellation peut laisser présager des effets néfastes et constituer un frein pour le respect des exigences RSE, mais la plupart utilise en réalité des produits de désinfection presque à 100% biodégradables. Par ailleurs, en ce qui concerne les personnes à mobilité réduite, des solutions similaires ont été élaborées pour leur garantir le même confort. Enfin, des cabines plus petites, permettant de les mettre dans les étages avec des systèmes de vidanges simples, sont autant d’innovations qui aident les acteurs du BTP à faciliter l’accès aux sanitaires.
Dès lors, les entreprises du bâtiment auraient les cartes en main pour remettre la France sur les devants de la scène en matière d’hygiène sur les chantiers. Par la multiplication de dispositifs accessibles, abordables, assortis de services adaptés, un million et demi d’actuels, et futurs, employés du BTP pourraient voir des changements bénéfiques sur leur santé et leur bien-être. Une aubaine pour l’attractivité et la performance économique de tout un secteur.
Tribune de Bruno Diss, Directeur Général France chez Sebach (Linkedin).