Bien que la crise sanitaire perdure, les signaux de reprise économique se multiplient dans un contexte où l'activité est portée à la fois par l'arsenal budgétaire des mesures de soutien et du plan de relance mais aussi par le rattrapage des dépenses des agents économiques dont les besoins ont été bridés pendant plus d'un an. Côté matériaux, la demande de granulats et de BPE des quatre premiers mois de l'année a rejoint les niveaux de 2019. Il est vrai que les carnets de commandes du bâtiment n'ont jamais été aussi remplis et que, côté Travaux Publics, le redémarrage de l'activité s'est également enclenché. Même si certains indicateurs sont encore à la traine, l'année 2021 s'annonce d'ores et déjà meilleure qu'attendu.
Un mois d'avril supérieur à la moyenne
Les premières estimations sur le mois d'avril traduisent une activité assez vigoureuse pour les matériaux, bien qu'en léger retrait par rapport à mars (-2,2% pour les granulats et -3,7% pour le BPE, données CVS-CJO). Certes en très forte progression par rapport à l'année dernière, effet de base oblige, la production de granulats affiche une hausse de +4,7% par rapport à avril 2019. Elle se situe environ 0,5% au-dessus de la moyenne des mois d'avril de ces vingt dernières années et +10,7% au-dessus de celle enregistrée depuis dix ans. Au cours du trimestre allant de février à avril, la production se stabilise à son niveau du trimestre précédent (-0,1%) rejoignant ainsi celui de 2019 (-0,3%). En cumul sur les quatre premiers mois de 2021, l'activité granulats enregistre ainsi une progression de +1,4% comparée à la même période de 2019 et de plus de +7% au regard de la moyenne constatée sur la même période de ces dix dernières années.
Sur douze mois glissants, la progression affiche désormais +8,1%. Côté BPE, les livraisons d'avril 2021 dépassent aussi celles d'avril 2019 (+2,1%), se situant 15,6% au-dessus d'un mois d'avril moyen sur ces dix dernières années. Pour autant, les livraisons de BPE de ces trois derniers mois ont légèrement reculé au regard des trois mois précédents (-1,6%) mais aussi par rapport à la même période de 2019 (-1,7%). En cumul depuis janvier 2021, les cubages livrés ont retrouvé leur niveau de 2019 (-0,3%), soit des volumes 13% supérieurs aux cumuls moyens constatés depuis 2010 sur cette période. A fin avril, et sur douze mois glissants, la production de BPE croît ainsi de +13,2%. Notre indicateur matériaux affiche également un rebond marqué : après une hausse de +21,2% sur un an au premier trimestre (et de +2,3% rapport à 2019), la progression en cumul sur les quatre premiers mois atteint +3,1% par rapport la même période de 2019.
Perspectives au beau fixe dans le bâtiment
Interrogés en mai par l'INSEE, les entrepreneurs du bâtiment confirment la bonne tenue de leur activité et portent même un regard plus optimiste qu'en avril sur leur activité future. Le solde d'opinions surpasse en effet largement sa moyenne de long terme, tout comme pour les perspectives d'emploi, en redressement sensible pour le quatrième mois consécutif. Il est vrai que les carnets de commandes assurent désormais 9 mois de travaux, dont 10 mois dans le gros oeuvre, soit un point haut jamais atteint.
Dans le même temps, les tensions sur l'appareil productif se renforcent, ce dernier étant utilisé à 92% de sa capacité dans le gros oeuvre (contre 87,9% en moyenne de long terme) et près d'un entrepreneur du bâtiment sur deux déclare ne pouvoir accroitre sa production. Parmi les freins identifiés, l'insuffisance d'approvisionnement connaît un vrai rebond en mai, cité dans 9,8% des cas (1,6% en moyenne de long terme). Ce sursaut est sans doute imputable aux pénuries de matériaux récemment évoquées et se retrouve aussi dans l'évolution des prix. En effet, en mai, les chefs d'entreprise sont bien plus nombreux à annoncer qu'ils augmenteront leurs tarifs au cours des prochains mois, le solde d'opinion ayant atteint un niveau jamais connu depuis juillet 2008. Côté construction, on note un fort redressement des mises en chantier de logements à fin avril (+7,6% sur les trois derniers mois comparés aux trois mois précédents, données CVS-CJO).
Ce redressement vaut aussi bien pour le collectif (+11,8%) que pour l'individuel (+2%). Selon le SDES, les mises en chantier auraient été plus nombreuses en moyenne pendant cette période (+5,7%) qu'au cours des douze mois précédant la crise sanitaire. Au final, on compte 387 500 logements commencés sur une année à fin avril, soit +7% en un an. En revanche, côté permis, le redémarrage est moins marqué : s'il est plutôt vigoureux s'agissant de la maison individuelle (+6,4% au cours du trimestre allant de février à avril, au regard du trimestre précédent), il est encore hésitant sur le segment du collectif (-7,6%). A fin avril et sur douze mois, 405 700 autorisations étaient recensées, soit un repli de -6,5% sur un an. Enfin, du côté du non résidentiel, la situation reste préoccupante.
Les surfaces autorisées restent en net recul sur les douze derniers mois (-8,5% à fin avril) tandis que les locaux commencés continuent de baisser (-8,6%). Si le marché du logement neuf s'est raffermi au premier trimestre, avec des ventes en hausse de +16,2% sur un an, ces dernières demeurent encore inférieures de -2,8% à celles de 2019. Dans un contexte où les taux d'intérêt des prêts habitat ont atteint un plancher historique (1,07% en avril-mai), la demande des ménages pourrait se renforcer dans les mois à venir, comme l'anticipent les promoteurs dans la dernière enquête de l'INSEE. En dépit d'une offre en progression (+12,1% au premier trimestre), les stocks de logements disponibles continuent de se réduire (-11,4%) pour atteindre son plus bas niveau des dix dernières années.
TP : l'activité se ranime
Dans le prolongement du redémarrage amorcé en mars, l'activité s'est raffermie en avril selon la FNTP. Les facturations de ces trois derniers mois ont grimpé de +8,3% par rapport au trimestre précédent (CVS-CJO), retrouvant un niveau comparable à celui de 2019. Ainsi, en cumul depuis janvier, les travaux réalisés progressent de +1,1% par rapport à 2019. Jusqu'ici atones, les prises de commandes retrouvent des couleurs en avril (+11% par rapport à mars) mais elles demeurent encore bien en-deçà des niveaux de 2019 (-9% et -16% en cumul sur les quatre premiers mois de l'année). Faut-il y voir les premiers signes du réveil de la commande publique et des appels d'offre liés au Plan de relance ? La dernière note de l'Observatoire de la Commande Publique de Maîtrise d'oeuvre en bâtiment et aménagement souligne en tout cas une nette croissance des opérations au premier trimestre (827, soit +41,7%), pour un volume théorique de travaux de 1,7 milliard d'euros par mois. La MIQCP* évoque même un « nouveau cycle d'activité élevée » post-crise sanitaire, lié à des effets de rattrapage/ reprise (après les élections locales) mais aussi lié au Plan de relance. Une évolution à surveiller dans les mois à venir...