"C'est encore très lent dans l'aéroportuaire", a résumé vendredi Xavier Huillard, PDG de Vinci, lors de la présentation de ses résultats semestriels.
La crise sanitaire du virus a plombé le groupe. Il subit une perte nette de 294 millions d'euros, un an plus tôt, c'était un bénéfice de plus d'un milliard, et une chute de 15% de son chiffre d'affaires, sur un an, à 18,5 milliards.
Vinci s'abstient de prévisions précises pour l'année en cours, promettant de faire mieux au second semestre mais prévenant que revenus comme bénéfices seront en "très net retrait" par rapport à l'an dernier.
Surtout, le retour à la normale attendra. Même si le groupe assure de sa capacité à vite rebondir, il prévient déjà que ses résultats ne retrouveront pas l'an prochain leur niveau de 2019.
Ces annonces étaient accueillies sans grande réaction en Bourse, où Vinci évoluait à l'ouverture en légère hausse (+0,62%).
Le groupe a souffert dans ses deux grandes branches: les chantiers de construction et les transports, domaine dans lequel il exploite des autoroutes et des aéroports.
Ces deux grands univers ont en commun d'avoir subi la crise sanitaire et la mise en place pendant plusieurs semaines de strictes mesures de confinement dans de nombreux pays, dont la France.
Reste que leurs perspectives sont désormais très contrastées.
Les chantiers ont, certes, dû largement s'arrêter pendant des semaines à cause des restrictions sanitaires. Avec ces retards en série, Vinci prévient que les revenus de cette branche baisseront cette année entre 5% et 10%.
Mais l'avenir s'y annonce finalement bien. Les chantiers ont vite repris, ont globalement retrouvé une activité normale, et les commandes, gage de revenus futurs, ont fortement augmenté grâce à de gros contrats comme le futur siège du groupe Total à la Défense.
Sur les autoroutes, le trafic revient peu à peu même si le bilan sera lourd sur l'année. Là où la situation ne s'éclaircit pas, c'est dans les aéroports, au moment où le secteur aérien voit de plus en plus s'éloigner la perspective d'un retour à la normale.
Pas de regrets
La fédération mondiale du secteur vient de reconnaître qu'il ne fallait pas tabler dessus avant 2024, car la recrudescence du Covid-19 dans un certain nombre de pays freine la réouverture des frontières.
La conséquence est rude pour Vinci. Il juge que le trafic aura chuté de deux tiers dans ses aéroports cette année, sans s'avancer encore à chiffrer les conséquences pour ses résultats.
Difficile d'imaginer un pire moment pour le groupe, car il sort de plusieurs années d'investissements massifs dans les aéroports internationaux, un développement qu'il a mis au coeur de sa stratégie.
Son opération la plus emblématique reste le rachat l'an dernier pour quelque trois milliards d'euros du site de Gatwick à Londres. Mais c'est loin d'être le seul aéroport à avoir rejoint le portefeuille de Vinci, devenu l'an dernier le deuxième spécialiste mondial des aéroports derrière l'espagnol Aena.
Cette stratégie avait un sens. Même si le trafic aérien marquait déjà le pas juste avant la crise sanitaire, il restait animé et les aéroports devaient être le gage de bénéfices réguliers pour le groupe, comme ses autoroutes.
Certes, cela l'exposait à des polémiques comme sur la privatisation d'ADP, exploitant des aéroports d'Orly et Roissy pour lesquels Vinci marquait un intérêt de moins en moins marqué ces derniers temps. Mais les résultats économiques étaient là, avec une part de plus en plus marquée dans ses bénéfices.
Désormais, la situation a drastiquement changé, même si le groupe assure ne pas avoir de regrets.
"Nous sommes des gens de long terme, nous voyons loin", a minimisé M. Huillard, renvoyant à la durée très longue des concessions d'aéroports, généralement sur plusieurs dizaines d'années.
"Le trafic aérien n'a aucune raison de ne pas redémarrer dans les prochaines années", a-t-il conclu. "Il s'agit simplement d'être patients."