Logement social : les élus locaux dénoncent le désengagement de l’État

Face à cette position de défiance, les élus locaux lancent un appel solennel à l’État : il est urgent de réinvestir massivement dans la production de logements sociaux. Car derrière les chiffres, ce sont des millions de familles, de jeunes, de travailleurs, de personnes âgées ou en situation de précarité qui attendent, parfois depuis des années, une réponse à un besoin fondamental : se loger dignement.

La crise du logement est désormais structurelle. Entre 2017 et 2024, le nombre de demandeurs de logements sociaux est passé de 2 à 2,8 millions soit 35% d’augmentation en 7 ans. Pour répondre à cette demande croissante, il faudrait construire au moins 200.000 logements sociaux par an. Nous en sommes à moins de la moitié. En parallèle, le nombre d’attributions chute dangereusement : 370.000 en 2023, contre 500.000 il y a dix ans.

Ces chiffres ne sont pas abstraits. Ils traduisent un déséquilibre brutal entre l’offre et la demande, un engorgement de tout le parcours résidentiel, et un sentiment d’abandon qui alimente la défiance à l’égard des institutions.

Dans les territoires, les maires sont au front : ils voient les familles qui attendent un logement, les étudiants qui dorment dans leur voiture, les travailleurs essentiels qui ne peuvent plus habiter près de leur lieu d’emploi. Et ils voient aussi les bailleurs sociaux fragilisés, les opérations de construction ralenties, les projets retardés faute de financements. Ce sont autant de signaux d’alerte qu'ils ne peuvent plus ignorer.

Le logement social est pourtant une fierté française. Un modèle équilibré, solide, reconnu en Europe. Il repose sur un partenariat entre l’État, les collectivités et les bailleurs. Il permet, grâce aux aides à la pierre et à des prêts adaptés, de construire des logements accessibles, durables, bien situés. Il garantit un droit fondamental : celui de se loger. Il fait vivre la mixité sociale. Il soutient l’économie locale et les filières du bâtiment.

Ce modèle est en péril.

Depuis 2018, l’État s’est retiré du Fonds national des aides à la pierre (FNAP), déséquilibrant la gouvernance de la politique du logement social. La réduction de loyer de solidarité (RLS), à hauteur de 1,1 milliard d’euros par an, asphyxie les bailleurs. L’investissement public se réduit, au moment même où la demande explose.

Les collectivités locales, elles, n’ont pas déserté. Les élus continuent à subventionner la construction, à garantir les emprunts, à instruire les dossiers dans le cadre de la délégation des aides à la pierre, souvent sans soutien technique ou financier de l’État. Ils font leur part. Il est temps que l’État fasse la sienne.

Les intercommunalités appellent donc à :

• Un retour immédiat de l’État au sein du FNAP, pour continuer à assurer une gouvernance partagée et efficace ;
• Une programmation pluriannuelle ambitieuse des aides à la pierre, à la hauteur des besoins identifiés dans les territoires ;
• Un choc de production de logements sociaux, véritable plan Marshall pour répondre à l’urgence, soutenir le secteur du bâtiment et garantir le droit au logement.

À défaut d’un engagement fort, structurant et durable de l’État, c’est tout le pacte républicain qui vacille. Le logement social n’est pas une variable d’ajustement : c’est un pilier de la cohésion nationale, un levier pour la justice sociale, et une condition de réussite des transitions que notre pays doit affronter.

Il est temps d’agir.

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