
"La plupart des observateurs vous diront que ce n'est pas possible. Mais moi j'étais, je suis, et je demeure confiant. (...) Je crois qu'il existe un chemin" pour que les partenaires sociaux "se mettent d'accord" mardi, a affirmé le Premier ministre en marge d'un déplacement au salon des nouvelles technologies VivaTech.
Le défi est de taille: le "conclave" doit s'accorder pour rendre moins impopulaire la réforme des retraites Borne de 2023 portant progressivement l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans. Et si possible en rééquilibrant le système des retraites, qui, sans contre-mesure, plongerait dans un déficit chiffré à 6,6 milliards d'euros en 2030, selon la projection du Conseil d'orientation des retraites (COR) dans son rapport annuel adopté jeudi.
Si un accord était trouvé, François Bayrou s'est engagé à le présenter devant le Parlement.
Difficile toutefois de préjuger de ce que donnera la réunion finale: les ressentis différaient jeudi chez les participants encore présents (CFDT, CFTC, CFE-CGC côté syndical, Medef et CPME côté patronal), à l'issue de l'avant-dernière séance de travail.
Chaud et froid
Christelle Thieffinne, représentante de la CFE-CGC, a résumé le chaud et le froid soufflant lors de ce processus entré dans son quatrième mois.
La syndicaliste a commencé par dire que "ça peut aller vite", pour un accord. "Si à un moment donné, il y en a qui lâchent et puis alors on commence à discuter sur ce qui reste".
Mais cette responsable syndicale a ajouté dans la phrase suivante: "la question, c'est toujours la même: est-ce que tous ceux qui sont dans la salle veulent un accord ?".
Pascale Coton, négociatrice de la CFTC, enfonce le clou: "il faut se poser la question, si on est cinq à signer, c'est un vrai engagement; si nous ne sommes que trois à signer (les syndicats), ça ne serait déjà pas du tout la même chose".
La pique vise moins, du côté patronal, la CPME (petites et moyennes entreprises), qui propose toujours des aménagements, que le Medef. La principale organisation patronale est longtemps restée énigmatique sur ses intentions avant d'abattre ses cartes mardi, à une semaine de la clôture du processus lancé en début d'année par François Bayrou après un compromis noué avec les socialistes pour éviter une censure du gouvernement.
"Une blessure"
Le Medef refuse ainsi de toucher au départ à la retraite de 64 ans. Mais se dit prêt à des avancées en termes de pénibilité et de carrière des femmes ayant eu des enfants.
"Tout le monde a compris que l'âge de la retraite à 64 ans, c'était acquis", a même affirmé jeudi Eric Chevée, pour la CPME. Avant d'ajouter, "enfin, non, tant qu'une négociation n'est pas finie...".
Cependant, pour Yvan Ricordeau, négociateur pour la CFDT, "on n'est pas proche d'un accord", notamment parce qu'il n'y a pas eu de "bougé sur l'âge" - une diminution - mercredi et jeudi.
Christelle Thieffinne, représentante de la CFE-CGC, a elle dressé le "constat" que l'âge de la retraite à 64 ans ne serait sans doute pas remis en cause au "conclave". "Ce sera toujours le sujet, une blessure, le conflit de la réforme de la retraite n'est pas clos, ça se fera dans un autre temps", a-t-elle déroulé.
La séance de jeudi a principalement porté sur la pénibilité et l'usure au travail, là où les contreparties du patronat sont attendues face à un âge de départ qui resterait inchangé. "La partie patronale est prête à les reconnaître et en faire la traçabilité, alors qu'avant ils nous disaient que c'était compliqué", a résumé Christelle Thieffinne.
Mais la proposition formulée jeudi par la CPME, autour d'une visite médicale à 59 ans, déterminant "aménagement de fin de carrière, retraite progressive, temps partiel, etc", ne "coche pas toutes les cases" pour la CFDT, rend "inquiète" la CFTC et présente encore des "blocages" pour la CFE-CGC.
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