Néanmoins, elle met en lumière les paradoxes auxquels sont confrontés les ménages, qui se heurtent à des obstacles majeurs pour engager la transition énergétique : contraintes budgétaires, complexité des démarches et incertitude quant au retour sur investissement. Au travers de l’analyse des freins et des motivations, l’étude identifie 5 leviers pour débloquer la mutation vers un habitat plus durable.
Un attachement au logement fragilisé par la pression financière
89% des Européens (86% des Français) déclarent être attachés à leur logement et 92% s’en disent satisfaits, en hausse de 3 points (91% des Français). Le logement apparaît donc comme un véritable refuge : un espace de stabilité et de réassurance dans un contexte marqué par des crises successives et une incertitude généralisée qui semble s’installer durablement. C’est dans ce cocon que chacun cherche à se protéger, à se reconstruire et à retrouver un sentiment de contrôle sur son quotidien.
L’attachement au logement repose sur une diversité de critères. En France, la plupart de ces critères présentent un équilibre relatif entre importance perçue et niveau de satisfaction. Cependant, certains se distinguent par des écarts significatifs entre ce que les Français jugent essentiel et leur niveau de satisfaction : le prix, le sentiment de sécurité et la performance énergétique.
Face à la hausse des coûts, 59% des Français souhaitent modifier leurs habitudes pour réduire leur consommation d’énergie. L’investissement dans de nouveaux équipements (40%) et a fortiori la réalisation de travaux (42%) sont plus en retrait, signe d’un arbitrage raisonné des efforts. L’Espagne, le Portugal, l’Italie et la Pologne témoignent d’une dynamique plus forte que l’Allemagne, la France, l’Angleterre et la Belgique.
Economie et confort : les moteurs concrets de la rénovation
La pression sur le pouvoir d’achat est généralisée, et elle influence directement les décisions liées à la rénovation du logement. Ainsi, 44% des Français effectuent des travaux de rénovation pour réaliser des économies. Dans le même temps, 47% citent le confort comme principale motivation. Le confort devient donc une priorité essentielle, un confort général, en toutes saisons, face aux fluctuations thermiques et à la qualité de l’air, souvent liée aux systèmes de chauffage.
Dans ce contexte, la conscience écologique comme moteur principal de la rénovation enregistre une baisse significative de 9 points depuis l’an dernier (9% contre 11% en Europe, en recul de 10 points). Ce n’est pas que la dimension environnementale ait disparu, mais plutôt qu’elle semble désormais intégrée et acquise. Les Français sont passés à l’action : ils ont compris l’importance de cette transition, qui ne constitue plus un sujet de débat, mais une réalité incorporée dans leurs choix.
Cinq leviers pour débloquer le passage à l’acte
La rénovation énergétique n'est pas qu'une question de technique ou de financement : c'est un ensemble de leviers, humains, économiques et politiques, qui, mis en cohérence, permettent de passer de l'intention à l'action.
La pédagogie pour combler le déficit d’information
56% des Français estiment ne pas être suffisamment informés sur le coût réel des travaux à prévoir, un chiffre nettement plus élevé que chez nos voisins européens (49%). Mieux informer constitue donc un levier déterminant pour faciliter le passage à l’acte et faire en sorte que la rénovation énergétique cesse d’être une préoccupation abstraite pour devenir une décision concrète et accessible.
L’entourage joue également un rôle décisif dans le passage à l’acte de rénovation : 73% des Français sont influencés par des discussions avec leurs proches. Ils sont, en revanche, moins sensibles aux échanges avec des professionnels (62%). Ce sont les artisans, les installateurs et les acteurs de proximité qui exercent l’influence la plus forte : ils inspirent confiance, car ils incarnent la compétence sur le terrain. Les médias (44%) et les réseaux sociaux (35%) ont, quant à eux, une influence bien plus faible.
Les travaux : la preuve par les résultats
Les travaux de rénovation énergétique fonctionnent, et les Français en ont conscience. 60% de ceux qui ont réalisé des travaux constatent une baisse de leur facture d’énergie, et 75% jugent que cette baisse est à la hauteur de leurs attentes, voire supérieure. Ce sont des chiffres essentiels, car ils ancrent la rénovation dans le concret : un investissement visible, mesurable et rentable.
La valeur du patrimoine : un moteur rationnel
Investir dans la rénovation énergétique, c’est aussi investir dans la valeur de son bien. 87% des Français en sont convaincus : les travaux réalisés dans un logement ont un impact direct sur sa valeur immobilière, mais aussi sur le loyer – qu’ils le paient ou qu’ils le perçoivent. Par conséquent, ils sont 58% à en attendre un retour sur investissement dans un délai inférieur à 5 ans. C’est une logique à la fois économique et écologique : mieux isoler, c’est préserver son confort immédiat tout en consolidant son patrimoine. À long terme, la performance énergétique devient un critère de valorisation à part entière, au même titre que la surface ou la localisation.
Les aides publiques : un levier essentiel
Si seulement 11% des Français connaissent les aides financières existantes et savent comment les obtenir, ces dispositifs jouent pourtant un rôle déterminant. Si elles venaient à disparaître demain, 60% des propriétaires français réduiraient ou renonceraient à leurs travaux. Par ailleurs, 80% des Français ne connaissent pas précisément les réglementations en vigueur. Ces résultats montrent que la transition énergétique n’est pas seulement une affaire de conviction, mais aussi une question d’accès. Sans incitation, la dynamique s’essouffle. Or, avec des dispositifs stables et lisibles, les Français s’engagent. La constance de l’État est donc la condition de la confiance des ménages.
Le financement : l’intégration comme solution
Les deux principaux freins à la rénovation énergétique aujourd’hui sont le coût, particulièrement en France, et la complexité des démarches, souvent vécues comme un véritable parcours du combattant. En réalité, la contrainte financière agit comme l’arbre qui cache la forêt : elle cristallise les abandons, mais masque une série d’autres obstacles tout aussi décisifs. Ainsi, 68% des Français déclarent avoir renoncé à des travaux pour des raisons financières. Mais ce chiffre ne doit pas occulter les 32% qui abandonnent leur projet pour des raisons non financières : lourdeurs administratives (20%), propositions jugées peu rassurantes (18%), pénurie d’artisans qualifiés (15%), ou encore un manque d’information (15%).
Concernant le financement, le crédit, à première vue, reste un mot qui fait peur. 55% des Français ne trouvent pas normal d’y recourir pour financer des travaux de rénovation énergétique. Mais tout change lorsque le financement est intégré au parcours : 55% estiment qu’une solution de crédit proposée directement par l’entreprise réalisant les travaux serait un atout, et 56% apprécieraient qu’une offre de financement soit intégrée au devis. Autrement dit, le frein n’est pas le crédit lui-même, mais la complexité administrative.
Pour Flavien NEUVY, Directeur de l’Observatoire Cetelem : « L’étude montre que la question n’est plus « pourquoi agir ? » mais « comment agir concrètement ? ». Les Européens sont prêts à s’engager dans la transition énergétique, mais leurs décisions demeurent bridées par des contraintes financières et administratives, ainsi que par une exigence de rentabilité rapide. Simplifier les parcours, rendre les aides plus accessibles et mieux informer les ménages apparaissent comme des leviers décisifs pour accélérer la transformation. »
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Méthodologie
L'enquête consommateurs quantitative a été réalisée par Harris Interactive du 19 au 28 mai 2025 dans 8 pays européens : Allemagne, Belgique, Espagne, France, Italie, Pologne, Portugal, Royaume-Uni. Un total de 12.574 personnes ont été interrogées en ligne (CAWI). 3.055 entretiens ont été réalisés en France et plus de 1.300 dans chacun des autres pays. Ces personnes âgées de 18 à 75 ans proviennent d'échantillons nationaux représentatifs de chaque pays. La représentativité de l'échantillon est assurée par la méthode des quotas (sexe, âge, région de résidence et niveau de revenu/CSP).
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