L'emploi salarié souffre de la diminution des aides à l'apprentissage

Selon l'estimation provisoire de l'Institut national de la Statistique, un total de 60.600 emplois ont été détruits sur le trimestre, tandis que les pertes sur un an s'élèvent à 112.100 emplois (-0,5%).

Comparés au même trimestre de 2024, les chiffres du troisième trimestre marquent le quatrième trimestre consécutif de recul "après presque quatre années de hausse", relève l'Insee.

Mais malgré ce retournement du marché du travail, l'emploi salarié en France "excède encore largement son niveau d'avant-crise sanitaire (fin 2019), de 5,2%" soit un million d'emplois supplémentaires.

La baisse du troisième trimestre est due aux deux tiers à celle des contrats en alternance, qui sont dans neuf cas sur dix des contrats d'apprentissage.

"C'est un repli qui était attendu, et qui fait suite à la diminution des aides à l'embauche des apprentis dans le privé, intervenu en février 2025, et dont les effets sont plus massifs en septembre, parce que les entrées en apprentissage sont très concentrées" en début d'année scolaire, a expliqué à l'AFP Yves Jauneau, chef de la division Synthèse et conjoncture du marché du travail de l'Insee.

L'année 2025 a été marquée par une baisse des aides à l'embauche d'un apprenti, passées à 5.000 euros pour les PME et à 2.000 euros pour les entreprises plus importantes, contre 6.000 euros auparavant.

Profitant des aides publiques, le nombre d'apprentis en France est passé de 430.000 en 2017 à plus d'un million en 2023, tandis que l'apprentissage s'est massivement ouvert aux étudiants du supérieur et au secteur des services.

"Baisse anticipée"

"La baisse du nombre d'emplois salariés reste modérée et était anticipée, dans un contexte économique et politique incertain, notamment pour l'alternance", a estimé le ministère du Travail dans un message à l'AFP.

"La situation globale demeure stable et témoigne de la solidité de notre marché du travail, en particulier dans l'industrie", se félicite le ministère, alors que les pertes d'emplois dans ce secteur ont été limitées à 3.200 au troisième trimestre, soit -0,1%.

Le tertiaire marchand compte pour la plus grosse part de la baisse du niveau de l'emploi, avec 38.300 emplois perdus, soit -0,3%, tandis que l'agriculture a proportionnellement le plus souffert avec -1,6%, soit 5.000 emplois de moins.

Ces chiffres font état "d'un rattrapage de productivité peut-être plus rapide que ce qu'on anticipait", décrypte Eric Heyer, directeur du département Analyse et prévisions de l'OFCE.

Etant donné que la croissance du secteur marchand a été de 0,6% au troisième trimestre, si l'emploi diminue de 0,3%, cela signifie que "sur un trimestre, la productivité des salariés a augmenté de 0,9%, ce qui est gigantesque", calcule l'économiste selon lequel l'économie française est sur une trajectoire de 1,2% à 1,3% de gains annuels de productivité.

"On va avoir une productivité qui accélère avec une activité qui décélère. Ca ne peut que provoquer des destructions d'emplois" surtout dans un contexte de diminution des aides publiques à l'emploi, prédit Eric Heyer qui note aussi un point "positif, c'est que ces gains de productivité, ça va permettre aux entreprises de distribuer du pouvoir d'achat à ceux qui restent en place".

Le nombre de chômeurs inscrits à France Travail a augmenté de 1,6% au troisième trimestre, des chiffres qui cependant tiennent compte de l'inscription automatique des allocataires du RSA et de moindres radiations du fait d'un nouveau régime de sanctions.