Le contexte : l’utilisation exponentielle de la main d’œuvre détachée sur les chantiers de construction
Les entreprises de l'Industrie du Béton ont subi depuis 2008 les effets d'une crise sans précédent, avec une perte moyenne de chiffre d'affaires de l'ordre de 30 % sur 9 ans. À cette baisse d'activité, se sont greffées les conséquences de l'utilisation de la main d'œuvre détachée sur les chantiers. C'est la raison pour laquelle la Fédération de l'Industrie du Béton a rédigé une note de position, pour interpeller les pouvoirs publics, reprenant :
- les impacts liés à la main d'œuvre détachée, notamment ceux portant sur les choix entre systèmes constructifs, la capacité d'innovation des entreprises de l’Industrie du Béton, la qualité des produits mis sur le marché provenant de pays européens et la sécurité sur chantiers.
- ses demandes formulées auprès des pouvoirs publics portant en particulier sur l'augmentation des fréquences des contrôles sur chantiers et la vérification des offres "anormalement basses" reçues dans le cadre des marchés publics.
L’objectif : préserver la compétitivité des entreprises françaises et consolider leur savoir-faire au sein de l’Europe
À l'heure où les enjeux liés à la réindustrialisation des territoires et à la consolidation d'un tissu de PME dynamiques au plus près des marchés constituent des leviers importants pour accompagner la reprise du secteur de la construction, il est important que les pouvoirs publics défendent un principe d'équité dans l'emploi des salariés, entre travailleurs détachés et salariés nationaux, pour préserver ainsi la compétitivité des entreprises françaises et consolider leur savoir-faire au sein de l'Europe.
Le constat : 10 fois plus de travailleurs détachés en 10 ans, dont la majeure partie employée dans le secteur de la construction
Selon la Commission européenne, près de 2 millions de salariés étaient dans une situation de travailleurs détachés soit une progression de près de 50 % entre 2010 et 2014. Selon des données provisoires transmises à la Commission nationale de lutte contre le travail illégal CNLTI) publiées en mai dernier, ils sont 286 025 à avoir été déclarés à l'administration française en 2015, soit une progression de 25 % par rapport à l’année précédente, dont la majeure partie employée dans le secteur de la construction. Ils étaient 26 466 en 2005, soit dix fois moins !
Les conséquences : en termes d’économie, d’emploi, de qualité, de sécurité et d’environnement
Parmi les multiples conséquences de l’utilisation de la main d'œuvre détachée, notons qu’elle concerne très souvent des emplois peu qualifiés, catégorie où il est le plus difficile de créer de l'emploi en France aujourd'hui, qu’elle a aggravé la perte d'emplois pendant la crise du secteur du BTP et fait que le rebond actuel de l’activité ne se traduit pas par une augmentation des recrutements, qu’elle met en difficulté, voire fait disparaître, des petites et moyennes entreprises et des artisans, travaillant souvent en sous-traitance sur les tâches qui leur ont été confiées, que la richesse économique qu’elle génère ne bénéficie que très peu à l’économie française, qu’elle impacte le choix entre les systèmes constructifs et affecte l'innovation, la qualité et la sécurité, qu’elle fait disparaître des savoir-faire maîtrisés par des salariés locaux, qu’elle augmente le risque d’accidents sur les chantiers...
La requête de la Fédération de l’Industrie du Béton (FIB)
La FIB demande aux pouvoirs publics que :
- Les conditions sociales applicables aux travailleurs détachés dans les pays européens respectent les règles sociales du pays (niveau de rémunération, de charges sociales, salariales et patronales, d’horaires de travail et de repos hebdomadaires) et les règles de sécurité au travail.
- Des contrôles plus fréquents soient opérés sur les chantiers (vérification du respect des formalités, des conditions de travail et de sécurité, des amplitudes des horaires et du nombre hebdomadaire de jours ouvrés). Comme l’a précisé Clotilde Valter, secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle : depuis juillet 2015, plus de 840 amendes administratives ont été distribués et depuis début 2016, plus de 30 chantiers ont été arrêtés.
- Les marchés publics et les conditions d’attribution respectent la législation, notamment que les offres soient vérifiées systématiquement, au regard des niveaux de prix dits « anormalement bas ». Pour cela, la FIB recommande que les économistes de la construction estiment les prix non plus à partir de prix récemment observés, mais fondent leurs estimations sur des prix de revient respectueux du droit et du modèle social français autant que de la nécessité de préserver une marge minimale.
- Dans le cadre des marchés publics, les besoins et prestations qui font l’objet du marché soient définis en recourant à des spécifications techniques précises, formulées dans les CCTP (Cahiers des Clauses Techniques Particulières) ou dans des documents plus généraux, dans lesquels sont cités expressément les normes produits.