Maintenant que la loi travail est officiellement promulguée, de nombreuses questions se posent, nous vous proposons quelques réponses pour y voir plus clair.
Quand va-t-elle réellement entrer en application ?
Un "grand nombre" de décrets d'application doivent être "publiés avant fin octobre et la quasi-totalité avant la fin de l'année", a promis la ministre du Travail, Myriam El Khomri.
La primauté de l'accord d'entreprise sur la convention de branche en matière de durée du travail, "philosophie" du texte, nécessite plusieurs décrets en Conseil d'Etat, qui "seront publiés entre octobre et décembre", selon le ministère.
Ceux concernant le compte personnel d'activité (CPA), qui regroupera dès janvier les comptes formation, pénibilité et "engagement citoyen", sont attendus "dès le mois d'octobre".
La règle de l'accord majoritaire (nécessitant la signature de syndicats représentant plus de 50% des salariés, au lieu de 30%), avec possibilité de référendum d'entreprise en cas de blocage, s'appliquera également dès 2017 sur les sujets relatifs au temps de travail, puis en septembre 2019 dans les autres domaines.
Les accords "offensifs", qui permettront aux entreprises d'ajuster leur organisation pour "préserver ou développer l'emploi", requièrent également plusieurs décrets, qui doivent notamment préciser comment un salarié pourra être licencié s'il refuse une modification de son contrat de travail.
Quant à la réforme des licenciements économiques (critères précisés selon la taille de l'entreprise), elle doit entrer en vigueur en décembre, sans qu'aucun décret ne soit requis.
Enfin, concernant la médecine du travail, la publication des décrets, "envisagée en décembre 2016-janvier 2017", nécessitera des concertations "approfondies avec les partenaires sociaux".
Les opposants peuvent-ils encore faire tomber le texte ?
L'intersyndicale anti-loi travail refuse d'enterrer la hache de guerre, promettant un combat sur deux fronts. Il se fera d'une part dans la rue puisque les opposants, après avoir défilé 12 fois depuis mars, appellent à une nouvelle mobilisation le 15 septembre.
En parallèle, ils promettent des "batailles juridiques". Si le Conseil constitutionnel a donné son feu vert à la loi - malgré la censure de cinq mesures secondaires -, les Sages ne se sont pas prononcés sur les articles les plus contestés. Les opposants menacent de les attaquer en posant des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC). Ils ne pourront toutefois le faire que dans le cadre de procès en lien avec ces mesures, en les faisant porter par des justiciables.
Du côté du Parlement, les élus socialistes frondeurs ne comptent pas désarmer non plus. "Une loi est faite, elle peut être défaite", a averti la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann.
Les opposants aiment rappeler le précédent du contrat première embauche (CPE) en 2006, adopté puis abrogé face à une mobilisation massive de la rue.
Quel impact sur l'emploi ?
Selon l'économiste Stéphane Carcillo (OCDE), deux mesures peuvent avoir un effet "à relativement court terme, y compris dans l'année qui vient": la réforme des licenciements économiques et les accords "offensifs".
"On voit l'emploi réagir assez fortement à ces dispositions en Espagne et en Italie", assure-t-il à l'AFP. La clarification des règles de licenciement économique, notamment, "est de nature à changer le fonctionnement du marché du travail en faveur du CDI et au détriment du CDD".
Mais, selon M. Carcillo, l'impact sur l'emploi est "très difficile à quantifier".
L'économiste est moins optimiste concernant la primauté des accords d'entreprise, colonne vertébrale du texte selon le gouvernement.
"Cela met de la souplesse dans un système très compliqué, mais je ne suis pas sûr que ce soit de nature à avoir un impact très fort sur l'emploi à court terme", développe-t-il, d'autant que "les accords seront plus difficiles à signer" avec l'avènement du principe majoritaire.
De son côté, Philippe Waechter (Natixis) n'exclut pas un effet de cette mesure. "C'est à ce niveau que les créations d'emplois pourraient s'observer", mais "cela dépendra grandement de la conjoncture économique".
Mais, même si la croissance accélère, l'économiste craint que "l'arbitrage se fasse en faveur des salariés en place plutôt que par une hausse de l'emploi". "Cette loi n'est qu'un premier pas", prévient-il.
travail-emploi.gouv.fr