"On a une proposition pour trois ans qui a le mérite d'une certaine stabilité", a résumé à l'AFP Marianne Louis, directrice générale de l'Union sociale pour l'habitat (USH), confédération du monde HLM, à la sortie lundi d'une réunion à Matignon.
"On retourne sur 950 millions" d'économies annuelles, contre 1,5 milliard d'euros prévus jusqu'ici, à partir de 2020, a-t-elle détaillé. "C'est un verre à moitié vide, à moitié plein."
Signe du caractère crucial de cette réunion concluant plusieurs semaines de négociations, non seulement le chef du gouvernement, Edouard Philippe, mais aussi le ministre du Logement, Julien Denormandie, sa ministre de tutelle à la Cohésion des Territoires, Jacqueline Gourault, et le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin, étaient présents.
Alors que le président Emmanuel Macron doit plus largement dévoiler lundi soir ses réponses au grand débat et à la crise des "gilets jaunes", la proposition du gouvernement marque la première inflexion de sa politique en matière de logement social, un secteur auquel il demande d'importantes économies depuis le début du quinquennat.
Elles passent surtout par une réduction organisée des loyers afin de compenser une baisse des aides au logement (APL) versées aux locataires. Cette mesure, mise en oeuvre de manière progressive, devait initialement prendre pleinement effet à partir de 2020 avec 1,5 milliard d'euros d'économies totales.
Les bailleurs sociaux ont régulièrement mis en garde sur les conséquences, évoquant en premier lieu une baisse drastique de la construction de HLM. En 2018, le nombre d'agréments n'a qu'un peu baissé, mais les acteurs du secteur assurent que les vrais effets vont se faire sentir les prochaines années.
Témoin du niveau réel de la construction à venir, les prêts octroyés par la Caisse des dépôts, bras financier de l'Etat et principal financeur du secteur via notamment l'argent du livret A, ont reculé de plus d'un cinquième l'an dernier.
L'argument a d'autant plus de poids qu'il est confronté à un repli plus général de la construction de logements depuis l'an dernier, alors même que M. Macron avait promis un "choc d'offre".
Blocage sur la TVA
Dans ce contexte, "l'Etat propose un dispositif qui permet pendant trois ans d'avoir un prélèvement sur l'exploitation des organismes fixé à 950 millions", a détaillé Mme Louis.
Les propositions du gouvernement jouent essentiellement sur deux tableaux pour réduire la note des bailleurs sociaux sur les trois dernières années du quinquennat. D'abord, la réduction des loyers elle-même serait abaissée à 1,3 milliard d'euros par an.
Parallèlement, la contribution des organismes au Fonds national des aides à la pierre (FNAP), établissement public qui contribue à l'entretien du parc social, serait drastiquement diminuée de 300 millions par an, soit la plus grosse partie de son montant actuel.
Reste un point encore loin d'être tranché alors qu'il constitue l'autre grand volet des négociations budgétaires: le niveau de la TVA préférentielle accordée au secteur sur ses travaux de construction.
Avant le quinquennat, celle-ci était à 5,5%, mais le gouvernement l'a montée à 10%. Cette mesure, qui représente un coût annuel d'environ 700 millions d'euros, ne devait théoriquement durer que jusqu'à la fin 2019, mais le gouvernement compte la pérenniser partiellement.
"La TVA reste un sujet de débats", a admis Mme Louis, alors que l'USH doit se prononcer officiellement le 24 avril sur les propositions gouvernementales, à l'occasion de son comité exécutif.
D'un côté, le gouvernement est prêt à remettre une TVA à 5,5% pour les logements "très sociaux" et, de l'autre, les bailleurs HLM sont prêts à accepter qu'elle reste à 10% pour les logements les plus hauts de gamme.
C'est sur la troisième tranche, celle du milieu de tableau qui constitue près de la moitié de la construction de HLM, que demeurent les désaccords.
"On va essayer d'améliorer au maximum avec Julien Denormandie et on prendra position le mercredi 24", a conclu Mme Louis.