"J'ai été suffisamment critique à l'égard du programme de LFI pour dire que cette annonce nous rassure", a reconnu mardi, à la Rencontre des Entrepreneurs de France (REF) du Medef, le président du mouvement, Patrick Martin.
Le patronat s'inquiétait particulièrement des hausses prévues de fiscalité, ou du projet de porter le SMIC à 1.600 euros par mois, qu'il considérait comme très nuisibles pour les entreprises, ou encore d'une abrogation de la réforme des retraites, souhaitée aussi par le RN.
Tout à la fin de la REF, le président du Medef a aussi tenu à commenter une caricature de l'Opinion le montrant mardi en influenceur autoritaire d'Emmanuel Macron. "On prête au président du Medef une influence sur le président de la République, c'est totalement faux", a-t-il assuré en souriant.
Le nombre d'entreprises et d'emplois se sont multipliés depuis 2017, et le taux de chômage a baissé de deux points, fruit de la politique de l'offre promue par l'exécutif, estime le patronat.
Joints au téléphone par l'AFP, les deux autres présidents d'organisations patronales représentatives étaient sur la même ligne que M. Martin mardi.
Le président de la CPME François Asselin a vu dans l'annonce de l'Elysée "un premier signe positif", tout en considérant qu'il fallait "rester prudent car la partie n'est pas terminée".
Michel Picon, le président de l'U2P, a évoqué pour sa part "une excellente nouvelle". "On ne peut rien reprocher à Lucie Castets (candidate du NFP à Matignon, NDLR) qu'on ne connaît pas, à part d'avoir pris des contacts avec l'ensemble des partenaires sociaux, sauf les organisations patronales", a-t-il lancé.
Premier ministre NFP ou pas, les entreprises, qui balancent en ce moment entre l'élan donné par les Jeux olympiques et une conjoncture assombrie, marquée par une recrudescence des défaillances d'entreprises (63.095 sur un an en juillet, en hausse de 25,2% par rapport à juillet 2023), ont hâte que la situation se stabilise.
"Crise perpétuelle"
Selon une enquête opinionway pour les Chambres de commerce et d'industrie (CCI France), les difficultés à constituer un nouveau gouvernement "auront un impact négatif durable sur la situation économique française" pour 68% des chefs d'entreprises interrogés, et "incitent" 56% d'entre eux "à être plus prudents pour les embauches ou les investissements".
Pour le président de CCI France Alain di Crescenzo, les patrons font preuve en ce moment à la fois de "plus d'optimisme mais aussi de plus de réalisme" car ils constatent que "les affaires sont difficiles par leurs volumes et leurs marges".
Certains, inquiets, sont venus à la REF "pour échanger avec d'autres chefs d'entreprises, voir leur perception du monde", comme Thibaut Antoine-Pollet, président à Aix-en-Provence de Locacoeur, qui installe des matériels de sécurité (défibrillateurs, trousses de secours...) dans les entreprises et collectivités.
Il cherche à s'internationaliser mais ses partenaires étrangers hésitent encore "à prendre des décisions pour plusieurs années" dans le contexte actuel.
"Je m'inquiète des chiffres économiques qui seront publiés en septembre", ajoute M. Antoine-Pollet.
PDG d'Actual à Laval (Mayenne), un des grands groupes français de travail intérimaire, Samuel Tual, également vice-président du Medef, estime voir s'éloigner "une menace" avec la décision de l'Elysée.
Espérant voir revenir "stabilité et visibilité" notamment avec le budget 2025, M. Tual garde de l'optimisme : malgré l'absence actuelle "de cap et de vision", "les entreprises continuent de produire, de travailler, ça fonctionne...".
Même volonté de voir le meilleur côté des choses chez Alexandra Mathiolon, PDG de Serfim (travaux publics, énergies renouvelables...) à Vénissieux (Rhône). Elle s'est habituée depuis 2020 à vivre "dans un monde de crise perpétuelle", et si elle reconnaît "une inquiétude" depuis la dissolution, elle a "gardé le cap" sur ses projets stratégiques, préférant considérer "les nombreux atouts économiques du pays".
Par souci de neutralité politique, Mme Mathiolon ne commente pas les projets du NFP. Elle dit seulement aspirer à un gouvernement qui soit "le plus mesuré possible pour avancer sur les sujets importants".
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