Privée de touristes depuis déjà sept mois et confrontée au casse-tête d'un chantier de peinture suspendu en raison de traces de plomb supérieures au seuil réglementaire, la Dame de Fer vit une "période difficile à traverser", reconnaît le président de sa société d'exploitation (Sete) Jean-François Martins dans un entretien à l'AFP jeudi.
Malgré les efforts pour "réduire les coûts fixes" et un recours massif au chômage partiel chez ses 350 employés, l'exploitant projette pour 2021 une perte d'environ 70 millions d'euros, après avoir annoncé en mars un déficit de 52 millions au titre de 2020. Année où son chiffre d'affaires a fondu, passant de 99 à 25 millions d'euros, toujours selon la Sete.
Pour autant, l'exploitant n'a "pas d'inquiétude à long terme" et exclut toute menace sur l'emploi. "Le soutien plein et entier de notre actionnaire" principal, la Ville de Paris, "va nous permettre de passer la période", assure M. Martins. "Cela prendra forcément la forme d'une recapitalisation" dès l'automne, a-t-il annoncé, les deux déficits consécutifs n'étant "pas absorbables sur les fonds propres".
"Aucune aide" de l'État
A cet sujet, M. Martins, élu PS au Conseil de Paris, tacle le gouvernement: "le monument qui incarne la France dans le monde, qui perd 120 millions sur deux ans, n'a fait de l'objet de la part de l'État d'aucune aide spécifique ou exceptionnelle."
Le célèbre monument, qui a accueilli jusqu'à 7 millions de visiteurs en 2014 et encore 6,2 millions en 2019, a dû fermer de mi-mars à fin juin 2020, lors du premier confinement, puis de nouveau à partir de fin octobre.
Âgée de 132 ans, la "grande dame" devra donc encore attendre quelques semaines avant de retrouver du public. "Le temps nécessaire pour se remettre en ordre et en fonction", en particulier les ascenseurs, explique M. Martins, mais aussi de "libérer les espaces pris par le chantier de peinture", suspendu.
La capacité d'accueil sera cet été de 10.000 visiteurs par jour, soit le même niveau de fréquentation qu'à l'été 2020, contre 25.000 avant crise. Les doubles cabines pouvant accueillir 50 personnes chacune fonctionneront avec une jauge de 50% pour respecter la distanciation sociale.
La billetterie rouvrira le 1er juin, la Sete misant sur deux tiers de réservations en ligne. La vente physique des billets aux pieds du monument restera possible à la réouverture.
L'ensemble des étages seront accessibles au public, hormis quelques zones de chantier, notamment au deuxième étage.
Écailles plombées
Suspendu depuis début février en raison de traces de plomb supérieures au seuil réglementaire, le chantier de peinture en cours ne reprendra pas avant l'automne, le temps de terminer les études et de choisir parmi les techniques "les moins émissives de plomb", a expliqué M. Martins.
Pour la 20e campagne de peinture, qui doit permettre à la Dame de Fer de faire peau neuve pour les JO de 2024, il avait été choisi de retirer les couches de peinture détériorées de près de 30% de la surface de l'édifice, là où les campagnes précédentes n'en prévoyaient que 5%, afin "d'améliorer l'adhérence de la peinture sur la structure". C'est ce décapage qui a fait ressortir, sur le site, la présence de plomb présent dans les couches précédentes.
Le chantier à l'arrêt, la Sete exclut tout risque de contamination au plomb pour les visiteurs. Au moment de la réouverture, "la tour aura été entièrement dépolluée, nettoyée", souligne M. Martins pour qui "les autorités sanitaires sont garantes" avec 70 prélèvements réalisés par semaine.
Visibles de loin, les filets qui récupèrent les écailles de peinture seront enlevés progressivement. Le prochain défi de la Sete sera de "réimaginer comment faire venir les visiteurs malgré les différents chantiers en cours".