Les autorités se veulent pourtant rassurantes, jugeant improbables des scènes de voyageurs agglutinés dans des coursives en attendant la vérification de leurs documents, un cauchemar pour les agoraphobes, maniaques des microbes et autres angoissés du voyage aérien.
Jusqu'ici, malgré les progrès des campagnes de vaccination et le reflux des contaminations dans la plupart des pays européens, les mesures de contrôle strictes instaurées pour tenter de juguler la pandémie restent en place, à commencer par les certificats sanitaires.
8 heures dans l'aéroport?
Conséquence, le temps passé par les voyageurs dans les aéroports (enregistrement, sécurité, contrôle aux frontières, douane et récupération des bagages) a doublé entre 2019 et 2021, passant d'1h30 à 3h00 en moyenne "alors que les volumes de voyageurs ne représentent qu'environ 30% de ceux d'avant le Covid-19", a affirmé la semaine dernière l'Association internationale du transport aérien (Iata).
L'organisation, qui défend les intérêts des compagnies, a agité le spectre de temps de passage totaux portés à 5 heures et trente minutes si la fréquentation revient à 75% des niveaux de 2019 et "si les processus ne s'améliorent pas". A 100%, ils seraient... de 8 heures.
Une estimation a priori peu probable toutefois, puisque la branche européenne du Conseil international des aéroports (ACI Europe) prévoit 125 millions de voyageurs aériens en août, soit 48% du niveau du même mois de 2019.
L'Organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne (Eurocontrol), de son côté, prédit entre 46% et 69% du trafic aérien de 2019 en août, selon l'évolution de la crise sanitaire, avec un niveau médian à 57%.
Les risques d'engorgement sont censés être atténués grâce au certificat numérique Covid, qui doit être instauré pour les déplacements au sein de l'UE cet été.
Mais le transport aérien redoute une harmonisation imparfaite. Déjà, observe un professionnel du secteur, les mesures supplémentaires de sécurité sanitaire "ont effacé des années de progrès" en matière de gestion des flux, obtenus grâce à la dématérialisation des billets, aux enregistrements en ligne ou aux systèmes automatisés de contrôle de l'identité.
Pif et Paf
Depuis le début de la pandémie, les identités sont systématiquement vérifiées à l'arrivée, en France par la Police aux frontières (Paf), même pour les passagers de l'espace Schengen, et les sas automatiques ont été fermés.
Les gestionnaires d'aéroports font le maximum pour fluidifier les cheminements de leurs clients, en particulier aux "Points d'inspection filtrage" (Pif) qui détectent objets et liquides potentiellement dangereux. Mais le contrôle aux frontières reste une mission régalienne.
"Ce qui est en haut de ma pile de préoccupations, c'est la discussion avec le ministère de l'Intérieur pour éviter que cet été ne soit une apocalypse de temps d'attente pour les passagers", a affirmé le 18 mai le PDG du gestionnaire des aéroports parisiens ADP, Augustin de Romanet.
Les vérifications de certificats de tests, de formulaires de localisation de passagers, de documents de quarantaine "varient selon les points de départ et d'arrivée, sur la base de règles qui sont encore largement différentes et instables dans toute l'Europe", s'est alarmée lundi ACI Europe, qui fédère 500 aéroports du continent.
"Le niveau d'incertitude et de complexité pour planifier un redémarrage reste hallucinant", a prévenu son directeur général Olivier Jankovec, pour qui "chaque jour qui passe rend plus réelle la perspective de voir les voyageurs subir un chaos de grande ampleur".
"Il va y avoir des allègements sur certains types de mesures (...) C'est le sens du passe sanitaire européen, qui va permettre de voyager et de supprimer toute la phase de contrôle sanitaire sur les trois quarts des vols", rassure une source aéroportuaire française sous couvert d'anonymat.
"Vu le volume de passagers, qui n'est pas énorme, et qu'il n'y a pas beaucoup d'aérogares ouverts, ça ne devrait pas poser problème (de gérer les flux, NDLR)", poursuit cette source, selon laquelle "ADP et les compagnies tirent la sonnette d'alarme pour mettre la pression sur l'État français (afin) qu'il allège les mesures sanitaires", l'enjeu étant aussi "économique" face à la concurrence des autres aéroports européens.