"Un logement sur quatre ne sert plus à loger des Parisiens", s'alarme auprès de l'AFP Ian Brossat, adjoint communiste au logement de la Ville de Paris et chef de file du PCF aux élections européennes.
Autre constat: en 2014, selon l'Insee, Paris comptait "environ 107.000 logements secondaires sur 1,1 million de logements à Paris", rappelle l'élu qui demande également aux législateurs d'"interdire l'achat de résidence secondaire à Paris".
"Est-ce qu'on veut que Paris soit une ville accessible aux classes moyennes ou une cour de récréation pour des milliardaires saoudiens ou américains ?", s'interroge M. Brossat. Pour l'adopter, l'adjoint au logement - dont les propositions n'engagent pas la mairie de Paris - estime que la loi pourrait s'inspirer d'une autre mesure existante: "la surtaxe à 60% de la taxe d'habitation, pour les personnes qui ont une résidence secondaire dans la capitale".
En guerre depuis plusieurs années contre le géant américain, Ian Brossat propose également d'"interdire la location d'appartements entiers via Airbnb dans les quatre premiers arrondissements parisiens (Ier, IIe, IIIe et IVe)", situés à proximité des sites touristiques de Notre-Dame-de-Paris, du Louvre ou de l'Opéra.
"Un Parisien sur cinq utilise aujourd'hui Airbnb pour améliorer ses revenus et faire face au coût de la vie", se défend dans un communiqué transmis à l'AFP la société, qui accuse l'élu d'"offrir une nouvelle tribune aux arguments de lobbies hôteliers".
Comme pour les autres mesures restrictives mises en oeuvre en 2017 (limitation des locations à 120 jours par an et par logement, et obligation d'avoir un numéro d'enregistrement), ces propositions supposent un changement législatif, que l'élu espère obtenir lors des débats sur la loi logement Elan, à l'automne.
Pas de respect
Pour Ian Brossat, "si on ne fait rien dans le centre, il n'y aura plus d'habitant: comme sur l'île Saint-Louis, on va finir par avoir un nombre d'habitants en déclin, des commerces de bouche transformés en boutique de fringues ou de souvenirs", prévient-il.
"Ils arrivent avec plein de bagages et chargent les ascenseurs. Ils dégradent les parties communes", regrette Irène, 42 ans, habitante dans le Ier arrondissement, ciblant des touristes qui "ne respectent pas la vie de l'immeuble" sans compter les "jeunes qui viennent pour faire la fête".
Au travail, "je parle plus anglais que français", explique à l'AFP Sabrina, jeune serveuse au coeur de la capitale. En face de son établissement, elle pointe un immeuble chic de l'île de la Cité, où "le propriétaire loue les appartements entre 200 et 400 euros environ sur des plateformes comme Airbnb".
Même si "les commerçants ne sont pas mécontents" d'une clientèle souvent américaine qui dîne sur place, il n'en reste pas moins que "plus les touristes sont discrets avec leurs valises (dans la rue) mieux c'est", estime-t-elle.
Amanda, touriste canadienne qui a loué un logement à deux pas de la Tour Eiffel, peut "comprendre que ça pose problème s'il y a trop de locataires Airbnb, et que cela change l'esprit d'un quartier".
Berlin, Barcelone, Amsterdam... De plus en plus de villes dans le monde accusent Airbnb d'accentuer la crise du logement en incitant les propriétaires à louer à des visiteurs de passage plutôt qu'à ses résidents permanents. En août, la ville de New York a pris un arrêté obligeant la plateforme à communiquer à la mairie la liste des transactions effectuées pour des logements dans la ville.
Dix ans après sa naissance, Airbnb, société avare en informations financières mais estimée à 31 milliards de dollars, selon un calcul réalisé à l'occasion d'une levée de fonds au printemps 2017, propose près de 5 millions de logements, dans 81.000 villes de près de 200 pays. Avec 60.000 logements à louer, Paris représente son premier marché.