La société Altares, experte de l'information sur les entreprises, partenaire exclusif en France, au Benelux et au Maghreb de Dun & Bradstreet, 1er réseau international d'informations BtoB, présente son étude sur les défaillances d'entreprises en France : analyse du 3e trimestre 2019.
« Le nombre de défaillances d'entreprises bute chaque été sur le seuil des 10.000 procédures. Mais avec 10 500 jugements prononcés, ce 3e trimestre est le meilleur depuis celui de 2007 (10 300). En tendance, cela représente une baisse de 9,2%. Un recul important, mais le 3e trimestre 2018 avait été alourdi par une exceptionnelle extension de procédure de redressement judiciaire prononcée en août par le Tribunal Mixte de Commerce de Saint-Denis de la Réunion sur près de 350 sociétés. Corrigée de cette décision technique, l'évolution nationale demeure favorable mais est ramenée à -6,4%. » note Thierry Millon, Directeur des études Altares.
« Les trois quarts des jugements concernent des micro-entreprises de moins de trois salariés, mais 73 sociétés de plus de 50 salariés sont également passées devant le tribunal ce trimestre, soit plus d'une défaillance de grandes PME enregistrée chaque jour ouvré. Cette accélération de la sinistralité des PME pèse lourdement sur l'emploi. Prés de 37.300 emplois sont ainsi menacés, parfois déjà perdus, c'est 2.350 de plus par rapport à l'été 2018. »
Un fort recul des liquidations directes
Le compteur estival des défaillances d'entreprises n'est jamais retombé sous le seuil des 10.000 procédures depuis 2006 (9907 jugements), mais l'été 2019 s'en approche (10.501). C'est le meilleur 3e trimestre depuis 2007 (10.305).
La procédure de Redressement Judiciaire (RJ) s'inscrit en fort recul (-12,2%) ; toutefois, corrigée des 348 RJ exceptionnels prononcés à la Réunion en août 2018, la baisse serait ramenée à -2,6%.
A peine plus de 200 jugements de sauvegarde ont été enregistrés sur la période, soit moins de 2% de l'ensemble des procédures collectives.
C'est du côté des liquidations judiciaires que le signal est le plus marqué ce 3e trimestre avec une baisse de 8%, en écho à la moindre sinistralité des TPE.
Le tiers des emplois menacés se concentre sur les seules défaillances de PME d'au moins 50 salariés
Durant l'été 2014, nous comptions 13.400 défaillances qui menaçaient alors 56.400 emplois ; cinq ans plus tard nous enregistrons 3.000 défaillances de moins et plus de 19.000 emplois épargnés. Une remarquable amélioration. Cependant, sur un an, la trajectoire s'inverse sévèrement. En dépit de près d'un millier de procédures en moins, ce sont 2.350 emplois de plus qui sont menacés par les défaillances d'entreprises, par rapport à l'été 2018.
Ce retournement sur le front de l'emploi tient à la distribution des entreprises qui sont tombées.
On enregistre -8% ou -4% de micro entreprises de moins de trois salariés, entrées en défaillance, selon que nous corrigeons ou non les valeurs 2018 des 348 redressements réunionnais atypiques. Mais +30% pour les sociétés comptant au moins 50 salariés ; 73 PME de cette taille sont entrées en procédure ce 3e trimestre contre 56 un an plus tôt. A elles seules, ces 73 PME concentrent près du tiers des emplois menacés (11.600).
Entre les très petites structures et les grandes PME, la situation est globalement stable pour les entreprises de 20 à 46 salariés (196 défaillances contre 202), et franchement bonne pour celles de 3 à 19 salariés (2392 ; - 14%).
Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte-d'Azur dans le rouge
Cet été 2019 remet les pendules à l'heure. Les régions qui étaient dans le vert il y a un an basculent dans le rouge et inversement.
Il en est ainsi d'Auvergne-Rhône-Alpes (AURA) et Provence-Alpes-Côte-d'Azur (PACA) dont les défaillances, en baisse durant l'été 2018, augmentent cette année respectivement de 4% et 5,5%. A noter que dans chacune de ces deux régions, la construction pèse sur la tendance.
La Bourgogne-Franche-Comté stabilise, comme durant l'été 2018, le nombre de ses défaillances d'entreprises à 425.
Pays-de-la-Loire maintient une baisse de sinistralité à -5% comme l'été précédent. Cette stabilité masque une forte baisse des liquidations, mais une accélération des redressements judiciaires.
L'Ile-de-France s'inscrit sur une bonne trajectoire (-9%) après la hausse de 5% il y a un an.
Toutes les autres régions sont favorablement orientées ce 3e trimestre. Les fortes dégradations observées l'année dernière sont quasi rattrapées cette année. C'est le cas de la Corse (+33% au T3 2018, -29% au T3 2019), du Grand Est (+16% ; -12%), de la Normandie (+13% ; -20%) ou des Hauts-de-France (+11% ; -8%).
Maisons individuelles et transport de fret interurbain signent de mauvais chiffres
En augmentation il y a un an (+2,7%), le nombre des défaillances d'entreprises de la construction (2536) enregistre un recul sensible cet été (-8%). Le second œuvre (-13,7%) et les travaux publics (-13,2%) tirent la tendance sectorielle. En revanche, la situation est plus inconfortable pour le gros œuvre qui peine à rester dans le vert (-1,2%) ; si les liquidations reculent de 9%, les redressements judiciaires explosent de plus de 20%. C'est la construction de maisons individuelles qui signe la plus forte dégradation avec près de 180 défaillances (+19%), le plus mauvais chiffre depuis quatre ans.
Le commerce, deuxième poste de défaillances (2369), est bien orienté (-5,8%). Si le commerce automobile reste sous pression (+2%), le poste Entretien et réparation évolue très favorablement (-19%). Dans les métiers de bouche, la boucherie respire (-23%) après trois étés difficiles. Dans le commerce de détail, le meuble (-11%) limite la dégradation de l'activité bricolage & équipement du foyer (+3,3%). L'habillement (+3,6%) peine à confirmer les bons chiffres de l'été 2018, mais conserve un niveau de défaillances (230) très inférieur à celui des étés 2014 à 2016 (330). Le commerce interentreprises (gros), globalement dans le vert, est en situation très délicate dans les matériaux de construction (+40,5%) qui remontent au niveau de sinistres de l'été 2015.
L'industrie s'inscrit sur une tendance solide (-8,2%) portée par l'agroalimentaire (-19,5%) tandis que la manufacture donne plusieurs signes de tensions.
Dans les services aux entreprises, la sinistralité semble reculer rapidement (-19,7%) en réalité la tendance est brouillée par le chiffre des autres services administratifs aux entreprises qui comptabilisaient, sur le 3e trimestre 2018, les 348 jugements exceptionnels à la Réunion dans la location - location bail. Corrigée de cette décision particulière, l'évolution des défaillances d'entreprises bascule légèrement dans le rouge (+0,7%). C'est en conseil en communication et gestion que les chiffres s'affolent (+33%). Plus précisément, l'activité de conseil pour les affaires et autres conseils de gestion dérapent de 36% et dénombrent plus de 200 défaillances, le plus mauvais chiffre depuis l'été 2014. La situation est également tendue pour les relations publiques, les activités d'architecture ou le nettoyage courant des bâtiments.
En Information & communication, les défaillances d'entreprises augmentent très vite (+16,6%), à la fois pour les services informatiques & édition de logiciels (+8,4%), notamment en programmation informatique, et pour les autres activités information & communication (+31,5%) notamment dans la production de films.
Dans le transport routier de marchandises, le nombre de défaillances d'entreprises recule rapidement (-25%) dans le fret de proximité, mais augmente sensiblement dans le fret interurbain (+8%) qui signe l'été le plus sinistré (90) depuis dix ans.
Le nombre de procédures collectives baisse sensiblement dans les services à destination du consommateur (-14%) ou en restauration (-11%), en particulier en restauration traditionnelle (-11%) qui s'améliore régulièrement chaque été depuis quatre ans, alors que la restauration rapide (-8%) avait connu un très mauvais été 2018.
Des réalités entrepreneuriales encore compliquées !
« Dans un contexte international très chahuté, la France a bien résisté sur ce troisième trimestre. Pourtant, la fin de l'année reste encore très incertaine pour de nombreux acteurs. Le dernier trimestre porte les espoirs d'une consommation plus soutenue, notamment à destination des commerçants physiques dont la trésorerie demeure la préoccupation première des dirigeants. Les PME sont également très attentives à leur niveau de trésorerie dans un contexte de dégradation des comportements de paiement depuis le printemps. Au-delà des grandes PME contraintes de déposer le bilan, une douzaine de sociétés de plus de 100 salariés ont obtenu un accord de conciliation cet été. Ces sociétés, non comptabilisées parmi les défaillances, portent 2 650 emplois. La bonne tendance observée ce trimestre sur le front des défaillances ne doit donc pas masquer des réalités entrepreneuriales encore compliquées. Le dernier trimestre de l'année pourrait comptabiliser plus de 14 000 défaillances d'entreprises, soit 53 000 défaillances sur l'année. Plus de 90% de ces défauts concerneront des TPE, des structures de plus en plus enclines à publier confidentiellement leurs comptes. Cet été, les sociétés défaillantes en âge de publier leurs comptes étaient seulement 60% à répondre de cette obligation, 25% d'entre elles ayant opté pour la confidentialité ; ce taux de confidentialité est dix fois supérieur à celui constaté il y a deux ans, durant l'été 2017. Cette moindre transparence financière des entreprises doit inciter les fournisseurs à davantage de vigilance sur la gestion d'un risque client qui se durcit ! » conclut Thierry Millon.