Ces premiers signaux défavorables n’ont fait que se confirmer sur la première partie de l’année 2024 jusqu’à fin août, plongeant l’ensemble du marché des solutions thermiques dans une profonde crise. Ce sont les pompes à chaleur air/eau et les chaudières biomasse qui accusent le plus fort recul, avec -46% et -58% respectivement, et ce malgré les performances énergétiques affichées de ces technologies qui emploient des énergies renouvelables.
Les raisons qui expliquent cette importante chute du marché sont légion.
Le marché de la construction neuve connaît une crise importante avec une baisse significative du nombre de permis de construire déposés. Par ailleurs, avec un pouvoir d’achat des Français fragilisé, le marché de la rénovation a également subi un coup de frein brutal.
Le flou entourant l’octroi des aides liées au dispositif MaPrimeRénov’, suite aux changements successifs intervenus en janvier 2024 avec la restriction des subventions pour les mono gestes, puis leur réintroduction en mai 2024, additionné à de longues semaines d’incertitudes politiques, ont participé à la décroissance du marché du génie climatique.
Outil privilégié de la rénovation du chauffage électrique à Effet Joule, les ventes de PAC air/air ont été elles aussi impactées alors qu’elles avaient plutôt bien résisté jusque-là. La météo du printemps et de l’été 2024 en France a également pu jouer un rôle dans cette décroissance de -15%.
Restant faible en volume, le marché de la géothermie résidentielle repart à la baisse après la légère embellie de 2023.
Le marché du solaire thermique n’est pas épargné avec une nouvelle baisse très marquée de -28% mesurée en surface de capteurs associée et de -35% pour le nombre de systèmes (chauffe-eau solaires individuels et systèmes solaires combinés). Une tendance regrettable pour cette énergie gratuite et décarbonée.
Seules les chaudières gaz de puissance inférieure à 70 kW et les radiateurs à eau tirent leur épingle du jeu sur ce 1er semestre 2024, avec une croissance respective de +17% et + 6%.
Face à l’incertitude du moment et au coût plus élevé des équipements ENR, les Français ont sans doute préféré se tourner vers ces solutions plus traditionnelles.
Face à un marché en berne, les industriels du génie climatique réclament une nouvelle et large concertation avec les pouvoirs publics
À l’occasion du salon Interclima 2024, les industriels du génie climatique – adhérents d’Uniclima – ont souhaité attirer l’attention des pouvoirs publics sur la crise majeure que traverse le secteur du bâtiment¹ et le nécessaire dialogue qu’il convient de rétablir rapidement avec le nouveau gouvernement pour relancer le marché.
L’année 2024 ne sera pas bonne ! Elle est le résultat de ventes qui ont commencé à décrocher à partir de septembre 2023 et ont continué à se dégrader sur les 8 premiers mois de l’année 2024, traduisant à la fois la mauvaise santé de la construction neuve dans le bâtiment puis, à son tour, une rénovation en panne.
Les difficultés proviennent de multiples facteurs liés à une conjoncture macro-économique dégradée d’une part, mais également, dans une large mesure, de la complexité et de l’instabilité des aides publiques mises en place, notamment en ce qui concerne le dispositif MaPrimeRénov’.
Pour les industriels, le pragmatisme doit être de mise sans opposer la rénovation globale et la rénovation par geste, toutes deux indispensables pour atteindre les objectifs de neutralité carbone d’ici 2050. Malgré les assouplissements mis en place à partir de mai 2024, les ventes restent à ce jour en net retrait par rapport à l’année dernière. Le retard accumulé ne sera malheureusement pas compensé. A ce jour, les perspectives pour 2025 restent très incertaines et assujetties aux mesures qui seront décidées par le nouveau gouvernement.
Pour relancer l’activité et reprendre le chemin de la rénovation, les professionnels ont besoin d’une nouvelle et large concertation qui prenne en compte les réalités du terrain. Si la rénovation d’ampleur est efficace à chaque fois qu’elle est possible, elle se heurte néanmoins à des difficultés techniques, financières et organisationnelles. En donnant la priorité à l’isolation thermique complète des bâtiments, ce type de rénovation, bien qu’essentiel, ne permettra pas à lui seul d’atteindre les volumes pour remplir les objectifs ambitieux de la France à l’horizon 2050.
En parallèle, la réalité de terrain a souvent démontré qu’il est tout à fait possible de viser un objectif cohérent grâce à un parcours de rénovation par étapes successives visant le même objectif d’efficacité et de décarbonation global à terme. Cette approche pragmatique permet de réaliser des économies d’énergie et de décarboner massivement, tout en allégeant immédiatement la facture d’énergie des maîtres d’ouvrage et/ou des utilisateurs. Elle est également davantage en adéquation avec la capacité financière des ménages. Les deux dispositifs ont donc vocation à cohabiter pour permettre au plus grand nombre d’entrer dans la transition énergétique.
Par ailleurs, afin de s’adapter à tous les cas de la rénovation, il est nécessaire de maintenir une palette de technologies de production de chauffage et d’eau chaude sanitaire aussi large que possible dès lors que ces solutions sont efficaces énergétiquement et décarbonées. Les solutions les plus avant-gardistes ne sont pas toujours adaptées en termes de mise en œuvre à certaines configurations de bâtiments ou contraintes urbanistiques. Parallèlement, une rénovation ne doit pas s’envisager sans un système de ventilation mécanique indispensable à la santé des occupants, la maîtrise énergétique et la décarbonation du bâtiment ainsi que la durabilité du bâti. Ces systèmes de ventilation sont d’autant plus indispensables qu’une isolation thermique renforcée des bâtiments augmente considérablement son étanchéité à l’air extérieur.
Les différentes technologies de pompes à chaleur sont amenées à tenir un rôle majeur dans la transition énergétique. En complément, la chaleur solaire, les chaudières biomasse, les systèmes hybrides et les combinaisons que permettent l’avènement des biocombustibles ont également un rôle à jouer dans bien des cas.
Dès 2022, les industriels d’Uniclima se sont engagés auprès des pouvoirs publics pour être en capacité de produire 1 million de pompes à chaleur à l’horizon 2030 sur le territoire national ! C’était alors déjà, un véritable défi dans les conditions de marchés favorables du début 2023. En plein cœur de la crise actuelle, contraignant les industriels à réduire leurs dépenses, mettre en place du chômage technique et des réductions d’effectif, cet objectif semble s’éloigner. Ils s’interrogent raisonnablement sur la viabilité des investissements en production qui avaient été alors planifiés. Ce sont plus de 200 M€ d’investissements qui sont en sursis, avec à la clé plus de 1.000 emplois directs. Il sera nécessaire que les marchés retrouvent des perspectives claires et stables sur une période suffisamment longue pour que la confiance se rétablisse et permette d’entrevoir des perspectives rassurantes sur le long terme.
Face à ce constat, les industriels d’Uniclima restent plus que jamais mobilisés en collaboration avec l’ensemble de la filière pour travailler avec le nouveau gouvernement à des solutions collectives dans l’objectif de relancer le marché, rétablir la confiance des professionnels et des ménages et poursuivre l’atteinte de nos objectifs de transition énergétique et de décarbonation des bâtiments.
Consultez également la lettre ouverte au Premier ministre pour demander la prolongation de la période transitoire de MaPrimeRenov au-delà du 1er janvier 2025 co-signée par Uniclima avec 28 autres organisations professionnelles représentatives du bâtiment et de l'immobilier : Lettre ouverte 1er Ministre- Demande de prolongation de la période transitoire MaPrimeRenov’
¹ :
– 20% : nombre de logements commencés sur 12 mois à fin juillet 2024 (août 2023 à juillet 2024) – Source ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires, service des données et études statistiques.
– 44% : nombre de dossiers MPR à fin juin 2024 – source Anah
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